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Le "pays des fromages" à la traîne dans l'exportation de produits laitiers

Un agriculture trait une vache au salon de l'agriculture à Paris, le 28 février 2013 [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives] Un agriculture trait une vache au salon de l'agriculture à Paris, le 28 février 2013 [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]

Encore un paradoxe français: malgré une baisse de la production mondiale de lait et une demande en croissance exponentielle de produits lactés dans les pays émergents, producteurs et industriels français sont à la peine et voient les nouveaux marchés leur passer sous le nez.

La sécheresse qui a frappé ces derniers mois les grands concurrents internationaux, Nouvelle-Zélande et Etats-Unis en tête, a pourtant gravement affecté la production de lait et contracté l'offre mondiale.

La tendance se confirme même début 2013, selon les statistiques de l'Association de la transformation laitière française (Atla): production en baisse de 5% en Australie et en Russie, de 7% en Nouvelle-Zélande et de 11% en Argentine. Dans l'Union européenne, le recul est de 2,2%.

Pendant ce temps, en France, les producteurs de lait, une partie d'entre eux tout au moins, sont étranglés et n'arrivent pas à vendre leur production à des prix décents.

Face à eux, les transformateurs, producteurs de yaourts et de fromages, peaufinent des plans de restructuration lourds de conséquences, avec un millier d'emplois menacés.

"La demande mondiale en produits laitiers augmente de 2 à 2,5% par an", essentiellement sur ces nouveaux marchés, relève pourtant Olivier Picot, le président de la Fédération des industries laitières (Fnil).

L'exportation représente un débouché important pour les producteurs puisqu'il absorbe 40% du lait français. Mais l'essentiel de leurs débouchés se situent dans l'Union européenne, où la demande s'effondre.

"Il y a 10 ans, la consommation des produits laitiers ultra-frais (à date de péremption courte) augmentait de 2 à 3% par an en volume; en 2012, elle a baissé de 2,5%", note Jehan Moreau, directeur de la Fnil.

"Pas de la haute couture"

Pire, pour l'ego national: à force de couver ses fameuses 365 variétés de fromage comme autant de trésors nationaux, la France se fait doubler sur le terrain des cheddars, mozzarellas, fetas ou fromages filants à pizza...

Une vache [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]
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Une vache

Car si les fromages comptent pour 43% des débouchés du lait en France, les pâtes industrielles prisées dans les pays émergents ne représentent que 2% à 3% de la production nationale.

"Nous avons pris un retard considérable pour servir des marchés comme la Chine et la Russie. Une usine à camemberts ne sait pas forcément faire des produits pour la Chine", constate Gérard Calbrix, l'économiste de l'Atla. "Or le marché qui se développe, ce n'est pas la haute-couture".

Simultanément, il devient difficile d'écouler des produits laitiers vers l'Allemagne ou le nord de l'Europe qui approvisionnent leur propre marché.

Quant au marché de la poudre de lait, lui aussi en expansion dans le monde --surtout en Chine où un scandale de lait frelaté avait tué au moins six bébés en 2008-- il est dominé par la Nouvelle-Zélande et l'Australie.

Ces deux pays fournissent plus de 80% des besoins chinois en lait en poudre, contre 17% pour les Européens (28% pour les poudres maigres).

L'autre paradoxe, aussi, c'est de voir des groupes français comme Lactalis produire, avec succès, du cheddar et autres fromages à pizza aux Etats-Unis, en Russie et jusqu'en Ukraine. Mais pas en France.

Les industriels mettent ici en cause le prix du lait et le poids excessif de la grande distribution qui fait la loi sur ce marché.

"En Allemagne, tous les grands distributeurs ont accepté d'importantes augmentations des prix à l'automne: +20% sur le beurre, +5% à 6% sur les fromages et +16% sur le lait de consommation. Pareil au Royaume-Uni (+20%)" affirme Gérard Calbrix, qui prévoit une nouvelle hausse en mai.

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