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Rentrée littéraire 2022 : nos 6 recommandations pour sortir des sentiers battus

Voici six conseils de lecture pour cette nouvelle rentrée littéraire 2022.[DR]

La rentrée littéraire 2022 touche à sa fin. Entre les grands noms de la littérature et les primo-romanciers, il n'est pas forcément évident de choisir son prochain livre de chevet. Pourtant, parmi les 490 titres publiés cette année, six pépites - plus discrètes - se sont glissées dans les rayons des librairies. Voici nos coups de coeur.

«Zizi Cabane», de Bérengère Cornut

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Bérengère Cornut a un univers bien à elle, où poésie et intimité s'entremêlent. Après «De pierre et d'Os» (prix Fnac) et «Elise sur les chemins», l'autrice happe une nouvelle fois le lecteur dans l'histoire, cette fois-ci d'une famille, celle de «Zizi Cabane», la plus jeune des trois enfants. Avec son père et ses deux frères, elle doit faire face à la disparition de sa maman Odile. Privés de cette présence maternelle, Béguin, Chiffon et Zizi Cabane devront trouver un nouvel équilibre, mais rien ne se passe comme prévu dans cette maison familiale quelque peu capricieuse. D'ailleurs, une source apparaît au sous-sol de celle-ci, voulant absolument rejoindre le ruisseau qui se trouve en bas du jardin. A côté de cet étrange phénomène, l'incursion de personnages détonnant réveillera la maisonnée, entre la tante Jeanne qui cherche à ramener un peu de raison là-dedans, et le «pépé tout neuf», Marcel Tremble, sorti de nulle part, qui aidera la famille à supporter avec tendresse et folie la disparition d'Odile.

Avec ce nouveau livre, Bérengère Cornut aborde une nouvelle fois le thème de la disparition, mais sans jamais plonger dans le pathos. Au contraire, c'est bien la vie que l'auteure met en avant dans «Zizi Cabane». Car malgré l'absence maternelle, mari et enfants vont s'aventurer sur de nouveaux chemins et se construire au-delà de ce traumatisme.

Pourquoi on aime ? «Zizi Cabane» est un de ces romans qu'on ne repose sur la table de chevet qu'une fois terminé. Entre le conte et la fable, ce texte est avant tout une métaphore de la mort et de la disparition, et ce qu'on laisse derrière nous. Onirique et poétique, ce roman polyphonique est d'une tendresse infinie. Vous serez amené à suivre tour-à-tour le parcours de chacun des membres de cette petite tribu, leurs doutes, leurs bonheurs, mais également la manière dont ils font face au deuil. 

Bérengère Cournut, «Zizi Cabane», éditions Le Tripode, 18 euros.

«Le colonel ne dort pas», d'Emilienne Malfatto

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Autre roman, autre style. Emilienne Malfatto, déjà lauréate du prix Goncourt du premier roman en 2021 avec «Que sur toi se lamente le Tigre», et du prix Albert Londres l'an dernier pour «Les serpents viendront à toi», revient avec un nouveau livre, «Le colonel ne dort pas», aux éditions du Sous-Sol. Ici, l'auteure française nous plonge dans le quotidien d'un colonel spécialiste de l'interrogatoire, dans un pays en guerre.

Ce texte court dépeint les tourments d'un bourreau qui ne dort plus, car ses victimes viennent à la nuit tombée prendre possession de ses rêves et le hanter. Et pourtant chaque matin, il se lève et accomplit de nouveau sa besogne dans cette ville qui ne dit pas son nom, mais où la guerre sévit dans une optique de «reconquête».

Pour cela, l'auteure, déjà habituée du genre, utilisera deux écritures distinctes. Le quotidien sanglant du narrateur est raconté en prose, d'une manière quasi journalistique, tandis que ses songes et sa mauvaise conscience sont transcrits en vers libres. Ce roman, bien que fictionnel, réveillera chez le lecteur un sentiment de déjà-vu, notamment avec l'actuelle guerre en Ukraine.

Pourquoi on aime ? Lorsque vous reposerez ce livre, vous resterez hanté très longtemps par ce texte d'Emilienne Malfatto. En peu de mots, l'auteure déjà primée transmet avec force la réalité de la guerre, et de ce qu'elle fait aux hommes. 

Emilienne Malfatto, «Le colonel ne dort pas», éditions du Sous-Sol, 16 euros.

«Les marins ne savent pas nager», de Dominique Scali

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Plongez avec délectation dans l'histoire de la si attachante Danaé Poussin avec ce roman de plus de 700 pages, «Les marins ne savent pas nager», de Dominique Scali, aux éditions La Peuplade. 

Danaé Berrubé-Portanguen, dite Poussin, est orpheline. Elle vit sur les rivages de l’île d’Ys, une sorte d'Atlantide bretonne. Cette île entre Saint-Jean-de-Terre-Neuve et Ouessant est un petit bout de terre insubmersible, assailli par les vagues et les tempêtes. Sur ce territoire hostile, les habitants ont pris l'habitude de se réfugier sur les hauteurs pour fuir les eaux envahissantes. Et seuls les plus vaillants d'entre eux ont le droit de séjourner derrière les murs de la cité, les autres devront faire face aux éléments. Quant à Poussine, elle possède un don rare, celui de savoir nager. Au fil de ce récit, elle tentera par dessus tout de changer les possibles afin de fuir la volonté des hommes.

Organisé en cinq parties, ce roman de la québécoise Dominique Scali alterne entre l’histoire de ses personnages, dont celle de l'attachante Danaé Poussin, et l’histoire d'Ys, une île bercée par le passé et les traditions, où la mer est à la fois essentielle et cruelle.

