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Rentrée littéraire : nos 5 romans coups de coeur

Voici 5 ouvrages qui nous ont transportés. [©Adobe]

L'heure de la rentrée littéraire a sonné. Près de 500 nouveaux romans vont atterrir sur les étals des librairies jusqu'en octobre. Et il y a quelques pépites. Voici nos 5 coups de coeur.

«Acide», de Victor Dumiot

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©Bouquins

Ancien élève de l’École normale supérieure, Victor Dumiot signe «Acide», un premier roman coup de poing, et d’une rare intensité, qui ne peut pas laisser le lecteur indifférent. Dès les première pages, nos émotions sont mises à rudes épreuves. On suit l’histoire de Camille, une jeune femme coquette, qui vient de s’installer à Paris, et qui, un soir, sur le quai du RER, est défigurée à l’acide sulfurique par un inconnu. Et aucun détail ne nous est épargné.

«J'étais juste là, en train de me calciner, d'agoniser comme une idiote, tandis que tout – à commencer par mon visage – se dissolvait. Toute ma réalité, tout ce qui faisait ma vie, d'un coup englouti.». Son agresseur, qui a pris la fuite, lui a pris sa beauté et son âme, la condamnant à survivre et «à être une victime à perpétuité». Victor Dumiot met le lecteur dans une position de voyeurisme. C’est déstabilisant, presque malaisant, mais on ne lâche pas le roman pour autant. Alors que Camille entame sa reconstruction physique et psychologique, on fait la connaissance de Julien, énigmatique et solitaire.

L’homme vit reclus chez lui, et passe ses journées et ses nuits à consommer des vidéos gores et pornographiques sur le darknet. Jusqu’au jour où il tombe sur les images de l’agression de Camille. Cette vidéo le renverse complètement. Désormais, il n’a qu’une obsession : rencontrer la jeune femme. Mais dans quel but ? Avec une plume acérée et rigoureuse, l’auteur interroge la notion de monstruosité, d’identité. Il explore aussi le statut de victime et le rapport à soi. Un premier roman noir, qui peut déranger, heurter, mais qui mérite vraiment le coup d’œil.  

«Acide», de Victor Dumiot, éd. Bouquins.

«Chaleur humaine», de Serge Joncour

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©Albin Michel

Retour à la campagne. Après avoir remporté en 2020 le prix Femina du roman français avec «Nature Humaine», Serge Joncour est de retour avec une nouvelle fresque familiale intitulée «Chaleur humaine». L’écrivain raconte l’histoire d’une fratrie qui se retrouve aux Bertranges, une ferme du Lot, en plein Covid-19.

De janvier à mars 2020, les citadines Vanessa, photographe, Caroline, enseignante à Toulouse, et Agathe, qui a dû fermer son café, vont se réfugier chez leurs parents, et surtout, cohabiter avec leur frère Alexandre, agriculteur-éleveur, qui a repris la ferme familiale, et avec qui elles sont brouillées depuis des années. Ces personnages, les lecteurs de «Nature humaine» les connaissent déjà. Toutefois, inutile de l’avoir lu pour apprécier «Chaleur humaine».

Alors que le temps s’arrête et que la nature reprend ses droits, entre rivières et collines, au milieu des vaches, des chiots, et des éoliennes, le clan va vivre un intense huis clos. C’est l’heure de faire tomber les masques, de régler ses comptes, de resserrer ses liens, mais aussi de s’adapter au changement climatique. Serge Joncour invite le lecteur à cultiver le souvenir et lui offre une vraie bouffée d’air. Un livre tendre, plein d’amour et d’humour.

«Chaleur humaine», Serge Joncour, éd. Albin Michel.

«L'Enragé», de Sorj Chalandon

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©Grasset

Deux ans après «Enfant de salaud», dans lequel il lève le voile sur le sombre passé de son père, Sorj Chalandon, ancien grand reporter, publie «L'Enragé», inspiré de faits réels. Cette fois, le romancier et journaliste se glisse dans la peau d’un enfant battu, tyrannisé, et humilié, «un fauve né sans amour, obligé de desserrer les poings pour saisir les mains tendues».

