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Marché pétrolier : l'Opep condamnée à réduire sa production

La 162e réunion de l'Opep, le 12 décembre 2012 à Vienne [Samuel Kubani / AFP] La 162e réunion de l'Opep, le 12 décembre 2012 à Vienne [Samuel Kubani / AFP]

Désireuse de soutenir les prix du brut, l'Opep va devoir réduire nettement sa production en 2013, sur fond de dégradation de l'économie mondiale et de gonflement de l'offre pétrolière des pays hors du cartel, notamment des Etats-Unis, estiment des experts.

Les douze Etats membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ont décidé mercredi de laisser inchangé le plafond limitant à 30 millions de barils par jour (mbj) leur offre totale.

Un plafond fixé il y a un an mais jamais respecté: en novembre, la production de l'Opep représentait 31,2 mb/j, selon l'Agence internationale de l'Energie (AIE).

L'Arabie saoudite continue de compenser la chute de l'offre iranienne, minée par les sanctions internationales contre Téhéran. Et l'Irak muscle vigoureusement sa production (+20% entre février et novembre) à la faveur de l'essor du secteur pétrolier du pays.

"Pour l'Opep, rien ne poussait à un changement majeur: le marché est bien approvisionné, et les prix du brut restent à des niveaux très confortables" pour les producteurs, oscillant depuis deux mois autour de 110 dollars à Londres, souligne Bill Faren, analyste de Petroleum Policy Intelligence.

Cependant, "si les pays de l'Opep interprètent mal les besoins réels du marché et ne réduisent pas leur production en fonction, ils pourraient bien faire face à une chute des prix du baril" sous 100 dollars "dans les prochains mois", mettent en garde les experts du Centre d'études énergétiques mondiales (CGES).

De fait, dans un environnement économique morose, hanté notamment par les difficultés de la zone euro, la consommation mondiale de brut devrait croître faiblement en 2013 (+865.000 barils par jour selon l'AIE).

Des ouvriers sur un forage pour l'exploitation de gaz de schiste, en 2012 aux Etats-Unis [Mladen Antonov / AFP/Archives]
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Des ouvriers sur un forage pour l'exploitation de gaz de schiste, en 2012 aux Etats-Unis
 

Dans le même temps, la production des pays en dehors de l'Opep, dopée par le boom des hydrocarbures non conventionnels (le pétrole de schiste) aux Etats-Unis, devrait augmenter de 900.000 barils/jour.

Conséquence, la demande pour le brut de l'Opep se contractera à 29,7 mbj l'an prochain selon les prévisions du cartel (1,5 mbj de moins que leur production actuelle). Face à la surabondance d'or noir, les prix pourraient décrocher, au grand dam des pays exportateurs.

"Nous devons revenir aux 30 mbj", a insisté jeudi le secrétaire général de l'Opep Abdallah El-Badri lors d'une rencontre avec la presse. Il a exclu une diminution de la production du cartel sous ce niveau "car l'économie mondiale est encore extrêmement fragile", et "nous ne voulons pas bouleverser le marché", a-t-il dit.

En réalité, pour Torjorn Kjus, analyste DNB Bank, c'est l'Arabie saoudite, principal producteur du cartel (avec 9,90 mbj), qui devrait surtout "limiter son offre pour équilibrer le marché". L'Irak, vivement mis en cause pour l'envolée récente de sa production, a insisté mercredi que de son côté, il "ne diminuerait jamais son offre".

Dans ces conditions, "le respect du plafond devrait rester médiocre (...), chaque pays ayant intérêt à" maximiser ses revenus, tandis que l'explosion de l'offre pétrolière extérieure à l'Opep contrariera tout effort de sa part pour soutenir le marché, tempère Julian Jessop, de Capital Economics, tablant sur un baril à 85 dollars fin 2013.

Déjà, les Etats-Unis, le Canada et le Mexique pompent davantage de brut que l'Arabie saoudite, l'Irak et l'Iran réunis. Les Etats-Unis, portés par l'essor du schiste, pourraient même détrôner dès 2017 l'Arabie comme premier producteur de pétrole, estime l'AIE.

Néanmoins, "les Etats-Unis ne seront jamais une nouvelle Arabie saoudite" et cette dernière devrait continuer de jouer les "faiseurs de prix" sur le marché mondial, juge Michael Wittner de la Société Générale dans une note.

Soucieuse de la santé économique mondiale, "seule l'Arabie saoudite est prête à dépenser de larges sommes dans l'entretien de capacités de production non utilisées, qui lui permettent de grossir rapidement son offre en cas de demande accrue", ce que ne feraient jamais des compagnies américaines, explique-t-il.

"Et seule l'Arabie est désireuse de réduire sa production si nécessaire pour soutenir les cours mondiaux", ajoute-t-il. Précisément ce à quoi elle pourrait se résoudre en 2013.

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