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Claire Nouvian, porte-voix des profondeurs océaniques

Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris [Patrick Kovarik / AFP/Archives] Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris [Patrick Kovarik / AFP/Archives]

Avec la maîtrise de six langues dans sa besace, Claire Nouvian a d'abord sillonné la planète pour réaliser des documentaires animaliers avant de fonder l'association Bloom et de devenir l'une des figures de proue de la défense des grands fonds marins, menacés par la pêche industrielle.

Son engagement lui a valu d'être désignée "Femme de l'environnement 2012" lors des Trophées des femmes en Or de Courchevel (Savoie).

Son combat: peser sur la réforme de la politique de la pêche commune, alors que l'Europe épuise trop ses stocks de poissons, et durcir le règlement sur la pêche profonde pour bannir les chaluts qui "raclent" les fonds des océans.

"La science est unanime sur les dégâts", se désole-t-elle, ajoutant: "On a bien interdit la pêche au chalut en Méditerranée au-delà de 1.000 m ou complètement aux Açores, à Madère et aux Canaries".

Ses yeux bleus se durcissent soudain lorsqu'elle évoque la position de la France sur ces sujets: "C'est honteux, les députés français européens ont été les seuls socialistes à voter en février contre la proposition du Parlement" visant à mettre fin à la surpêche d'ici 2015.

"C'est la défense des lobbys plutôt que des pêcheurs", lâche cette femme de 39 ans aux allures de grande adolescente mais à la détermination de fer.

Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris [Patrick Kovarik / AFP/Archives]
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Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris

Allers-retours réguliers à Bruxelles, dossiers épluchés parfois jusque tard dans la nuit, perpétuelle course pour le financement d'études scientifiques, conférences données dans des universités de Paris, Genève et aux Etats-Unis: la vie de Claire Nouvian est à la fois un tourbillon et, de son propre aveu, un "quasi sacerdoce".

Mais, face à un monde trop souvent "désespérant", l'action est sa réponse. Quelques victoires venant parfois alimenter cette soif de "faire bouger les lignes": procès gagné contre le groupe Intermarché pour publicité mensongère l'été dernier, décision de Bruxelles de protéger les requins pêchés pour leurs seuls ailerons, satisfaction "d'imposer davantage l'avis des scientifiques".

Avoir des relais

Pour souffler, cette native de Bordeaux à l'enfance nomade (Algérie, Hong-Kong) écoute Beethoven et s'accorde un mois en août, en partie consacré à naviguer.

Sa dévotion aux profondeurs des océans remonte à 2001 lorsque, lors d'un repérage, elle découvre à Monterey (Californie) que des robots plongent à 4.000 mètres et rapportent des images d'une vie insoupçonnée, riche d'animaux inconnus. "Presque des extra-terrestres", glisse-t-elle.

Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris [Patrick Kovarik / AFP/Archives]
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Claire Nouvian, présidente-fondatrice de l'ONG Bloom, photographiée le 14 mai 2013 à Paris

Suivra un livre composé des photos des meilleurs spécialistes pour faire découvrir ce monde de l'obscurité océanique, qui n'a rien d'un désert biologique. L'ouvrage intitulé "Abysses" (2006) sera traduit dans une dizaine de langues et vendu à 150.000 exemplaires. Une exposition éponyme débute à Paris en 2007 et continue aujourd'hui à circuler dans le monde.

Pourtant Claire Nouvian en fait un surprenant bilan: "L'écho médiatique a été très fort, j'ai eu une page dans le New York Times... mais je me suis plantée".

Elle s'explique: "Je croyais que l'on pouvait changer le monde en faisant de la pédagogie (...) j'ai appris qu'il fallait aussi toucher les politiciens, avoir des relais", ajoute-t-elle.

Bloom est né en 2004 de ce constat. Basée à Paris, l'association est une petite cellule, avec une antenne à Hong-Kong.

Via les droits d'auteur, "Abysses" assure encore aujourd'hui une autonomie financière à sa commissaire. Pourquoi pas une grande ONG? "Je les trouvais trop radicales ou trop molles, je m'en méfiais", confie-t-elle. Elle travaille aujourd'hui en partenariat avec elles et se dit "plutôt +hulotiste+, dans le sens où il faut aller chercher la bonne volonté là où il y en a".

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