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Du Front national au Front local ?

Marine Le Pen, président du Front national. [Kenzo Tribouillard / AFP]

Le FN est sorti de ce premier tour des municipales avec une implantation élargie, voire "lissée" sur le territoire, même si le haut niveau d'abstention et les scores impressionnants à Hénin-Beaumont et dans certaines autres villes créent quelques trompe-l'oeil.

 

50,3% à Hénin-Beaumont, 44,9% à Béziers, 42,6% à Saint-Gilles, 40,3% à Fréjus. Dans plusieurs villes, le FN a obtenu des scores inédits..

"Il apparaît un front local, relais sur nos territoires du Front national", s'est félicitée mardi Marine Le Pen lors d'une conférence de presse.

"Là où elles étaient présentes, nos listes ont obtenu 16,5% en moyenne. Nous participons à 328 seconds tours dont 229 dans des communes de plus de 10.000 habitants. Nous sommes en tête dans 21 villes, en deuxième dans 136 autres", a-t-elle énuméré.

"Le vote local pour le FN-Rassemblement Bleu marine rattrape son niveau national", s'est-elle aussi réjouie. Ce qui se confirme statistiquement: alors que le FN reculait souvent lors de scrutins locaux par rapport aux scrutins nationaux, les candidats FN ont fait en moyenne 14,9% dans les 409 villes de plus de 10.000 habitants où ils étaient présents, contre 15,7% pour Marine Le Pen dans ces mêmes villes au premier tour de la présidentielle de 2012, selon des résultats compilés par Libération.

Mais ce progrès généralisé ne doit pas masquer la persistance de disparités d'implantation.

Pour Marine Le Pen, il y a "un lissage de la carte électorale, avec une capacité à homogénéiser nos scores. Nous avons de bons scores là où nous étions traditionnellement faibles".

Ce n'est que partiellement le cas, car sur les 328 seconds tours revendiqués par le FN, pratiquement la moitié se retrouve dans quatre régions: Provence-Alpes-Côte-d'Azur (66), Languedoc (37), Nord-Pas-de-Calais (34) et Île-de-France (25).

- Toujours plus difficile à l'Ouest -

Le "Front local" existe, mais il est encore... local: témoin d'une bonne implantation dans certaines zones, dans les 15 villes où le FN est en tête et a obtenu ses scores les plus hauts, les candidats FN ont obtenu en moyenne 11% de voix supplémentaires par rapport à Marine Le Pen à la présidentielle, selon un calcul de l'AFP, alors que la participation au niveau national était pourtant en baisse.

A l'inverse, dans les 15 principales villes de l'Ouest où le FN est au second tour --un succès en soi pour le parti d'extrême droite--, les candidats FN obtiennent en moyenne 29% de voix de moins: le taux de conversion de votes Marine Le Pen en votes pour des candidats "Bleu Marine" peut largement progresser.

Le "retour du FN dans les villes" revendiqué rend sceptique Joël Gombin, doctorant spécialiste de la carte électorale FN : "Quand la taille de la commune augmente, le score du FN diminue. Au-delà de 10.000 habitants, ça décline assez nettement".

Les bons scores apparents du FN s'expliquent aussi d'après lui par la "participation différentielle", c'est-à-dire la mobilisation comparée de chaque électorat, qui peut "tordre la perception" : à Marseille, ce n'est pas tant un succès de Stéphane Ravier, qui a perdu environ un quart de voix par rapport à Marine Le Pen en 2012, qui l'a mené à la deuxième place, mais un échec de Patrick Mennucci à mobiliser les électeurs socialistes.

Carte de France localisant le vote FN au 1er tour des élections municipales  [L. Saubadu/P. Defosseux / AFP]
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Carte de France localisant le vote FN au 1er tour des élections municipales
 

Dernier élément essentiel: la fin de la bipolarisation proclamée par Marine Le Pen n'est que partiellement vraie.

Le FN peut certes, dans quelques dizaines de villes tout au plus, contester la victoire à la gauche ou à la droite, et s'imposer en troisième force.

Mais Joël Gombin note que "plus le vote de droite est élevé, plus le vote FN est bas". Cela signifie que le FN est dans une "concurrence électorale" avec la droite, lui prenant "une partie de son électorat, même s'il est aussi en capacité de mobiliser un électorat que l'UMP ne mobiliserait pas", notamment chez les abstentionnistes.

S'il y a quelques progrès dans des zones traditionnellement marquées à gauche, il n'y a "en revanche pas de concurrence électorale avec elle, car le score de la gauche est exactement le même avec ou sans le FN", analyse-t-il. Autrement dit, la bipolarisation existe toujours: elle oppose un bloc de gauche à un bloc de droite, comprenant l'UMP et le FN.

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