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Guerre de l'or en Guyane

Un hélicoptère de la gendarmerie nationale se pose en juin 2004 sur le village d'orpailleurs illégaux du site de Dorlin. [©GENDARMERIE NATIONALE/AFP]

Contre-attaque. Deux semaines après la mort de deux militaires français dans la forêt guyanaise, tués par des orpailleurs clandestins, l’armée a repris mercredi le contrôle de la zone de Dorlin, le lieu du drame.

Une opération de sécurisation menée par 150 militaires et gendarmes, poursuivie hier par une inspection des sites disséminés à travers la forêt vierge, sans rencontrer de résistance. Face à l’ultra-violence dans laquelle sont tombés certains orpailleurs le 27 juin, l’armée française a pris les choses en main.

La ruée vers l’or

Au centre des attentions, un seul appât : l’or. Depuis plusieurs dizaines d’années sévissent dans cet enfer vert les fameux garimpeiros, les orpailleurs clandestins. Le plus souvent originaires du Suriname ou du Brésil voisins, ils forment, sur ordre de commanditaires extérieurs, des groupes de 10 à 20 personnes envoyés plusieurs mois en forêt pour orpailler secrètement. Leurs campements, plantés au cœur d’un département sauvage grand comme le Portugal, relèvent de l’exploit.

Leur contrat est oral : les chercheurs redonnent une part substantielle de l’or extrait au patron. Ce dernier, en échange, finance l’approvisionnement du camp en vivres, en essence et en femmes. Celui qui ne respecte pas l’accord est puni de mort. «Ce ne sont pas de vrais bandits mais des travailleurs, explique Florent Kohler, chercheur au CNRS spécialiste de la région. Ils pourraient aussi bien chasser le caïman».

Faux bandits, donc, mais vrais pollueurs. Destruction des cours d’eau, déforestation, contamination au mercure, leur impact écologique est catastrophique pour le poumon vert de la planète.

Manoelzihno, chef de gang 

En tuant deux militaires français, les garimpeiros ont franchi une ligne rouge tacite, passant de «délinquants écologiques» à «bandits lourdement armés», selon le sénateur de Guyane Jean-Etienne Antoinette. «Avec ce traquenard effectué par des hommes suréquipés, on dépasse largement le cadre habituel. On tombe dans le crime organisé», estime Florent Kohler.

Le cours de l’or ayant triplé ces cinq dernières années (41 euros le gramme actuellement), les gangs de la région ont vu dans le métal précieux un trafic de plus en plus lucratif. Les sites clandestins deviennent des prises de guerre, dont le contrôle se gagne parfois dans le sang.

Le gang suspecté d’être à l’origine de la tuerie de Dorlin est de ce type. Menés par leur chef «Manoelzihno», ces huit Brésiliens sont réputés pour leur ultra-violence. Ils sont soupçonnés d’avoir pris en janvier dernier le contrôle d’un camp d’orpaillage clandestin en tuant une bande rivale connue pour les mêmes méthodes. Pistés par les gendarmes, ils pourraient aussi voir jouer contre eux le bruit qu’a engendré leur accrochage meurtrier avec les autorités françaises.

D’autres orpailleurs, ne pouvant «travailler» qu’à l’abri des regards et voyant leur clandestinité inquiétée pour les prochains mois, pourraient vouloir rendre leur propre justice en les éliminant. 

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