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Inaction climatique : les associations de «l'Affaire du Siècle» saisissent le Conseil d'Etat

En décembre, les membres de «l'Affaire du siècle» ont été déboutés de leur demande d'astreinte de 1,1 milliard d'euros à l'encontre de l'exécutif, qu'ils accusent d'inaction climatique. [AFP]

Ce jeudi 22 février, les associations de «l'Affaire du siècle» ont annoncé avoir saisi le Conseil d'Etat pour continuer à dénoncer l'inaction climatique de l'Etat.

Après avoir réussi à faire condamner l'Etat deux fois en 2021, les associations de «l'Affaire du siècle» ne désarment pas. Elles ont annoncé, ce jeudi 22 février, avoir déposé un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat, deux mois après avoir été déboutées de leur demande d'astreinte de 1,1 milliard d'euros à l'encontre de l'exécutif, qu'elles accusent d'inaction climatique.

Le 22 décembre dernier, le tribunal administratif de Paris a en effet refusé de prononcer cette astreinte financière, estimant que la «réparation du préjudice écologique a été tardive mais est désormais complète». La décision pointait le fait que l'Etat, «conformément à l'injonction qui lui avait été faite, avait adopté ou mis en oeuvre des mesures» en ce sens.

Le rapporteur public avait notamment souligné les dernières données en date en matière d'émissions nationales de CO2, qui montrent une baisse de 4,3% pour l'année 2023 et de 2,7% en 2022. Des chiffres permettant selon lui «de considérer que le préjudice avait entièrement été réparé».

Une conclusion que ne partagent évidemment pas les associations de l'Affaire du siècle : Greenpeace France, Notre Affaire à tous et Oxfam France. Dans le communiqué publié ce jeudi pour expliquer leur pourvoi en cassation, elles se disent inquiètes de cette décision «qui risque de créer une jurisprudence dommageable pour l'avenir de la justice climatique» et pourrait «donner un feu vert à une transition subie et non planifiée». Elles accusent le tribunal de refuser «de mobiliser les outils à sa disposition pour forcer l'Etat à agir».

En février 2021, ces associations avaient pourtant obtenu gain de cause puisque le tribunal administratif de Paris avait jugé l'Etat responsable de manquements à ses engagements et du «préjudice écologique» qui en découle. Plus tard la même année, en octobre, la justice avait ordonné que soient compensés le «31 décembre 2022, au plus tard» les 15 millions de tonnes d'équivalent CO2 (MtCO2e) émises en trop par rapport aux objectifs de la France en 2015-2018.

La dernière procédure visant à réclamer l'astreinte financière d'1,1 milliard d'euros a été lancée en juin 2023, les associations estimant que ces précédents jugements n'avaient pas été suivis d'effets. Elles considèrent que depuis les décisions de 2021 «le retard climatique pris par la France s'est (...) accru», notamment en raison de l'effondrement des puits de carbone comme les forêts qui, du fait de leur dégradation, stockent moins de CO2.

Le calcul du retard climatique de la France faussé

«Les dommages restant à réparer (sont) bien plus importants que ceux que le tribunal retient», insistent les membres de l'Affaire du siècle, dénonçant le fait qu'il «intègre dans son bilan (...) les facteurs extérieurs à l'action de l'Etat», comme la crise du Covid ou la guerre en Ukraine. Selon eux, ces facteurs conjoncturels représentent 74% des baisses d'émissions enregistrées par la France.

Ce jeudi, ces associations reprochent à la justice de «ne demander aucune nouvelle mesure structurante» et de «refuser de prononcer des astreintes» tout en continuant de reconnaître que l'Etat a pourtant bien manqué pendant un temps à ses obligations.

Elles déplorent en outre que le calcul du retard climatique de la France effectué par le tribunal occulte l'utilisation et le changement d'affectation des terres et de la foresterie (UTCATF). «Pourtant de 2019 à 2022, entre 83 et 92 mégatonnes équivalent CO2 ont été émises en trop, par rapport à ce que les puits de carbone étaient en capacité de réguler, en contradiction avec la Stratégie nationale bas-carbone», poursuivent-elles.

Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, a pris la parole ce jeudi, jugeant que «le gouvernement ne peut plus se permettre tant de paresse en matière de politique climatique : il doit respecter les objectifs de la France, sans exception de dernière minute, sans tour de passe-passe pour espérer afficher une bonne conduite de façade».

Le délégué général de Notre Affaire à tous, Jérémie Suissa, craint de son côté qu'«en refusant d'agir sérieusement sans attendre, le gouvernement condamne la France à agir à la dernière minute, quand il sera beaucoup trop tard».

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