Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour DirectMatin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.
DIMANCHE 29 SEPTEMBRE
Dimanche d’automne. Une sorte de moiteur s’est emparée des arbres et des herbes. D’autres couleurs vont bientôt apparaître. Combien de gens, partout, en France, en ce moment, vivent ce même tournant des saisons, quand on sent que la nature bascule, dans un concert d’odeurs et de sons ? Il fait doux lorsque j’entame mon habituel tour du village où je fais les courses.
Les commerçants affichent une forme de scepticisme tranquille :– Ça a marché, oui, mais un peu moins qu’avant. Voyez-vous, jusqu’ici, ça marchait bien, jusqu’à quelques jours avant la fin du mois. Maintenant, c’est dès le 15 que l’activité ralentit.
Un journaliste local m’interroge sur mes habitudes dans la bourgade normande. C’est simple : s’arrêter chez le fruitier, puis le fleuriste, puis le boucher, puis la maison de la presse. A chaque artisan, chaque conversation vous en apprend plus sur l’humeur d’un pays que la lecture des journaux ou le suivi des infos à la télé. Et puis, il y a la maison de la presse où j’aime interroger Ludovic et Régine sur les livres qui attirent l’attention. Bientôt, ce sera la rituelle course aux prix. Pour l’instant, malgré les arrivages continuels («On ne sait plus où mettre les nouveaux romans»), il y a les habituelles signatures : Nothomb, d’Ormesson – mais on voit apparaître Pierre Lemaitre (Au revoir là-haut), Jean-Philippe Toussaint (Nue), Karine Tuil (L’invention de nos vies), etc. A suivre.
LUNDI 30 SEPTEMBRE
Retour à Paris. En matière de livres, cette année, il y a les «petits» ou les «très gros». Ainsi, les 736 pages du Dictionnaire amoureux de Marcel Proust de Jean-Paul et Raphaël Enthoven (Plon-Grasset). Le centenaire de la publication de Du côté de chez Swann a fait rebondir la curiosité du grand public pour cet incomparable romancier, essayiste, philosophe. On trouve tout, chez Proust, et c’est le mérite des deux Enthoven de l’illustrer grâce à leur astucieux et brillant dictionnaire. Qu’un «pavé» comme celui-ci attire déjà nombre de lecteurs est la preuve – s’il en était besoin – que nous demeurons un pays «littéraire».
A propos de «gros livres», le Naissance de Yann Moix (paru il y a quelques semaines chez Grasset), fait, aussi, l’événement. Moix étonne, suscite controverse, admiration ou rejet – mais il marque la rentrée. Dans un talentueux site encres-vagabondes.com, je découvre la plume d’une certaine Christine Bini. Elle écrit : «1 150 pages. Les romans français contemporains, lisses et confortables, sont en général de petit calibre. Ce n’est pas au poids que l’on apprécie la qualité d’un livre, bien sûr, poids qui n’augure en rien d’un souffle. Mais tout de même, là, avec Naissance de Yann Moix, on sent qu’il se passe quelque chose. Que ça vibre, soudain. Que ça remue le cocotier éditorial.»
MARDI 1er OCTOBRE
Si je m’étends autant, cette semaine, sur l’automne et les livres, c’est que les gros titres de l’actualité récente en France m’ont lassé. On a tellement glosé sur les «couacs» (chiffres du chômage : vrais ou truqués ?), la cacophonie Valls–Duflot sur les Roms (le rappel d’Hollande aux «règles d’unité» suffira-t-il ?), la réforme des rythmes scolaires (échec ou pas ?), que le citoyen moyen cherche à respirer. Il attend un peu de romanesque.
MERCREDI 2 OCTOBRE
Et bien, justement, voici une information qui titille le romancier que je suis : l’ex-convoyeur de fonds, Toni Musulin, est sorti de prison. Ah ! Combien de gens vont vouloir suivre ses allées et venues ? Où sont passés les 2,5 millions jamais retrouvés ? Personnage intéressant, ce Musulin. Va-t-il partir à l’étranger ? Où est caché le blé ? Le feuilleton n’est peut-être pas terminé.
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