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Jean-Yves Ferri et Didier Conrad : «On s'est beaucoup plus amusés sur cet Astérix»

Jean-Yves Ferri (à gauche) et Didier Conrad (à droite) perpétuent pour la troisième fois l'oeuvre de Goscinny et Uderzo avec «Astérix et la Transitalique». Jean-Yves Ferri (à gauche) et Didier Conrad (à droite) perpétuent pour la troisième fois l'oeuvre de Goscinny et Uderzo avec «Astérix et la Transitalique». [BERTRAND GUAY / AFP]

Les auteurs de bande dessinée Jean-Yves Ferri et Didier Conrad continuent leur bonhomme de chemin dans l'univers d'«Astérix» avec le 37è tome de la série phénomène, «Astérix et la Transitalique», en librairie jeudi 19 octobre 2017. 

Comment avez-vous vécu cette troisième collaboration après «Astérix chez les Pictes» et «Le Papyrus de César»?

Jean-Yves Ferri : Il y a un petit peu moins de pression parce que c’est le troisième album qu'on fait justement. A chaque fois, on relativise un peu plus même si «Astérix» reste un phénomène pour nous. Surtout du point de vue promotionnel qui est impressionnant.  

Didier Conrad : On connaît mieux l’univers, le style. Il y a eu deux albums qui ont été très bien reçus donc les éditeurs sont sereins par rapport à notre travail. Du coup, c’est beaucoup plus calme pour nous. On a vraiment pu se concentrer sur le côté créatif plutôt que d’essayer de répondre aux demandes, aux inquiétudes comme ça avait été un peu le cas au début. On s’est beaucoup plus amusés sur cet album-là. En tout cas pour moi. On se préoccupe des trucs importants pour que ce soit amusant à lire.

Certains puristes ont pu trouver à redire sur un excès de zèle sur les deux premiers opus que vous avez signés. 

J.-Y.F. : La reprise nécessitait d’être raccord avec l’œuvre précédente. Nous-mêmes avons été un peu timorés, un peu scolaires. Mais l’idée était de raccrocher les wagons tout simplement.

Quel est le cahier des charges pour mettre ses pas dans ceux d’Uderzo et de Goscinny ?

D.C. : Il y a vraiment beaucoup de choses. Vous avez un rituel à répéter sur l’ensemble. Généralement, les histoires commencent au village et s’y terminent. Il y a toujours une demi-page de banquet à la fin. Les caricatures, les jeux de mots, les pirates… On doit retrouver toutes ces choses-là et en plus ce doit être naturel. Le ton, l’univers en général doit être respecté. Ça fait long toute la liste des choses qu’on doit retrouver. Le truc, c’est d’arriver à faire que tout ça ait l’air naturel. Que ce soit léger, pétillant. Et ça, c’est compliqué. Mais je crois qu’on y est à peu près arrivés pour celui-là. En tout cas, on n’a pas senti ça comme quelque chose d’artificiel. Maintenant, si le lecteur ne le sent pas, c’est autre chose. Mais pour nous, ça s’est bien passé.

J.-Y.F. : Le cahier des charges n’est pas un cahier des charges. Parce que tous ces éléments, on les a intériorisés parce qu’on est nous-mêmes des lecteurs d’«Astérix» depuis des décennies. Donc, il ne s’agit pas de répondre à une sorte de bureau d’études de l’éditeur. On est nos premiers censeurs. Il n’y a pas d’intervention… On imagine souvent qu’on est ligotés. Ce n’est pas ça.

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© ASTÉRIX ® - OBÉLIX ® / © 2017 LES ÉDITIONS ALBERT RENÉ

Quel a été le déclic pour trouver le sujet de ce 37è album après la Guerre des Gaules dans «Le Papyrus de César»? 

