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Frédéric Lefebvre veut créer un "Meetic pour l'emploi"

Portrait Frédéric Lefebvre Frédéric Lefebvre en septembre 2011[KENZO TRIBOUILLARD / AFP]

Secrétaire d'État chargé du Commerce, de l'Artisanat, des PME, du Tourisme, des Services, des Professions libérales et de la Consommation, Frédéric Lefebvre défend les vertus du travail. Il s'en explique dans un essai qu'il a choisi, à dessein, de publier pendant la campagne*. Il répond aux questions de DirectMatin.fr.

 
La question du travail est-elle absente de la campagne ?
 
C'est la question essentielle de l'élection présidentielle et surtout des politiques des dix prochaines années. La valeur « travail » n'est pas une valeur du passé. Elle a été portée par des figures, comme Jean Jaurès, que la gauche elle-même a trahies. C'est une valeur qui émancipe et qui libère. Le travail est porteur de justice alors que la vision à courte vue du travail que porte la gauche, et notamment François Hollande et avant lui Martine Aubry, c'est qu'il faut se libérer du travail.
 
Le travail, une valeur de droite ?
 
La gauche pense que le travail est une aliénation. C'est une forme de mythe que l'on retrouve dans chacune des grandes politiques qui ont plombé la France : les 35 heures ou la retraite à 60 ans. Les gens se sont retrouvés avec plus de loisirs sans avoir les moyens d'en profiter. C'est vrai pour les cadres, quant aux ouvriers ils ont été les premières victimes d'une stagnation des salaires pendant cette période, alors même que le pays était en croissance.
 
Vous restez fidèle au « travailler plus » ?
 
L'un des axes de mon livre, c'est d'essayer d'inciter les gens à travailler plus. Parce que travailler plus c'est ce qui permet de créer plus de richesses. Et donc de donner une meilleure qualité de vie à la collectivité toute entière. Quand François Hollande dit : « Je veux supprimer les exonérations de charges sur les heures supplémentaires », je suis extrêmement choqué. Cette mesure est plébiscitée par tous. Par les patrons qui ont ainsi pu honorer leur carnet de commande. Et par les ouvriers et salariés qui sont neuf millions à profiter de ce système. C'est un dispositif vertueux que François Hollande veut supprimer. Je crois au « travailler plus » pour ceux qui veulent travailler plus.
 
Vous préconisez aussi le « travailler mieux »...
 
Dans « travailler mieux » il y a beaucoup de choses.  Je propose par exemple la création d'un dividende du travail. Aujourd'hui un chef d'entreprise qui veut distribuer des primes à ses salariés parce que son entreprise fait des bénéfices, ne le peut pas : son expert-comptable lui dit non. Car au bout de trois ans, cette prime se transforme en salaire. Et cela « plombe » l'entreprise en cas de retournement de conjoncture. Je propose donc la création d'un dividende, qui pourrait être redistribué sous beaucoup de formes - intéressements, participations, formation... -  mais qui serait évidemment lié à la conjoncture, exactement comme pour les actionnaires.
 
On découvre en vous un partisan inattendu de la cogestion, voire de l'autogestion.
 
Je suis un grand admirateur des SCOP (sociétés coopératives ouvrières de production, NDLR). Je crois beaucoup à l'implication des salariés dans l'entreprise. Il faut donner des moyens à la société de les impliquer plus. Ce ne sont  pas les patrons qui ne veulent pas les impliquer, mais c'est le système qui est beaucoup trop rigide.
 
Quelles pistes préconisez-vous pour améliorer la situation de l'emploi en France ?
 
Il y a un vrai problème d'orientation : il faut valoriser les filières des métiers en tension et sauver nos savoir-faire, quand mondialisation rime avec standardisation. Quand vous êtes le fils de Frédéric Lefebvre, vous n'avez aucun mal à trouver un stage en adéquation avec vos passions. Mais la plupart des jeunes prennent le stage qu'ils trouvent. Et parfois ils n'en trouvent pas. Moi je propose de créer des bourses de stages avec les chambres consulaires, de métiers, de commerce et d'industrie. Je veux que les jeunes puissent se découvrir une passion. 
 
Vous voulez aussi créer un « Meetic pour l'emploi »...
 
Je veux mettre autour de la table les acteurs économiques qui ont réussi à créer des outils de rencontre amoureuse entre les citoyens pour essayer de créer un concept identique autour du travail. Je défends d'autres idées de ce type. Pour la transmission d'entreprises artisanales, je voudrais ainsi que l'on s'inspire du speed dating. Parce que vous avez d'un côté de nombreux jeunes motivés qui sortent des écoles d'apprentissage et de l'autre des gens qui voient disparaître leur entreprise artisanale. Mais ils ne se parlent pas, alors qu'ils sont parfois à 50 mètres les uns des autres.
 
Les relations entre Nicolas Sarkozy et les syndicats se sont raidies lors des dernières semaines de la campagne. Qu'en pensez-vous ?
 
La société française crève d'avoir des syndicats conservateurs qui fonctionnent différemment de tous les syndicats du monde. Au lieu de défendre les salariés ou leurs adhérents, ils défendent trop souvent des dogmatismes. Pour une raison très simple, c'est qu'ils n'ont pas ou peu d'adhérents. Il faut sortir de ce blocage organisé par des structures qui captent la parole des salariés, en décalage avec ces salariés eux-mêmes. Il faut que l'on rentre dans une logique nouvelle. Tant qu'il n'y aura pas des syndicats qui défendent réellement  les salariés, il faudra - par la voie du référendum - donner la parole aux citoyens eux-mêmes.
 
*Frédéric Lefebvre, Le travail aujourd'hui, Le Cherche-Midi, coll. « Documents », 136 p., 5 euros.
 

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