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Affaire Neyret : un policier sort du silence

L'ex-patron de la police judiciaire de Grenoble Christophe Gavat pose le 16 avril 2013 à Paris [Bertrand Guay / AFP] L'ex-patron de la police judiciaire de Grenoble Christophe Gavat pose le 16 avril 2013 à Paris [Bertrand Guay / AFP]

Christophe Gavat, ex "patron" de la police judiciaire de Grenoble, est le premier policier mis en examen dans l'affaire Neyret à rompre le silence en dénonçant une enquête "à charge" dans cette retentissante affaire de corruption policière.

Dans un livre paru cette semaine aux Éditions Michalon, le commissaire de 45 ans raconte ses "96 heures" - titre de l'ouvrage - de garde à vue à la "police des polices", critiquant avec véhémence l'enquête, du "grand n'importe quoi", a-t-il affirmé dans un entretien à l'AFP.

Visage poupon, barbe naissante bien entretenue, ce fonctionnaire aujourd'hui affecté "à sa demande" à la police aux frontières (Paf) de Cayenne, raconte que le "ciel (lui) est tombé sur la tête" le jour où il a appris sa convocation à l'Inspection générale des services (IGS) dans le cadre de l'affaire Neyret.

Son "ami" Michel Neyret, alors No 2 de la PJ lyonnaise, venait d'être interpellé dans une affaire de corruption et de trafic d'influence. Lui est placé en garde à vue durant quatre jours puis mis en examen pour notamment "trafic de stupéfiants" et "association de malfaiteurs" après avoir, selon l'enquête, accepté de détourner de la drogue pour un indicateur à la demande de Neyret. Trois autres policiers ont subi le même sort.

"Vous vous rendez compte ? Une telle mise en examen, sur la foi d'écoutes, rien d'autre", s'indigne-t-il, affirmant avoir en fait "brûlé" cette drogue, ce que l'IGS a vérifié, selon lui, sans "en avoir" pour l'heure "tenu compte".

L'ex-patron de la police judiciaire de Grenoble Christophe Gavat pose le 16 avril 2013 à Paris [Bertrand Guay / AFP]
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L'ex-patron de la police judiciaire de Grenoble Christophe Gavat pose le 16 avril 2013 à Paris
 

"Injustice"

Il se retrouve dans la position du gardé à vue, lui qui était entré dans la police pour "aider les autres" et "par goût de l'action". Il ne verra, soutient-il, les enquêteurs et les juges "que brièvement". Sans pouvoir s'expliquer et avec le sentiment que ses vingt-cinq années de policier sont "rayées d'un trait" et d'en être réduit au statut de "voyou".

"On a le temps de réfléchir", dit-il, notamment sur la garde à vue, un "énorme pouvoir" dont il a tant et tant usé, parfois "sous la pression de la course aux chiffres" pour "avoir de bons indicateurs de réussite".

Il réfléchit aussi sur son métier et décide, avec humour et un vrai talent de conteur, de raconter sa vie, avec force anecdotes, une façon d'exorciser ce qu'il a vécu comme une "injustice". Il ne s'exprime pas sur Neyret - un "grand chef" selon lui - qu'il n'a pas le droit de voir. Il pense que l'affaire "se dégonflera" quand elle viendra en jugement.

"Le mal est fait", assène-t-il, "je me suis retrouvé dans la position du coupable, sans salaire", momentanément, avant de retrouver un poste, et surtout "sans métier". "Je suis dégoûté du système", ajoute-t-il. Il a demandé et obtenu sa mise en disponibilité au 1er septembre.

Le cinéma, par l'intermédiaire du réalisateur et ancien flic Olivier Marchal, lui fait les yeux doux. Les droits de son livre ont été achetés pour un téléfilm dont il sera, dit-il, le co-scénariste.

"La machine judiciaire est terrible, on a fait une enquête sociale sur moi !", ajoute Gavat avec amertume, et "même si je suis blanchi il y aura toujours quelqu'un pour dire: +C'est le gars de l'affaire Neyret+".

"Autant partir", conclut-il avec une pointe de regret. "La police est un métier d'hommes, de l'humain, j'ai des amis partout et dans tous les milieux" mais "j'ai été condamné avant d'être jugé".

Il entend aussi engager une réflexion sur "ce que revêt" et "veut dire une garde à vue". Mais du dehors.

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