J.-Y.F. : Justement, le précédent avait un thème un peu grave qui était le contrôle de l’information par César et les Romains. Donc cette fois-ci, l’idée était de partir dans une direction totalement différente. De jouer plutôt l’action, le « premier degré ». C’est-à-dire de créer quelque chose de beaucoup plus bâti sur le rythme et l’action. Cela nous a indiqué une sorte d’ambiance générale pour l’album. Est venue ensuite l’idée de l’Italie puisqu’il s’agissait d’un voyage. Puis, dans un deuxième temps, l’idée de la course, du rallye.

Quelles ont été vos inspirations?

D.C. : Je sais que Jean-Yves s’est référé à «L’Équipée du Cannonball», un film avec Dean Martin et Sammy Davis Jr.

Parlez-nous un peu du méchant de l'histoire : Coronavirus. 

J.-Y.F. : Pour le méchant, comme l’histoire était un rallye, j’ai repensé aux bandes dessinées traditionnelles de course automobile et à ce genre d’univers où il y avait toujours un méchant masqué. C’est un peu un classique. Ce champion de l'équipage romain, en personnage masqué, permet de jouer avec un faux suspense d’identité. Et puis un machiavélisme affiché. C’était rigolo.

De quelle manière Uderzo participe-t-il à l'élaboration de l'album? 

D.C. : Il observe de loin. Généralement, il lit le sujet de l’histoire que Ferri a imaginée et nous donne quelques réactions. En gros, cela équivaut à «continuez les petits gars, c’est bien»... Après ça, il lit les pages par paquets de dix pages. Et il dit si ça lui plaît ou pas. Jusqu’à présent, il a toujours dit que ça lui plaisait. Pour cet album, il nous a juste demandé de changer une chose sur le titre : de mettre un point sur le «i» de «Transitalique». C’est un peu lourd je trouve quand même... Il exagère ! (rires)

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© ASTÉRIX ® - OBÉLIX ® / © 2017 LES ÉDITIONS ALBERT RENÉ

L'album parle aussi des peuples des différentes régions d'Italie qui ne voient pas l'Empire romain d'un très bon oeil. On trouve ici une caisse de résonance avec l’actualité et le désir d’indépendance de la Catalogne. 

J.-Y.F. : Il s’avère que la Catalogne nous a rattrapé. La Catalogne donne un éclairage particulier qui n’était pas prémédité. La course dans l'album se prête aussi à une petite parabole et on pense aussi à la construction européenne. Est-ce qu'en Europe, on se tire dans les pattes ? Est-ce qu’on est solidaires ? En l’occurrence, Astérix le dit à un moment : «le véritable ennemi, c’est le champion romain». Il essaie de calmer l’agressivité de certains concurrents. Mais oui, c’est un peu la toile de fond, c’est vrai.

Comment fait-on rimer tradition et modernité sur une série comme «Astérix»?

D.C. : Depuis le départ, «Astérix» est une série qui transpose dans l’Antiquité la réalité quotidienne, l’univers contemporain dans lequel on vit. Donc, ça s’adapte bien. Quand il y a des changements dans notre société, on essaie toujours de trouver des équivalences avec l’Antiquité. C’est presqu’une recette qui peut se perpétuer. Il n’y a pas vraiment de limites. Ce n’est pas comme «Tintin» par exemple, qui est coincé dans les années 1950. J’imagine très mal Tintin avec un téléphone portable par exemple. Alors qu’avec Astérix, ça me poserait moins de problèmes. On avait trouvé une équivalence pour Internet avec les pigeons voyageurs dans l’album précédent et ça fonctionnait très bien. Là, dans cet album par exemple, il y a beaucoup de correspondances avec le sport et la publicité. Ça fonctionne très bien.

J.-Y.F. : Il y a le thème de la situation politique mais il y a aussi ce thème du sport spectacle et des rapports entre la politique et le sport. C’est aussi une dimension actuelle que l’on peut facilement plaquer sur «Astérix».

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© ASTERIX® OBELIX ® IDEFIX ® / © 2017 LES EDITIONS ALBERT RENE / GOSCINNY UDERZO

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