Le 27 août 1934, une cinquantaine d’enfants de la colonie pénitentiaire pour mineurs de Belle-Île-en-Mer, pour la plupart orphelins, se sont révoltés et ont fait le mur. La chasse aux enfants se met alors en place, avec les gardiens de prison, les gendarmes, mais aussi les touristes, et les paysans. A la clé : 20 francs par enfant attrapé. Finalement, tous ont été capturés, sauf un, Jules Bonneau, surnommé «La Teigne», son «nom de guerre, gagné à force de dents brisées», que lui seul peut prononcer.

Sorj Chalandon raconte l’histoire de cet enfant qui manquait à l’appel, dans la France de l'entre-deux-guerres. Une fois commencé, difficile de lâcher ce livre à la fois très sombre et lumineux, où la violence et la colère côtoient l’humanité et la solidarité. C’est bouleversant, percutant et bien documenté. On rencontre aussi brièvement Jacques Prévert, à qui l’on doit le poème «Chasse à l'enfant», évoquant cette mutinerie : «Voleur ! Chenapan ! C'est la meute des honnêtes gens. Qui fait la chasse à l'enfant. Pour chasser l'enfant pas besoin de permis».

«L'Enragé», Sorj Chalandon, éd. Grasset.

«Perspective(s)», de Laurent Binet

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©Grasset

Autre pépite de cette rentrée littéraire : «Perspective(s)», de Laurent Binet. Agrégé de lettres et ancien prof de ZEP, l’écrivain nous plonge en plein cœur de la Renaissance italienne, dans le Florence du XVIe siècle. Et il y a tout ce qu’il faut pour tenir le lecteur en haleine : complots, jalousie, vengeance, jeux de pouvoir, enjeux artistiques…et une affaire de meurtre. Dans ce roman policier, historique et épistolaire, tout commence avec l’assassinat du peintre Pontormo, retrouvé mort au pied de sa fresque, à la basilique San Lorenzo, sur laquelle il travaillait depuis onze ans.

Son corps a été retrouvé «avec un ciseau fiché dans le cœur, juste en dessous du sternum». Le duc de Florence va alors confier l’enquête à Giorgio Vasari, son homme à tout faire. Ce polar, dans lequel tout le monde est suspect, - nobles, artisans, courtisans… - regroupe une vingtaine de correspondants et convoque toute une galerie de grands maîtres. Michel-Ange, Benvenuto Cellini, Agnolo Bronzino… On croise aussi Cosimo de Médicis, duc de Florence, Catherine de Medicis…

Mais on ne perd jamais le fil, tant l’intrigue est prenante et bien menée, jusqu'à la résolution, inattendue. En plus, pour se repérer, Laurent Binet, qui a reçu le prix Goncourt du premier roman avec «HHhH» (2010), a eu la bonne idée d’intégrer à son roman un plan manuscrit de la ville de Florence et une carte de la situation politique en Italie à cette époque.

«Perspective(s)», Laurent Binet, éd. Grasset.

«Les Alchimies», de Sarah Chiche

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©Seuil

Au plus près de la mort. Romancière et psychologue, Sarah Chiche est de retour avec un roman très différent des précédents. Après «Les Enténébrés» et «Saturne», elle publie «Les Alchimies», un roman qu’on peine à lâcher, tant l’histoire est prenante et son héroïne attachante. On fait la connaissance de Camille, 48 ans, une femme brillante, courageuse et divorcée. Elle travaille dans un hôpital public en tant que médecin légiste, ne compte pas ses heures, jusqu’au jour où cette mère célibataire reçoit un mail étrange.

Il est question du peintre espagnol Francisco de Goya et de son crâne volé après son inhumation à Bordeaux, en 1828. Intriguée, l'héroïne décide alors de partir à la rencontre de cette correspondante, Jeanne, une ancienne directrice de théâtre. C’est le début d’une quête effrénée. Camille part sur les traces de Goya, et en même temps, sur celles de ses origines et de son passé.

Car Jeanne a beaucoup à lui raconter, notamment sur ses parents et son parrain, qui durant leur jeunesse, étaient prêts à tout pour percer le secret de Goya. Ce roman d’aventure et d’enquête captive. Sarah Chiche nous emmène dans les couloirs des catacombes, nous parle des pouvoirs de l’art, de l'origine du génie et met en scène des personnages passionnés et animés par la quête de l'intelligence, avec lesquels on passe un très bon moment.

«Les Alchimies», Sarah Chiche, éd. du Seuil.

 

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