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Le traceur chimique, dernière arme de dissuasion contre les braquages

La vitrine d'une bijouterie [Jack Guez / AFP/Archives] La vitrine d'une bijouterie [Jack Guez / AFP/Archives]

"Ne prenez pas de risque", conseille aux braqueurs potentiels le panneau à l'entrée de la bijouterie Auchan du centre commercial Vélizy 2. Et pour cause: la chaîne de grande distribution a inauguré ce mois-ci un système de traceurs chimiques, expérimenté en France depuis deux ans.

Disposés dans le faux plafond de la boutique et au-dessus des sas de sortie, des sprays sont activés en cas de braquage, aspergeant les malfrats d'un liquide inodore et incolore. Chaque produit, qui possède un ADN unique, imprègne la peau, les cheveux et les vêtements pendant plusieurs semaines et ne se révèle que sous une lampe à UV.

Le marquage est destiné à fournir un élément de preuve aux forces de l'ordre. Le lieu et l'heure du déclenchement de chaque buse étant enregistrés, il leur permet d'établir un lien irréfutable entre un suspect et un vol à main armée.

A la suite d'un nouveau braquage de la bijouterie en mai, le second en trois ans, les responsables de l'Auchan de Vélizy 2 (Yvelines) ont décidé d'ajouter les traceurs chimiques aux autres systèmes de protection, dont la vidéosurveillance. "L'objectif, ce n'est pas que les braqueurs se fassent arroser, c'est qu'ils ne viennent plus", explique Philippe Raynaud, le responsable sécurité de l'hypermarché.

"Le but, c'est bien de dissuader. Et, pour nos acheteurs, de rassurer leurs salariés et de procurer une tranquillité aux clients qui peuvent se trouver au milieu d'un braquage", confirme Didier Cottin, le directeur général France de Smartwater, concepteur du dispositif.

Popularisés en Grande-Bretagne depuis 2003, les traceurs chimiques y ont permis, selon lui, plus d'un millier de condamnations pénales ainsi qu'une baisse de 90% des attaques de commerces équipés.

A titre d'expérimentation, des traceurs chimiques ont été déployés en France depuis 2011, notamment dans les Bouches-du-Rhône et à Rosny 2 en Seine-Saint-Denis.

Dans ce centre commercial, un stand de bijouterie des galeries Lafayette et la joaillerie Didier Guérin ont connu "une recrudescence" de vols à main armée en 2011, avec trois braquages en quelques mois, rappelle Didier Scalini, commissaire de Rosny-sous-Bois.

Un déplacement de la délinquance

Les bijoutiers et le centre commercial décident alors de tenter l'expérience de l'ADN chimique et font beaucoup de publicité autour du dispositif, dûment signalé en vitrine par des macarons. Depuis, aucun braqueur ne s'est manifesté.

"Je ne savais pas si ça allait calmer les vols à main armée quand on a débuté. Mais, avec deux ans de recul, je pense sincèrement que cela a un rôle préventif et dissuasif", souligne M. Scalini.

"Les braquages ont cessé quasiment du jour au lendemain alors qu'on en déplorait régulièrement", selon le commissaire. "En même temps, cela a déporté parfois ce type de délinquance vers d'autres centres commerciaux et des commerces ailleurs à Rosny-sous-Bois", constate-t-il.

A l'heure actuelle, Smartwater recense une centaine d'installations en France, des commerces aux entrepôts en passant par les marquages d'objets chez les particuliers, contre plus d'un million et demi au Royaume-Uni.

Une buse coûte environ 3.500 euros. Or "pour les bijouteries, les coûts d'équipement sont déjà très lourds", fait observer Guy Subra, président de l'Union de la bijouterie horlogerie (UBH), en citant les caméras, vitrines blindées ou systèmes d'alarme.

L'UBH demande que l'Etat aide au financement de ce nouvel outil par le biais d'un crédit d'impôt. "Nous sommes dans une période où, commercialement, ce n'est déjà pas facile" et "les agressions sont de plus en plus fortes", selon M. Subra.

L'installation de traceurs chimiques dans les commerces figure, aux côtés de la lecture automatisée des plaques d'immatriculation ou du bouton d'urgence, parmi les mesures préconisées par le "plan national" de lutte contre les cambriolages lancé le 25 septembre par le ministre de l'Intérieur Manuel Valls.

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