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Irak : Obama pourrait poursuivre les frappes aériennes

Le président américain Barack Obama (image d'illustration) [Mandel Ngan / AFP] Le président américain Barack Obama (image d'illustration) [Mandel Ngan / AFP]

Après s'être retirés d'Irak en 2011, les Etats-Unis ont pris la décision vendredi de bombarder des positions de jihadistes qui menacent le Kurdistan irakien et des milliers de chrétiens et Yazidis. Dans la nuit de vendredi à samedi, l'armée américaine a fait parachuter des vivres et de l'eau à destination des civils. Barack Obama se dit désormais "prêt à poursuivre les frappes aériennes si nécessaire".

 

Selon le porte-parole du Pentagone, deux chasseurs bombardiers ont frappé vendredi vers 13h45 (10h45 GMT) une pièce d'artillerie mobile de l'Etat islamique (EI) qui avait visé des forces kurdes à Erbil. Quelques heures plus tard, d'autres raids ont visé "des terroristes" puis un convoi et un mortier près d'Erbil.

Le département d'Etat a assuré que la décision prise par Barack Obama - un vigoureux opposant à l'invasion de l'Irak en 2003 - était juridiquement inattaquable car les frappes sont menées à la demande du Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki.

"Le gouvernement irakien et des responsables irakiens de tous les horizons, de tous les partis et de toutes les confessions nous ont demandé cet appui. C'est le principe qui est appliqué dans ce cas-là", a déclaré Marie Harf, porte-parole du département d'Etat.

La Maison blanche a précisé qu'aucune date de fin n'avait été fixée pour cette opération, mais a répété que les Etats-Unis excluaient d'envoyer des troupes au sol et de s'engager dans "un conflit militaire prolongé".

Le chef de l'armée irakienne, Babaker Zebari, a estimé que cet appui aérien allait permettre d'obtenir rapidement "d'énormes changements" sur le terrain.

"Les officiers de l'armée irakienne, les peshmergas (kurdes) et des experts américains travaillent ensemble pour déterminer les cibles", a-t-il expliqué, évoquant également des frappes américaines dans la région de Sinjar, à l'ouest de Mossoul et des opérations prévues dans "des villes irakiennes contrôlées par l'EI".

L'ONU cherche de son côté à établir un "corridor humanitaire" dans le nord de l'Irak pour permettre d'évacuer les civils menacés.

Les peshmerga kurdes irakiens à 40 km à l'ouest d'Erbil, capitale de la région autonome kurde au nord de l'Irak se battent contre les forces de l'Etat Islamique bombardées par les Etats-Unis le 8 août 2014  [Safin Hamed / AFP]
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Les peshmerga kurdes irakiens à 40 km à l'ouest d'Erbil, capitale de la région autonome kurde au nord de l'Irak se battent contre les forces de l'Etat Islamique bombardées par les Etats-Unis le 8 août 2014

La France s'est dite "prête à prendre toute sa part" dans l'aide aux populations civiles victimes des "exactions intolérables" de l'EI, tandis que le Royaume-Uni a annoncé des parachutages de vivres dans les prochaines 48 heures.

Les combattants de l'EI avaient encore marqué des points jeudi avec la prise de Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne d'Irak, suivie de celle du barrage de Mossoul, le plus grand du pays, qui contrôle l'alimentation en eau et en électricité de toute la région.

Depuis dimanche, des dizaines de milliers de personnes ont fui face à l'avancée des jihadistes, qui ne sont désormais qu'à une quarantaine de km d'Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan, allié de Washington.

Après la prise de Qaraqosh et d'autres zones autour de Mossoul, le patriarche chaldéen Louis Sako a fait état de 100.000 chrétiens jetés sur les routes. Dimanche, la prise de Sinjar, bastion de la minorité kurdophone yazidie, avait déjà poussé à la fuite jusqu'à 200.000 civils selon l'ONU.

