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Croissance, déficit : la France dérape mais veut donner des gages à Bruxelles

Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, le 13 février 2013 à Bruxelles [Patrick Kovarik / AFP/Archives] Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, le 13 février 2013 à Bruxelles [Patrick Kovarik / AFP/Archives]

Fixé sur les prévisions de croissance et de déficit de Bruxelles, qui sont mauvaises, le gouvernement français dispose de marges de manoeuvre étroites mais espère pouvoir ne pas trop alourdir la rigueur cette année tout en donnant des gages de sa bonne volonté pour l'avenir.

La Commission européenne a estimé vendredi que la croissance française serait de 0,1% en 2013 contre 0,8% escompté jusqu'à récemment par Paris, et que le déficit public de la France représenterait 3,7% du produit intérieur brut (PIB), bien loin de l'objectif des 3% qui devait être "intangible".

Lorsqu'il a reconnu la semaine dernière qu'il ne pourrait pas remplir l'objectif des 3% faute de croissance, le gouvernement s'est bien gardé d'annoncer un plan de rigueur.

Soucieux de prouver sa bonne volonté à ses partenaires européens, il a en revanche très vite mis en scène une accélération de la machine budgétaire et des réformes en préparation pour 2014 et les années suivantes.

"Si on décidait d'atteindre à tout prix les 3%, on ferait des prélèvements obligatoires, et ça aurait un impact récessif sur la conjoncture. Il ne faut pas qu'on rentre dans cette dynamique", affirmait cette semaine une source gouvernementale.

La consigne est claire: "il ne faut pas ajouter d'austérité" en 2013, une année où les Français sont déjà très sollicités par l'impôt.

Le fort dérapage budgétaire prévu par Bruxelles montre que "toute couche supplémentaire de rigueur est vouée à l'échec, car cela revient à reconnaître que l'austérité a un impact très négatif sur la croissance et limité sur la réduction du déficit", analyse pour l'AFP Jean-Christophe Caffet, économiste chez Natixis.

Pour lui, "il faut absolument s'en tenir à ce qui a été décidé" pour 2013 en profitant de la clémence des marchés financiers. "Il ne faut surtout pas s'en priver, ce serait inutile de se saborder en voulant surajouter à la rigueur", a-t-il ajouté.

Le ministre de l'Economie Pierre Moscovici a prévu de s'exprimer à 14H00 vendredi.

Lettre de cadrage

Mais en attendant, le gouvernement a déjà avancé de trois mois l'envoi de la lettre de cadrage pour l'élaboration du projet de loi de finances pour 2014. Il a aussi révélé la répartition ministère par ministère du gel supplémentaire des dépenses de deux milliards d'euros, annoncé en janvier notamment pour garantir le financement en 2013 des politiques de soutien à l'emploi.

En outre, plus personne dans l'exécutif ne semble remettre en cause l'idée de toucher à la politique familiale et une commission sera installée mercredi pour réfléchir à une nouvelle réforme des retraites.

Egalement inscrits dans le moyen et long terme, à l'échelle du quinquennat, des principes de discipline en matière de dépense des ministères ont été édicté mi-janvier par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault dans une circulaire.

"Ca n'a pas fait plaisir", reconnaît un poids lourd du gouvernement, "tous les ministres tentent de contribuer moins que prévu". Des grincements de dents commencent en effet à traverser la majorité. "Politiquement, ce sera très compliqué", estime Jean-Christophe Caffet, car "il va falloir s'attaquer aux choses qui fâchent".

De même, le recours massif à la fiscalité en 2013 pour réduire les déficits est mal perçu par les entreprises mais aussi par les contribuables si l'on en croit un sondage Harris interactive paru vendredi dans Marianne. L'étude révèle en effet que pour 74% des Français, la politique fiscale du gouvernement est injuste envers eux.

"Quand l'économie va mal, il faut lever un peu le pied sur l'austérité, quand l'économie va bien vous pouvez accélérer l'austérité", résume Mathieu Plane, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Pour lui, au vu de ces mauvaises prévisions européennes, le gouvernement devrait "penser à avoir une politique de sortie de crise".

"Sur l'effort structurel, que nous évaluons à 36 milliards d'euros en 2013, il ne faut pas tout destiner à la réduction des déficits mais consacrer une partie au soutien de l'emploi, au manque de trésorerie, à l'investissement des entreprises, aux chômeurs de longue durée, etc.", recommande-t-il.

"Du coup, on se remet dans une situation où potentiellement on peut avoir de la croissance et une inversion de la courbe de tendance du chômage", insiste cet économiste.

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