Pourquoi on aime ? C'est le roman d'aventures de cette nouvelle rentrée littéraire. Avec «Les marins ne savent pas nager», Dominique Scali nous offre une épopée maritime époustouflante, campée dans un XVIIIe siècle utopique. Un roman monde où vous plongerez avec délice.

Dominique Scali, «Les marins ne savent pas nager», éditions La Peuplade, 24 euros.

«L'île haute», de Valentine Goby

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Après la mer, direction la montagne cette fois-ci, avec le nouveau livre de Valentine Goby, «L'île haute», aux éditions Actes Sud. Le récit se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale. Asthmatique, le jeune Vadim Pavlevitch, un petit Parisien de 12 ans et de confession juive, n'a jamais vu les hauts sommets enneigés lorsqu'il est envoyé en 1943 dans la vallée des Ours, au pied du Mont-Blanc.

Pour l'aider à se refaire une santé, l'adolescent est accueilli par Blanche, une mère d'adoption, et Albert Dorselles. Dans ce contexte historique qu'est celui des rafles, de faux papiers lui seront délivrés : Vadim laisse place alors à Vincent Dorselles. Pendant la durée de son séjour, ce jeune garçon restera sans nouvelles de ses proches. Néanmoins, Vincent est ébloui par ce nouvel environnement, il est émerveillé par les neiges et l'immensité des paysages. Un nature qui l'aidera à faire fi de l'adversité et à s'inventer une nouvelle vie dans sa famille d'adoption.

Pourquoi on aime ? En pleine rentrée bien rythmée, ce roman de Valentine Goby est une pause. Une bouffée d'air frais. Les descriptions des paysages, de la flore et même de la faune sont d'une subtilité quasi extatique. Si vous êtes un amoureux des hauts sommets, ce livre est fait pour vous !

Valentine Goby, «L'île haute», éditions Actes Sud, 21,50 euros.

«Le dernier des siens», de Sibylle Grimbert

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Restons dans le grand froid avec le nouveau livre de Sybille Grimbert, «Le dernier des siens», aux éditions Anne Carrière. En 1835, Gus, un jeune scientifique, est envoyé par le musée d’histoire naturelle de Lille pour étudier la faune du nord de l’Europe. Lors d'une expédition maritime, il assiste au massacre des grands pingouins de l'île Eldey, au large de l'Islande (une scène particulièrement difficile à lire, attention à avoir le cœur bien accroché, ndlr).

Par miracle, l'un d'entre eux trouve refuge auprès de ce naturaliste qui décide de le capturer dans l'espoir de percer tous les secrets de cet oiseau. Néanmoins, la cohabitation entre Gus et Prosp n'est pas évidente, du moins les premiers jours. Mais ils s'apprivoiseront peu à peu et leur relation ira jusqu'à se transformer en réelle amitié, entre un homme et ce qui s'avère être le dernier grand pingouin.

Ce lien indéfectible entre ces deux êtres est puissant, mais également tragique, car ce récit de Sybille Grimbert met en lumière le sujet de l'extinction de masse, dont a été victime cette espèce. En effet, le Grand Pingouin a officiellement disparu en 1844, le dernier spécimen ayant été tué sur l'îlot d'Eldez, près de l'Islande. 

Pourquoi on aime ? Difficile de fermer les pages de ce très beau roman sans penser que l'on ne croisera jamais la route d'un Grand Pingouin, l'une des victimes de l'exploitation humaine au siècle dernier. Cette histoire ne vous laissera pas indifférent, surtout que le mot extinction de masse résonne encore aujourd'hui, notamment avec la récente publication de l'étude de WWF soulignant que 69% de la faune sauvage a disparu entre 1970 et 2018.

Sybille Grimbert, «Le dernier des siens», éditions Anne Carrière, 18,90 euros.

«Vivance», de David Lopez

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Dernier coup de cœur de notre sélection : «Vivance» de David Lopez. Comme le laisse entrevoir ce titre, ce roman est un hymne à la liberté. Déjà remarqué pour son premier roman «Fief» (Prix du livre France Inter en 2018), David Lopez fuit cette fois-ci la banlieue pour la campagne pour suivre un narrateur, qui ne sera jamais nommé, dans ses pérégrinations à vélo à la recherche de son vieux chat, Cassius, disparu à la suite d'une inondation.

Le narrateur enchaîne alors les kilomètres les uns après les autres, sans jamais savoir où il va. Mais au fil de ces excursions, il y aura des rencontres anodines, improbables, avec notamment le vagabond Noël, dont on ne comprend pas bien ce qu'il est et ce qu'il fait, ou cette serveuse à qui on n'a jamais dit qu'elle était belle, ou encore, ce couple de personnes âgées en manque de lien social.

Des rencontres non essentielles mais indispensables pour se sentir en vie dans ce monde. Cette vie sans but, du moins explicite, est celle de la liberté, de la «Vivance» pour David Lopez.

Pourquoi on aime ? Ce second roman de David Lopez sonne comme une suite de Fief. Alors que son premier livre était l'histoire d'un ancrage dans un territoire, «Vivance» est celui de la fuite et de la liberté. Introspectif, délicat, ce texte est une nouvelle fois la preuve que David Lopez maîtrise à la perfection la langue et les mots. Un roman idéal pour ceux qui ont besoin de se ressourcer. 

David Lopez, «Vivance», éditions Seuil, 19,50 euros.

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