 

"Génocide"

Certains ont pu fuir au Kurdistan ou en Turquie, mais des milliers d'autres sont piégés dans les montagnes désertiques environnantes, où ils risquent autant de mourir de faim et de soif que de se faire massacrer par les jihadistes.

L'offensive de l'EI contre les Yazidis et les chrétiens "montre tous les signaux d'un génocide", a déclaré vendredi le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, en visite à Kaboul.

Evoquant "une crise humanitaire qui prend aux tripes" et le risque de nouvelles violences meurtrières, le diplomate a expliqué que les Etats-Unis avaient "pris la décision qu'il fallait sauver ces vies".

Jeudi soir, M. Obama avait déjà évoqué un risque de génocide en autorisant des frappes militaires ciblées "pour protéger les civils pris au piège" ainsi que les personnels américains à Erbil et à Bagdad.

Des kurdes irakiens sur la route entre Kirkouk et Abril, se sont enfuis de la région de Bartala, après les affrontements entre Peshmergas et jihadistes, le 8 août 2014 [Marwan Ibrahim / AFP]
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Des kurdes irakiens sur la route entre Kirkouk et Abril, se sont enfuis de la région de Bartala, après les affrontements entre Peshmergas et jihadistes, le 8 août 2014

Le président américain avait pourtant été élu sur la promesse d'un désengagement militaire et avait été l'instigateur du retrait américain d'Irak.

Dans la nuit, l'aviation américaine a commencé par parachuter des vivres et de l'eau à destination des civils piégés dans les montagnes de Sinjar.

Elle a poursuivi cette opération dans la nuit de vendredi à samedi en larguant à nouveau des vivres et de l'eau depuis trois avions cargo escortés par deux chasseurs F/A-18, a annoncé le Pentagone.

Un habitant réfugié dans la montagne avec sa famille, joint par téléphone, a déclaré que rien n'était parvenu dans sa zone, où eau et vivres manquent cruellement. "Il y a beaucoup d'enfants ici", a-t-il lancé.

 

Kurdistan menacé

A Bagdad, l'intervention américaine a suscité un peu de scepticisme, dans la mesure où Nouri al-Maliki, le Premier ministre irakien, réclamait ces frappes depuis le début en juin de l'offensive de l'EI, qui était déjà bien implanté en Syrie et contrôle désormais de vastes pans du territoire irakien.

M. Obama "n'a rien fait pendant trois ans mais quelque chose arrive aux Kurdes et aux chrétiens et il commence à parler de terrorisme", a dénoncé Rashaad Khodhr Abbas, fonctionnaire à la retraite.

Le puissant dirigeant chiite Moqtada al-Sadr a d'ailleurs affirmé vendredi que l'EI était sur le point d'attaquer la capitale, tout en promettant de mobiliser ses hommes pour défendre Bagdad.

Un chasseur bombardier américain F/A-18C est guidé le 8 août 2014 pour prendre son envol à partir du pont du porte-avions H.W. Bush, stationné dans le Golfe [Lorelei Vander Griend / Us Navy/AFP]
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Un chasseur bombardier américain F/A-18C est guidé le 8 août 2014 pour prendre son envol à partir du pont du porte-avions H.W. Bush, stationné dans le Golfe

Les insurgés sunnites sont à quelques dizaines de km de Bagdad mais, selon des experts, ils manquent de combattants pour mener un assaut de cette envergure.

Au Kurdistan, l'arrivée massive de réfugiés augmente la pression sur cette région déjà à court d'argent en raison d'un conflit avec Bagdad sur le partage des revenus pétroliers, et l'inquiétude monte face à la progression de l'EI.

Depuis le début de l'offensive, les combats avec les jihadistes ont coûté la vie à 150 pershmergas et 500 autres ont été blessés, selon le secrétaire général de la présidence kurde.

La Maison Blanche a annoncé vendredi que M. Obama allait partir en vacances samedi comme prévu pour deux semaines sur la petite île huppée de Martha's Vineyard (Massachussetts, nord-est). Il rentrera pour deux jours à Washington en milieu de séjour.

 

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