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Vallaud-Belkacem : "Le bac n’est pas moins difficile qu’avant"

La ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem. La ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem.[© Nicolo Revelli-Beaumont / SIPA pour Direct Matin]

Plus d’un demi-million d’élèves commencent à plancher mercredi pour le baccalauréat. Un moment clé pour eux, selon la ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem.

 

La préparation des élèves est beaucoup mise en avant. Mais n’est-ce pas aussi un grand jour pour l’Éducation ?    

Absolument. D’abord parce que le bac est loin d’être anodin dans notre système scolaire, c’est un moment important, décisif, attendu par les élèves et les familles, qui se prépare donc très en amont. Pour construire les sujets, les enseignants et inspecteurs ont travaillé durant des mois, avec une vigilance extrême et la volonté de faire en sorte que tous les élèves puissent être évalués justement. Et puis les jours d’épreuves, la mobilisation est intense, avec 170 000 examinateurs chargés de surveiller, puis de corriger.

 

Les épreuves vont cette année d’un mercredi à un mercredi (au lieu du lundi au vendredi) avec la Fête de la musique au milieu. Un possible problème pour les élèves ?

Cette semaine du mercredi au mercredi, avec six jours d’examens au lieu de cinq, va permettre une respiration le week-end, et une meilleure répartition des épreuves. Concernant la Fête de la musique, elle n’est pas seulement synonyme de concerts le soir. On peut aussi en profiter durant la journée pour s’aérer l’esprit, ce qui n’est jamais mauvais à la veille d’un examen.

Mais si j’avais un enfant en âge d’être candidat, je lui dirai que l’on ne passe pas son bac tous les deux mois, et qu’il faut lui accorder toute son attention, et éviter de se coucher tard.

 

Les potentielles fraudes sont une autre préoccupation. Le ministère est-il au point sur ce sujet ?

On ne peut jamais parler de risque zéro. Mais au fil des ans, nous avons optimisé nos moyens de détection. Nous avons repéré 515 fraudes en 2014 car nous les identifions de mieux en mieux. Avec les détecteurs de téléphones portables dans les salles d’examen, nous nous sommes adaptés aux nouvelles technologies.

Nous centralisons aussi les alertes, pour intervenir plus rapidement. Et les consignes sont systématiquement rappelées au début des épreuves, affichées à l’entrée des salles.

 

L’idée est donc de bien faire comprendre aux possibles fraudeurs les risques encourus...

Blâme, privation de mention, interdiction de passer un examen durant cinq ans... Quand on sait ce que coûte la fraude, il faut y réfléchir à deux fois. Un élève qui triche pour avoir le bac non seulement se met en infraction, mais s’empêche en réalité d’aller plus loin.

 

Quel message adressez-vous aux élèves qui pourraient tricher ?

J’imagine qu’un élève qui songe à frauder est un élève qui ne se sent pas prêt. Mon message est donc le suivant : il vaut mieux passer les oraux de rattrapage ou recommencer l’année suivante. Il faut prendre au sérieux sa scolarité et les épreuves qui vont avec. Le bac n’est pas là pour sanctionner mais pour attester qu’on est prêt ou pas à passer à la suite. Ce n’est jamais se rendre service que de fausser les résultats.

 

Le taux de réussite à l’examen a atteint l’an dernier 88 %. Avec un tel score, est-il encore utile ?

L’objectif fixé dans les années 1980, d’arriver à un taux de 80% de réussite, était une démarche ambitieuse. L’avoir atteint est une bonne chose, parce que je n’ai pas le moindre doute sur le fait qu’individuellement et collectivement, pour un pays, l’élévation du niveau de qualification ne peut être que vertueuse. C’est d’ailleurs pour cela que notre objectif est désormais d’atteindre 50% d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur.

Et puis, l’augmentation du nombre de bacheliers s’explique aussi par la montée en puissance du bac professionnel. Dire qu’il est moins difficile à obtenir qu’avant est faux. Il y a des aptitudes que l’on évalue désormais qui ne l’étaient pas avant. Je pense aux compétences expérimentales dans le cadre des sciences, à l’évaluation des langues vivantes à l’oral. Réjouissons-nous de savoir qu’une part importante de nos jeunes se met en condition de pouvoir s’insérer dans la vie active.

 

Un système est par ailleurs mis en place par le ministère pour motiver les élèves...

Il faut que les candidats le sachent : les 10 % de meilleurs bacheliers de chaque lycée de France ont désormais la possibilité d’être accueillis dans des filières sélectives, comme les classes préparatoires, les grandes écoles de commerce ou d’ingénieur, les STS et les IUT pour la filière professionnelle.

La composition sociale de ces filières est très homogène, et chez les enfants de classe sociale modeste, on observe une sorte d’autocensure : ils ne pensent même pas à s’inscrire dans ces filières sélectives. Désormais, ceux qui auront obtenu les meilleurs résultats au bac savent que des places leur sont réservées dans ces filières. Ils seront contactés après les résultats pour leur proposer de les intégrer. C’est un puissant levier d’émulation et de diversification.

 

Certains réclament une simplification du bac, avec moins d’épreuves. Y êtes-vous favorable ?

Une réforme du bac n’est pas à l’ordre du jour. Quand on voit que dans le bac la possibilité est offerte aux candidats de passer 22 langues vivantes étrangères, qui vont jusqu’au cambodgien ou au danois, cela montre la force de notre système scolaire. Faut-il réduire le nombre d’épreuves ? Je ne le crois pas. Notre défi est de nous inscrire dans le monde de demain, quand nos jeunes entreront sur le marché du travail. Un monde complexe, dans lequel il faut avoir de nombreuses compétences. Évaluer ces compétences, c’est les faire prendre au sérieux par les jeunes. 

 

Sur un plan personnel, quels souvenirs gardez-vous de votre bac ?

Un souvenir de compétition avec ma sœur ainée, bachelière un an plus tôt. C’était un vrai moteur pour moi. Le sentiment aussi d’être un peu livrée à moi-même lors des révisions, de ne pas avoir su exactement quoi faire ni où. Cela fait partie des choses que le système scolaire sous-estime parfois.

J’étais la semaine dernière au lycée Romain Rolland de Goussainville (Val d’Oise) qui fait un travail remarquable à ce sujet. Au lieu de laisser les élèves seuls chez eux à réviser, il organise des séances de préparation collective et des bacs blancs répétés. Et ça se ressent dans les excellents résultats de ses élèves.

 

Autre dossier que vous portez, la réforme du collège. Est-elle en bonne voie ?

La réforme est adoptée et s’appliquera à la rentrée 2016. Pour autant, je considère que le travail est devant nous, à savoir préparer les enseignants et les établissements pour qu’ils soient dans les meilleures conditions possibles en septembre 2016.

Les débats auxquels nous avons assisté étaient très éloignés de la réalité des défis de cette réforme, car l’essentiel consiste en un changement dans les pratiques pédagogiques, et ce changement nécessite une véritable formation. Ce travail doit pouvoir être fait sereinement, c’est tout ce que je demande.

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