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Israel Galvan : "danser l'impossible", le génocide des gitans

Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013 [Pierre Verdy / AFP] Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013 [Pierre Verdy / AFP]

Le sévillan Israel Galvan danse du 12 au 20 février au Théâtre de la Ville à Paris "l'impossible à danser": le génocide tzigane par les nazis, avec son nouveau spectacle "Le Réel, Lo Real, The Real".

Oubliez le flamenco traditionnel, les froufrous et les "olé": le flamenco de Galvan est rude, sans concession.

C'est torse nu, où se dessinent les côtes, qu'il danse sur le plateau presque vide. Un piano désaccordé, dont sortiront plus tard les barbelés des camps de concentration, des rails grinçants: le décor est planté. Le spectateur retient son souffle: on souffre avec lui.

Lorsqu'une danseuse fait irruption, c'est en rom qu'elle est habillée, comme en signe de solidarité avec les persécutions d'aujourd'hui.

Silhouette longiligne vêtue d'un survêtement noir, c'est un h omme très doux, aux antipodes du danseur à vif, qui s'exprime en interview, attentif aux questions, hésitant à accrocher des mots sur les mouvements du corps.

Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013 [Pierre Verdy / AFP]
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Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013
 

Tombé tout petit dans le flamenco -ses parents sont danseurs et son père maître d'une école de flamenco à Séville- il trace vite son propre chemin, au risque de choquer les puristes.

"Ils ont leur place, c'est important de maintenir la tradition", dit-il, "mais le flamenco est en constante évolution et je me sens très libre".

Libre de choisir un thème brûlant comme le génocide des gitans, et d'y introduire "aussi de la joie", parce qu'il convient de célébrer leur survie aussi bien que leur souffrance.

Le génocide était présent dès son enfance, "on en parlait beaucoup à la maison pour des raisons religieuses", dit-il. Ses parents appartiennent aux Témoins de Jéhovah, persécutés et déportés par les nazis en raison de leurs liens internationaux et de leur opposition au pouvoir et à la guerre.

Sa mère est tzigane: le génocide fait doublement partie de l'histoire familiale. Mais Israel Galvan s'est aussi nourri de documentaires, de livres, de chansons ("Hitler in my heart" du groupe Antony and the Johnsons) pour sa création. Comme toujours, le spectacle répond à une "nécessité", dit-il.

Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013 [Pierre Verdy / AFP]
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Israel Galvan pose devant le Théâtre de la Ville à Paris le 11 février 2013
 

Avec une douzaine de créations en 15 ans, Israel Galvan s'est taillé la réputation d'un danseur profondément novateur dans le milieu très codé du flamenco. Salué à Paris et en Europe du Nord depuis longtemps, il a vu son travail reconnu pour la première fois en décembre par le Teatro Real de Madrid, qui a produit "Le Réel".

Ce "danseur des solitudes", selon le titre d'un livre que lui a consacré le philosophe et historien de l'art français Georges Didi Huberman (2006), s'est entouré pour la première fois pour "Le Réel" de deux danseuses virtuoses, Belén Maya et Isabel Bayon. Une dizaine de chanteurs et musiciens font plus qu'accompagner, véritable épine dorsale du spectacle.

Parmi ses projets, un duo avec le danseur britannique d'origine bangladaise Akram Khan, dont la danse s'inspire du kathak, un art traditionnel indien proche du flamenco.

Israel Galvan voudrait aussi "explorer sa part féminine". "Dans le flamenco, l'homme doit danser ++macho++ et la femme, de manière féminine" observe-t-il. Lui aimerait "changer un peu". "J'ai toujours dansé en homme, c'est un peu fatiguant", lance-t-il en souriant.

Une transgression fidèle à son parcours, mais qu'il explique sans agressivité. La violence, la mort, omniprésentes dans ses spectacles, il les garde pour la scène. A la ville, c'est un homme timide, qui parle de ses enfants, dont une petite fille, qui danse déjà "le ballet".

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