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Emmanuel Macron, un ministre décomplexé

Emmanuel Macron. Emmanuel Macron. [FRED DUFOUR / AFP]

Arrivé au ministère de l’Economie il y a moins de deux mois, Emmanuel Macron s’applique à faire prendre un virage libéral à la gauche.

 

Il n’en est pas à son premier coup d’essai. Pour un peu, il aurait l’habitude de ce genre de polémiques. En déclarant, mardi 14 octobre, que les plus modestes voyagent en autocar plutôt qu’en train, Emmanuel Macron s’est attiré les foudres de son aile gauche et de l’opposition, promptes à crier au flagrant mépris.

Il y a un mois, sa sortie sur les salariées "illettrées" des abattoirs Gad avait déclenché un tollé.

La semaine dernière, il réclamait dans Le JDD une réforme de l’assurance chômage, dossier pourtant clos quelques jours plus tôt par François Hollande, et hérissait au passage les plus à gauche. "Je n’ai dit que la vérité", s’était défendu le patron de Bercy.

Dire la vérité, sans langue de bois, voilà la marque de fabrique de ce ministre qui se targue de vouloir faire bouger les lignes. Non sans susciter des remous.

 

La gauche du "bon sens" 

Au-delà de son franc-parler assumé, Emmanuel Macron tente de donner corps au tournant social-libéral, amorcé par François Hollande il y a bientôt un an avec le pacte de responsabilité, dont le patron de Bercy est un farouche partisan.

Dernier exemple en date : la présentation, cette semaine, de la loi pour "libérer l’activité". Avec cette nouvelle mouture de la loi de croissance de son prédécesseur, Arnaud Montebourg, le ministre veut "agir sur tous les leviers pour lever les blocages" d’une France sclérosée par la "défiance", la "complexité" et les "corporatismes". Extension du travail le dimanche, réforme des professions réglementées, simplifications dans le bâtiment, l’objectif du ministre est clair : moderniser avant tout.

Sa jeunesse presque insolente (36 ans) et son parcours politique atypique en bandoulière (il ne s’est jamais présenté à une élection), Macron exige donc un débat sans "tabou" ni "posture", sur l’indemnisation des demandeurs d’emploi comme sur la durée du temps de travail.

A la veille de sa nomination à Bercy, il s’était en effet prononcé pour étendre à toutes les entreprises le droit de "déroger" aux 35 heures. Et à ceux qui lui reprochaient d’être vendu à la cause du patronat, l’ancien banquier d’affaires avait répondu, dans sa toute première interview, accordée à Ouest France, qu’il n’était "pas interdit d’être de gauche et de bon sens".

 

Une personnalité clivante

Si elle se veut moderne, la méthode Macron est loin de faire l’unanimité. Sa nomination, au moment où les "frondeurs" du PS réclamaient moins d’austérité, avait été vécue comme un affront par ces derniers. Laurent Baumel, pro­che d’Arnaud Montebourg, avait dénoncé une "provocation dérisoire". "Avec Macron, mon ministre, c’est la finance", avait ironisé Pierre Laurent, secrétaire du Parti communiste.

Un peu plus d’un mois et demi après son arrivée à Bercy, le flot des mécontents est loin de se tarir. Sa sortie sur l’assurance chômage lui a valu immédiatement un ­recadrage par le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis. Ses collègues au gouvernement, Marisol Touraine et Ségolène Royal en tête, avaient dû calmer le jeu et en appeler à prendre "le temps de la réflexion".

Du côté des syndicats, la pilule a encore plus de mal à passer. "Tout ce qu’il nous dit, ce sont des réformes proposées par la droite il y a plus de trente ans", s’est insurgé, jeudi 16 octobre le leader de la CGT, Thierry Lepaon.

Si Emmanuel Macron a séduit la presse anglo-saxonne, le New York Times ayant vu en lui le "nouveau visage du socialisme français", il faudra du temps pour faire accepter ses idées en France. 
 

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