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Ces médicaments "hors AMM" qui soignent d'autres troubles que prévus

[Philippe Huguen / AFP/Archives]

L'affaire du Diane35, ce médicament officiellement commercialisé pour soigner l'acné mais prescrit comme contraceptif, met en lumière les nombreux cas de médicaments utilisés pour des indications bien différentes de leur destination initiale. Ce sont les "prescriptions hors AMM".

En France, avant d'être commercialisé, un médicament doit recevoir une "AMM", une autorisation de mise sur le marché, délivré par l'ANSM, l'Agence nationale de sécurité du médicament. Cette autorisation décrit les pathologies pour lesquelles le médicament peut être utilisé, la durée du traitement, la posologie et les contre-indications. Sauf que les médecins peuvent prescrire en dehors de ces règles "officielles".

Typiquement, c'est le Médiator, un médicament contre le diabète qui a peu à peu été prescrit comme coupe-faim en dehors de toute "AMM". Aujourd'hui, c'est le Diane35, un médicament commercialisé normalement pour soigner l'acné mais qui a ensuite été prescrit comme contraceptif oral. Mais mal prescrit, l'un et l'autre semblent avoir eu des effets préoccupants.

 

Au moins 15% des prescriptions hors AMM

Mais ces deux produits ne sont pas les seuls, loin de là, à avoir été prescrits "hors AMM". Les prescriptions "hors AMM" représenteraient aujourd’hui entre 15 et 20% de la totalité des prescriptions. Elles atteindraient même 80% des ordonnances en pédiatrie, oncologie, gériatrie, psychiatrie et pas loin de 100% pour le traitement de certaines maladies rares.

En principe, les médecins disposent de la liberté de prescription. Prescrire "hors AMM" est donc parfaitement autorisé. Car entre l'AMM dûment tamponée et la prescription médicale, la science évolue, des études médicales sont publiées et des essais cliniques validés. Or l'ANSM ne prend pas forcément le train en marche, ou mieux les laboratoires pharmaceutiques ne souhaitent pas financer les études qui valideraient les préconisations du corps médical. Donc l'AMM n'est pas modifiée tandis que la variété des prescriptions évolue.

 

Le baclofène

Au rayon des médicaments largement prescrit par le corps médical en dehors de toute AMM, on trouvait jusqu'à mi 2012 le baclofène (Lioresal) autorisé initialement pour traiter la sclérose en plaque, mais largement détourné pour traiter la dépendance alcoolique. Le produit fait l'objetc actuellement d'une demande de "recommandation temporaire d'utilisation" (RTU).

La prescription médicale hors AMM peut aussi se faire pour des raisons économiques, c'est le cas de l'Avastin, un anti-cancéreux reconnu mais prescrit en traitement de la dégénérescence liée à l'âge (DMLA) car d'un coût moindre.

Pour la perte de poids, quelques médicaments stars des pharmacies sont souvent prescrits. A l'instar de l'antidépresseur Prozac, du Zyban qui est à la base utilisé dans le sevrage tabagique, mais également d’hormones thyroïdiennes comme le Levothyrox. L'affaire du Médiator a semble-t-il diminué cette pratique.

 

Motilium et Rivotril

Les autorités de santé mettent aussi en garde contre l’utilisation "hors AMM" de la dompéridone. Vendu sous le nom de Motilium, il est théoriquement utilisé comme stimulant de la motricité gastrique. Or certains médecins prescrivent ce médicament pour un de ses effets secondaires… la stimulation de lactation.

Autre exemple de médicament utilisé en dehors de toute AMM, le Rivotril. Lui est censé traité l'épilepsie. Or, des praticiens l'ont volontiers prescrit pour soigner des toxicomanes ou à des fins de soumission chimique.

D'autres médicaments sont dans le collimateur des autorités de santé. Comme l'Aetoxisclerol, un sclérosant veineux qui peut donner lieu à des complications thromboemboliques et qui est largement utilisé hors AMM.

Idem pour le Zyvoxid, un anti-infectieux utilisé pour le traitement des pneumonies. Ce produit ferait peser des risque d'atteintes hématologiques et risque d'acidose lactique associés à une utilisation prolongée.

Et la liste est longue comme en témoigne le référentiel de bon usage des médicaments publié par l'ANSM en juillet 2012.

 

Une nouvelle législation

Après le scandale du Médiator, le gouvernement a réagi et a fait voter une loi fin 2011. Désormais, dès qu'une prescription hors AMM apparaîtra conforme aux évolutions des connaissances médicales, l'ANSM édictera une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) qui légitimeront les pratiques des médecins de ville. Par ailleurs, les médecins doivent désoramais mentionner sur leur ordonnance une prescription "hors AMM" à titre d'information et de transparence à l'égard des patients.

 

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