En direct
A suivre

Batho, limogée, fait les frais de la rigueur budgétaire

La ministre de l'Ecologie limogée, Delphine Batho, à l'Assemblée à Paris le 2 juillet 2013 [Jacques Demarthon / AFP] La ministre de l'Ecologie limogée, Delphine Batho, à l'Assemblée à Paris le 2 juillet 2013 [Jacques Demarthon / AFP]

François Hollande a mis fin mardi aux fonctions de la ministre PS de l’Écologie Delphine Batho, qui contestait les coupes prévues par le budget 2014 pour son ministère, congédiant pour la première fois un membre du gouvernement pour manque de solidarité.

Le communiqué de l'Elysée est tombé à peine une petite heure après l'explication qu'avait eue, en milieu d'après-midi, la ministre avec Jean-Marc Ayrault à l'Hôtel de Matignon, où elle avait été convoquée.

"Sur proposition du Premier ministre, le président de la République a mis fin aux fonctions de Mme Delphine Batho et a nommé M. Philippe Martin, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie", stipule-t-il.

Comme ils avaient annoncé de façon inédite la convocation de Mme Batho par M. Ayrault avec un simple tweet, Matignon a ensuite utilisé un tweet pour entériner le limogeage de la ministre.

Le député du Gers, Philippe Martin, à l'Assemblée à Paris le 23 octobre 2012 [Jacques Demarthon / AFP/Archives]
Photo
ci-dessus
Le député du Gers, Philippe Martin, à l'Assemblée à Paris le 23 octobre 2012
 

Mis à part le cas de la démission de l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac en mars, c'est la première fois sous le quinquennat Hollande qu'un membre du gouvernement est démissionné pour avoir tenu des propos critiques vis-à-vis du gouvernement.

"C'est un mauvais budget", avait lâché Mme Batho mardi matin sur RTL, quelques heures avant le début du débat d'orientation budgétaire au Palais Bourbon. Le budget 2014 fait du ministère de l’Écologie l'un des plus sévèrement touchés par les économies prévues avec une baisse de 7% des crédits.

Aucun autre ministre n'a été rappelé à l'ordre publiquement par M. Ayrault. Pas même ceux qui avaient, à demi-mots, réclamé un changement d'orientation de la politique suivie, comme Arnaud Montebourg (Redressement productif), Benoît Hamon (Économie solidaire) ou l'écologiste Cécile Duflot (Logement). Vincent Peillon (Éducation) ou Nicole Bricq (Commerce extérieur) ont eu également des paroles jugées trop intempestives par Matignon sans que rien ne se passe, du moins publiquement.

Selon le porte-parole d'une ONG qui ne souhaitait pas être cité, M. Ayrault était furieux parce que Mme Batho n'avait jamais exprimé de désaccord lors des arbitrages.

Le député PS du Gers Philippe Martin est photographié le 22 octobre 2007 à Auch [Eric Cabanis / AFP/Archives]
Photo
ci-dessus
Le député PS du Gers Philippe Martin est photographié le 22 octobre 2007 à Auch
 

"L'écologie, ça ne se résume pas au ministère de l'Écologie. On ne peut pas tout ramener au budget. Chacun a des efforts à faire. Elle aussi", avait commenté un membre du gouvernement dans la journée.

De source gouvernementale, on estimait, avant son limogeage, que Mme Batho "n'avait pas maîtrisé le curseur, le rapport de force", risquait "de se retrouver bien seule" et même de "se lancer dans une traversée du désert qui ne se terminera jamais".

 

"Personne n'est protégé"

 

Début mai, François Hollande avait souligné dans un entretien accordé à Paris Match que "personne n'(était) protégé dans le gouvernement".

M. Martin, qui aura 60 ans en novembre, est député PS du Gers, membre de la commission du Développement durable et de l'Aménagement du territoire à l'Assemblée. Peu avant sa nomination, il était encore dans la salle des "quatre colonnes", selon des journalistes de l'AFP.

Sa nomination en remplacement de Mme Batho fait que le gouvernement n'est désormais plus paritaire: il compte 19 hommes et 18 femmes. Il ne l'était déjà plus avec le départ de M. Cahuzac, mais en sens inverse (19 femmes et 18 hommes).

Avant la convocation de la ministre, à Matignon, on affirmait qu'en prenant tout en compte, "les moyens consacrés à l'action écologique sont en augmentation". Mme Batho "a réagi à l'effet d'affichage", ajoutait-on, tout en assurant que "la transition énergétique rest(ait) une priorité".

Avant qu'il ne soit mis fin à ses fonctions, les Verts avaient apporté leur soutien à la ministre et prévenu le gouvernement qu'ils entendaient bien voir se concrétiser la fiscalité écologique dans le budget 2014. Cécile Duflot, ministre EELV du Logement, a tenu à souligner que la transition écologique était un "cap politique à réaffirmer très fortement".

Jean-Vincent Placé, chef du groupe écologiste au Sénat, a estimé que son parti n'était "pas loin de la sortie" du gouvernement, tandis que le député écologiste Noël Mamère faisait valoir que son mouvement "n'avait pas vocation à jouer les idiots utiles de la majorité".

Dans l'après-midi, le chef de file des députés UMP Christian Jacob s'était étonné que Mme Batho "soit encore au gouvernement", tandis que le porte-parole des députés UDI Jean-Christophe Lagarde avait jugé qu'il serait "légitime" qu'elle soit "démissionnée dans la journée".

 
 

Compte tenu de l'ampleur des économies à faire, le dossier est explosif politiquement pour l'exécutif au point que M. Hollande surveille l'élaboration du projet de loi de finances 2014 comme le lait sur le feu. Lundi soir, il a présidé à l’Élysée, selon une source gouvernementale, une réunion qui y était consacrée.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités