En direct
A suivre

Trémolet / Stainville : "La Manif pour Tous est comparable à SOS-Racisme"

Vincent Trémolet de Villers (g) et Raphaël Stainville, ont enquêté sur la "Manif pour Tous".[Patrick Lafrate]

Avec « Et la France se réveilla » (éditions du Toucan), Vincent Trémolet de Villers et Raphaël Stainville retracent en 20 dates clé l’histoire de la « Manif pour tous » (première partie).

Depuis les soubresauts de l’automne 2012 jusqu’aux manifestations monstres du printemps 2013, la « Manif pour Tous » a polarisé l’actualité politique française. Cette opposition massive à la loi Taubira, ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, s’est soldée par un échec. Pourtant, estiment les deux journalistes, rien ne sera comme avant.

 

 

Malgré la mobilisation des opposants, le « mariage pour tous » a finalement été promulgué le 18 mai dernier. Peut-on néanmoins parler de « défaite fondatrice » ?

VTV : Qu’il s’agisse d’une défaite, c’est certain. Mais ce qui nous a frappés en mettant ce mouvement en perspective, c’est l’apparition d’un puissant courant souterrain derrière cette défaite apparente. Les sources de ce mouvement sont antérieures à la mobilisation : plusieurs signaux étaient nettement apparus pendant la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2012 et même avant. C’est pourquoi, nous parlons d’une « révolution des valeurs ». Le peuple de droite a retrouvé des valeurs fondatrices qui avaient été délaissées au profit de la seule économie et d'une seule ambition : la baisse de la dette et des impôts.

 

S’agit-il, quarante-cinq ans après, du retour de balancier de mai 68 ?

RS : Nous avons assisté à un réveil politique profond qui s’est effectivement traduit par un rejet de l’ « héritage impossible » de mai 1968 », pour reprendre le titre de l’essai de Jean-Pierre Le Goff. Les foules ont signifié quels aspects de la vie sociale elles voulaient voir échapper à la marchandisation : la vie, les relations humaines, les enfants et le domaine de la personne. Elles ont dit leur ras-le-bol du triomphe consumériste. Paradoxe apparent, le peuple de droite s’est élevé contre une loi qu’il considère comme ultra-libérale, incarnée par une figure emblématique de la gauche : Pierre Bergé.

 

Votre titre évoque le réveil de « la » France. Le débat sur le mariage gay n’a-t-il pas au contraire entériné l’existence de deux France opposées de manière irréductibles ?

VTV : Disons que la LMPT consacre le réveil de la « France des invisibles ». Ces Français qui n’appartiennent pas à des mouvements politiques ou à des syndicats, qui n’ont pas accès aux médias. Tout au long de ce débat, la jeunesse et la ferveur étaient clairement du côté des opposants à la loi Taubira. Il existait sans doute des énergies comparables dans l’autre camp, mais on ne les a guère vues. En témoigne par exemple l’échec du « concert pour tous » organisé le 21 mai pour fêter la promulgation de la loi, et dont Mika était pourtant la tête d’affiche.  La jeunesse a changé de camp.

 

Peut-on comparer la « Manif pour Tous » à des mobilisations passées ou à des exemples étrangers ?

RS : Certains ont dit qu’il s’agissait d’un « mai 68 inversé », mais la comparaison ne tient pas la route : zéro voiture brisée, zéro vitrine cassée, zéros grilles arrachée. Idem pour les comparaisons faîte par Manuel Valls avec les ligues des années 30. On a parlé aussi de Solidarnosc mais François Hollande n’est pas Jaruzelski ! La Manif pour Tous est paradoxalement comparable à SOS-Racisme dans les années 80. Comme la LMPT, il s’agissait d’un mouvement très jeune, pacifique, trans-courants et même festif. Les militants de SOS-Racisme descendaient dans la rue pour leurs « potes » et pas pour eux. De même, les militants de la LMPT manifestent pour la famille et la filiation, et pas pour préserver des acquis sociaux ou obtenir de nouveaux droits (...)

 

Lire la deuxième partie

Lire la troisième partie

 

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités