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Tabac contre e-cigarette devant le tribunal à Toulouse

Des paquets de cigarettes dans les rayons d'un buraliste le 27 juin 2013 à Béthune [Denis Charlet / AFP/Archives] Des paquets de cigarettes dans les rayons d'un buraliste le 27 juin 2013 à Béthune [Denis Charlet / AFP/Archives]

La bataille entre vraie cigarette et cigarette électronique se déplace ce lundi devant la justice à Toulouse où un buraliste poursuit un vendeur d'e-cigarettes pour concurrence déloyale.

Le procès, prévu vers 16H00 devant le tribunal de commerce, constitue une première en France selon les avocats au dossier. Ces derniers se divisent quant à la portée du jugement que rendront les juges consulaires.

Le plaignant, un buraliste de Plaisance-du-Touch dans la banlieue toulousaine, accuse les responsables de la boutique Esmokeclean, ouverte en juin tout près de son pas de porte, de violer la règlementation en faisant de la publicité pour leurs produits dans le magasin, sur leur page Facebook et leur site internet.

Il estime plus globalement que la cigarette électronique tombe, comme la vraie cigarette, sous le coup du monopole d’État et ne devrait être vendue que par des débitants de tabac.

Il demande donc que le tribunal interdise à Esmokeclean la publicité comme la commercialisation de ses cigarettes électroniques sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard.

Bertrand Desarnauts, l'avocat du bureau de tabac détenu par la société Hérande, espère une condamnation qui "fasse jurisprudence" car selon lui "la position des pouvoirs publics n'est pas très nette".

Me Benjamin Echalier, son contradicteur, relativise: "C'est une décision certes attendue mais, quelle qu'elle soit, je pense qu'elle ira en appel", a-t-il estimé. Il s'accorde lui aussi à parler "de vide juridique" concernant le commerce de cigarettes électroniques dans l'Hexagone, et appelle de ses vœux l'intervention du législateur.

 

"Eux l'addiction, nous le remède"

Des cigarettes électroniques utilisées le 21 juin 2013 à Lille [Denis Charlet / AFP/Archives]
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Des cigarettes électroniques utilisées le 21 juin 2013 à Lille
 

"On (le buraliste) nous dit que le commerce de cigarettes électroniques est du ressort de la loi Evin (relative à la lutte contre le tabagisme), nous on dit que non. Si on a en définitive un texte de loi, ce sera une vraie source de droit, qui s'imposera à tous. Faute d'une loi, la décision du tribunal de commerce restera une décision un peu isolée", ajoute-t-il.

Le buraliste reproche au vendeur d'e-cigarettes de "faire une publicité illicite en faveur d'un produit qui rappelle l'acte de fumer, à l'instar des traditionnels fume-cigarettes" et qui contient le plus souvent de la nicotine.

Il entend en outre plaider que ces produits "relèvent du monopole de la distribution réservés aux buralistes", soutenant que les cigarettes électroniques entrent dans la catégorie des "produits destinés à être fumés même s'ils ne contiennent pas de tabac".

Reynald Pirat, un des patrons de la boutique d'e-cigarettes, s'étonne. "Je ne fais pas du tout le même produit qu'eux", a déclaré à l'AFP M. Pirat dont les appareils délivrent dans la bouche du "vapoteur" de la vapeur contenant de la nicotine. Son avocat, Me Echalier, dément que la e-cigarette soit "un produit du tabac". Pour lui, "il s'agit d'un produit d'utilisation courante, qui ne fait l'objet d'aucun monopole. Donc le fait d'en vendre n'est pas une faute".

Quant à la publicité faite autour de la e-cigarette, l'avocat souligne qu'elle "vante le sevrage" par rapport au tabac. "Eux c'est l'addiction et nous c'est le remède. C'est ironique quelque part".

Croissance fulgurante de l'e-cigarette

Cette action en justice est intentée au moment où l'Europe se penche sur une nouvelle législation anti-tabac. Le Parlement européen, le 8 octobre, s'est montré moins sévère que ce que demandait la Commission européenne qui voulait confiner sa vente aux pharmacies. La vente aux mineurs et la publicité demeurent cependant interdites. La cigarette électronique connaît une croissance fulgurante: selon l’Eurobaromètre 2012, 6% des Européens (soit 3 millions d’adultes en France) ont essayé l’e-cigarette.

Pour l'Office français de lutte contre le tabagisme (OFT) et l'association indépendante d'usagers de la cigarette électronique Aiduce, le recours à ces produits explique au moins pour partie la baisse des ventes de tabac en France depuis près de deux ans. Sur l'ensemble de l'année 2012, le marché du tabac a baissé de 4,9% en volume.

Le tribunal de commerce de Toulouse devrait mettre son jugement en délibéré.

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