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La femme de Raef Badaoui reçoit le prix Sakharov en son nom

Raef Badaoui tient un portrait de son époux Ensaf Haidar, blogueur saoudien emprisonné, lors de la remise du prix Sakharov à son mari, le 16 décembre 2015 [PATRICK HERTZOG / AFP] Raef Badaoui tient un portrait de son époux Ensaf Haidar, blogueur saoudien emprisonné, lors de la remise du prix Sakharov à son mari, le 16 décembre 2015 [PATRICK HERTZOG / AFP]

L'épouse du blogueur saoudien Raef Badaoui, détenu pour «insulte» envers l'islam, l'a qualifié de «voix libre dans le pays de la pensée unique» mercredi à Strasbourg, en recevant en son nom le prix Sakharov du Parlement européen.

Très applaudie, par des députés debout, Ensaf Haidar a souligné que son mari n'était «pas un criminel, pas un violeur», mais une voix libre dans le pays de la pensée unique, alors qu'elle-même est réfugiée au Canada.

Avant la remise du prix, le président du Parlement européen Martin Schulz a demandé «à nouveau au roi Salmane de gracier Raef Badaoui et de le libérer sans aucune condition et immédiatement».

"J'aurais aimé que mon mari reçoive ce prix lui-même" a dit Ensaf Haidar, alors que le prix était déposé sur une chaise vide.

«Dans nos pays, une pensée libre et éclairée est considérée comme du blasphème, c'est l'idéologie de certaines sociétés arabes», a-t-elle regretté, appelant les Etats arabes à s'ouvrir à la pensée de l'autre. Selon elle, «la société (saoudienne, ndlr) vit sous le joug d'un régime théocratique, qui ne demande aux gens que d'être des béni-oui-oui.» Ensaf Haidar a également dit craindre «un exode des cerveaux arabes qui iront chercher un air plus frais ailleurs».

Emprisonné depuis 2012

Le prix Sakharov a été décerné le 29 octobre à Raef Badaoui, emprisonné depuis 2012 dans son pays. Le blogueur avait été condamné fin 2014 à dix ans de prison et à 50 coups de fouet par semaine pendant 20 semaines.

La justice saoudienne, qui a ordonné la fermeture de son site internet, lui reproche d'y avoir publié des écrits critiquant la police religieuse de son pays et d'y avoir appelé à la fin de l'influence de la religion sur la vie publique dans ce royaume ultra-conservateur.

Il avait reçu ses 50 premiers coups de fouets en janvier mais cette punition a été suspendue depuis après une vague de protestations internationales.

L'inaction de l'UE dénoncée

«Le prix du Parlement européen met en lumière l'inaction de l'Union européenne face aux violations des droits de l'Homme de l'Arabie saoudite», a réagi mercredi l'ONG de défense des droits de l'Homme Amnesty International. «La démarche du Parlement européen contraste puissamment avec le silence assourdissant de la diplomatie européenne, qui à ce jour n'a pas seulement échoué à répondre aux violations des droits de l'Homme de l'Arabie saoudite mais encore n'a pas appelé à la libération immédiate et sans condition de Raef Badaoui», a jugé l'ONG dans un communiqué.

Dans l'hémicycle, le président du Parlement européen a assuré qu'«aucun commerce pétrolier ou des armes ne va nous empêcher de lutter pour les droits de l'homme».

Martin Schulz a également rappelé le cas du jeune Saoudien Ali Mohammed al-Nimr, condamné à mort pour avoir participé à des manifestations du Printemps arabe en 2012, lorsqu'il n'avait que 17 ans. «Ce ne sont que quelques-uns des nombreux cas de violations des droits humains», a rappelé Martin Schulz, exhortant l'Arabie saoudite à «arrêter cette répression systématique».

Pour son prix Sakharov 2015, le Parlement européen a préféré Raef Badaoui à deux autres nominés : une coalition d'opposants politiques au Venezuela et l'opposant russe assassiné Boris Nemtsov. Doté de 50.000 euros, ce prix prestigieux récompense des personnalités ou collectifs qui se sont illustrés dans la défense des droits de l'Homme.

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