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Les propositions décapantes du rapport Moreau

Le Premier ministre Jean-marc Ayrault et Yannick Moreau (c), présidente de la commission à l'origine d'un rapport sur les retraites présenté le 14 juin 2013 Le Premier ministre Jean-marc Ayrault et Yannick Moreau (c), présidente de la commission à l'origine d'un rapport sur les retraites présenté le 14 juin 2013 [Bertrand Guay / AFP]

Le rapport Moreau sur les retraites, remis vendredi à Matignon et qui doit inspirer la réforme prévue "à la fin de l'été", propose de prolonger la durée de cotisation jusqu'à 44 ans, de mettre à contribution les retraités, les entreprises et ouvre le dossier politiquement explosif des pensions des fonctionnaires.

Très attendu, ce rapport va servir de base à un projet de loi qui sera proposé "avant la fin de l'été", a annoncé le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Il a promis que les "efforts à faire" pour assurer la pérennité du système par répartition ne seraient pas "écrasants", mais "guidés par la continuité et la justice".

La me se fera dans un esprit de "justice et d'efficacité", a renchéri le président François Hollande.

La concertation s'engagera à la conférence sociale des 20 et 21 juin.

Le déficit de l'ensemble des régimes de retraite a été estimé par le Conseil d'orientation des retraites (Cor), en l'absence de mesures, à 20 milliards d'euros en 2020, dont 5 milliards pour le régime général (3,5 milliards actuellement).

Mais, tenant compte de la poursuite de la crise, la Commission d'experts présidée par la haut-fonctionnaire Yannick Moreau a réévalué à 7 milliards ce déficit prévisionnel du régime général des retraites (70% des salariés).

L'effort porte donc sur 7 milliards d'économies qu'il faut trouver, étant entendu que les régimes complémentaires Agirc-Arrco vont continuer de prendre leurs mesures propres et que l'Etat va continuer à renflouer les régimes des fonctionnaires et des entreprises publiques, a expliqué Mme Moreau aux journalistes.

Pour tous les salariés, privé et public, la Commission suggère "une accélération des durées d'assurance" pour obtenir une retraite à taux plein.

Epargner les petites retraites

Alors que les salariés nés en 1955 et 1956 doivent cotiser 41,5 ans, le rapport suggère de faire cotiser 43 ans ceux nés à partir de 1962 et 44 ans ceux nés à partir de 1966. Si l'on avait simplement suivi le rythme d'allongement de la réforme Fillon de 2003, les 44 ans n'auraient concerné que la génération 1989.

En revanche, la Commission juge "peu opportun" de reculer encore les bornes d'âge, déplacées en 2010, de 60 à 62 ans pour l'âge légal de départ et de 65 à 67 ans pour le taux plein même si la durée de cotisation n'est pas atteinte. Cet allongement est réclamé, notamment, par la droite et le Medef, et des think tanks.

Manifestation de retraités le 16 octobre 2008 à Lille [Philippe Huguen / AFP/Archives]
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Manifestation de retraités le 16 octobre 2008 à Lille
 

Le rapport propose aussi d'agir sur le niveau des pensions actuelles et à venir.

Pour les retraités, la Commission prévoit "une sous-indexation exceptionnelle à titre transitoire" des pensions, à l'image de ce qui a été fait pour les retraites complémentaires mais recommande d'épargner les petites retraites.

Elle innove aussi en proposant de modifier "l'indexation des salaires portés au compte" pour les futures pensions: il s'agirait de diminuer légèrement le montant des salaires des actifs qui compteront pour la retraite, d'un montant de 1,2 point, pendant les années 2014 à 2016.

Elle plaide aussi pour un comité de pilotage dès 2015 pour tenir compte de la situation économique et démographique.

Pour les actuels retraités, qui sont imposables, les experts suggèrent d'aligner le taux de CSG sur celui des actifs, en le faisant passer de 6,6% à 7,5%, de baisser l'abattement fiscal de 10% dont ils bénéficient comme les actifs au titre des frais professionnels en le portant à 7, 5 ou 3%.

Avenir "plus dégagé" à partir de 2035

Pour les majorations de pensions (10%) accordées aux ménages ayant élevé trois enfants ou plus, il est suggéré de les fiscaliser.

Les entreprises sont également sollicitées via une hausse de 0,1 point par an pendant 4 ans et à parts égales des cotisations retraite des employeurs et des salariés pour les salaires au-dessus du plafond de la Sécurité sociale (un peu plus de 3.000 euros nets).

Sur les fonctionnaires, le rapport suggère de faire calculer leurs pensions non plus sur les salaires des six derniers mois mais sur une période allant de 3 à 10 ans, avec une intégration partielle des primes. Mais il prend soin de souligner que globalement les différences ne sont pas si grandes entre le public et le privé.

La Commission s'est peu attardée sur les régimes spéciaux (SNCF, EDF, RATP etc). Mais Mme Moreau a souligné qu'un nouvel allongement de la durée de cotisation rendrait leur âge de départ légaux de plus en plus "théoriques" si ces salariés veulent une retraite pleine.

Les syndicats les plus virulents, comme la CGT ou FO, ont déjà prévenu qu'ils allaient mobiliser leurs troupes.

Source de satisfaction: le rapport souligne que si les 25 années à venir s'annoncent difficiles, en raison du départ à la retraite des générations du baby-boom, l'avenir sera "plus dégagé" pour les jeunes générations.

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