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Et si Napoléon avait gagné à Waterloo ?

Reconstitution en 2010 de la bataille de Waterloo perdue par Napoléon Bonaparte en 1815 [AFP/Archives]

Le 18 juin 1815, Napoléon a été battu à Waterloo et a perdu définitivement le pouvoir. Mais s'il avait gagné, aurait-il bâti un empire s'étendant jusqu'à la Chine ? La Seconde guerre mondiale aurait-elle eu lieu ? Ces questions fascinent de longue date les romanciers, mais aussi les historiens les plus sérieux.

 

S'il avait renversé les Anglais de Wellington et les Prussiens de Blücher sur la plaine de Waterloo, au sud de Bruxelles, l'empereur aurait sans doute repris sa marche jusqu'au nord de l'Allemagne, estime l'historien Helmut Stubbe da Luz, interrogé par l'AFP. "Brême, Hambourg et Lübeck seraient devenues françaises à nouveau", soutient l'historien de Hambourg, la puissante ville portuaire incorporée dans l'empire français fin 1810.

Le scénario est toutefois à prendre avec des réserves, reconnaît Helmut Stubbe da Luz. Car même si Napoléon avait battu la coalition le soir du 18 juin, les monarchies européennes ne se seraient sans doute pas avouées vaincues.

 

Un empire jusqu'en Chine

Waterloo "fut une victoire totale pour les Alliés, mais ça n'aurait pas été une victoire totale pour Napoléon", abonde l'historien belge Philippe Raxhon, spécialiste de la bataille de Waterloo.

Mais admettons que Bonaparte ait fini par vaincre ses ennemis directs. "Si Napoléon avait réalisé ses projets originaux de 1810, il aurait encore une fois envahi la Russie et potentiellement étendu son empire jusqu'aux frontières de la Chine", avance Helmut Stubbe da Luz.

Dès le XIXe siècle, un scénario encore plus radical a été imaginé par l'écrivain français Louis Geoffroy. Dans son roman "Napoléon et la conquête du monde, 1812-1832", il décrit comment Napoléon parvient, entre autres, à assujettir la Chine, ramenée au rang de simple "province de l'Asie".

Dans son roman uchronique -- genre littéraire qui imagine ce qu'il serait arrivé si un événement historique ne s'était pas passé comme le racontent les livres d'histoire -- écrit en 1836, Geoffroy remonte le temps jusqu'à trois années avant Waterloo. 

"J'ai écrit l'histoire de Napoléon depuis 1812 jusqu'en 1832, depuis Moscou en flammes jusqu'à sa monarchie universelle et sa mort. Vingt années d'une grandeur incessamment grandissante et qui l’éleva au faîte d'une toute-puissance au-dessus de laquelle il n'y plus que Dieu", écrit en introduction à son roman l'auteur, Louis-Napoléon Geoffroy-Château de son vrai nom.

Toute-puissance, vraiment? Pour M. Stubbe da Luz, "Napoléon était un dictateur, mais pas un dictateur réactionnaire comme le tsar de Russie". Un règne napoléonien sur l'Europe continentale, équilibré par la suprématie maritime anglaise, n'aurait pas forcément signifié un recul pour l'humanité, estime l'historien.

 

Une Allemagne moins forte 

"La dictature de développement que Napoléon a exportée aux pays sous sa domination a été une régression en comparaison aux progrès de la Révolution française, mais n'a pas été un mal pour les nouveaux sujets en Allemagne, en Hollande, en Italie et en Espagne", estime-t-il. Et de citer "l'égalité de droits pour les minorités religieuses et la population rurale, le droit de vote pour les hommes, un système juridique hors pair ou encore un espace économique étendu".

Avec beaucoup de prudence, l'historien va plus loin, imaginant une "Europe continentale dominée par la France" pendant tout le XIXe siècle. L'Allemagne ne serait pas devenue aussi forte. Et donc "l'Allemagne n'aurait probablement pas été en mesure de provoquer une Première et une Seconde guerre mondiale".

Imaginer une histoire parallèle est, pour les historiens, un exercice de haut vol. "Les causes des événements sont innombrables", rappelle Philippe Raxhon, de l'Université de Liège. Qui se limite à élaborer des scénarios en lien direct avec les projets des protagonistes. Par exemple, Wellington, battu à Waterloo, aurait sans doute repris la mer à Ostende pour rallier l'Angleterre, -- parce que Wellington avait lui-même "envisagé d'éventuellement perdre la bataille", juge-t-il.

Les romanciers, eux, n'ont pas ces contraintes. Dans son best-seller "Fatherland", paru en 1992, le Britannique Robert Harris imagine une Allemagne se préparant, en 1964, à une visite du "président américain Joseph Peter Kennedy" (le père de "JFK") à Adolf Hitler, vainqueur de la Seconde guerre mondiale. Une guerre, qui selon d'autres scénarios, n'aurait pas eu lieu si Napoléon avait gagné à Waterloo.

 

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