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Brésil: Rousseff doit éviter de prendre des buts en économie

La présidente brésilienne Dilma Roussef avec le président de la FIFA Joseph Blatter durant la présentation du trophée du Mondial, à Brasilia, le 2 juin 2014  [Jose Cruz / Agencia Brasil/AFP/Archives] La présidente brésilienne Dilma Roussef avec le président de la FIFA Joseph Blatter durant la présentation du trophée du Mondial, à Brasilia, le 2 juin 2014 [Jose Cruz / Agencia Brasil/AFP/Archives]

L'humiliante élimination du Brésil par l’Allemagne au Mondial ne sera pas déterminante pour la course à la réélection en octobre de Dilma Rousseff, qui a plus à craindre d'une économie dégradée et du mécontentement social, selon des analystes.

"L'impact de la Coupe sur l'élection est réduit. Dans le passé récent il y a des exemples d'équipes du Brésil qui ont bien joué et de présidents qui ont perdu les élections, et vice versa. Le plus grand risque était l'organisation, qui a bien fonctionné", estime Joao Augusto de Castro Neves, directeur de l'Amérique latine pour Eurasia Group.

"La Coupe est la Coupe. En août, le climat sera différent. Maintenant c'est l'heure de la souffrance mais en août on aura tourné la page. En tant que gouvernement nous devons montrer clairement que l'infrastructure a parfaitement fonctionné. Les élections sont une autre histoire", a affirmé le ministre chef de la présidence Gilberto Carvalho.

- Organisation réussie -

Malgré les craintes initiales sur les retards des stades, le fonctionnement des aéroports, le climat social ou la sécurité, le Mondial brésilien a finalement été une réussite en termes d'organisation. Il s'est déroulé dans une ambiance de fête.

La présidente qui avait promis au Brésil "la Coupe des coupes" a surfé sur ce succès, martelant à l'envie qu'il clouait le bec des "pessimistes".

Elle a gagné 4 points pendant le Mondial et part, avec 38% des inventions de vote, grande favorite de la présidentielle du 5 octobre, face au sénateur social-démocrate Aecio Neves (20%) et le socialiste Eduardo Campos (9%).

Certes, au lendemain de la pire déroute de la Seleçao en un siècle de football, la gueule de bois mêlée de colère et de honte des Brésiliens est immense.

"Je pense que cette défaite a affecté profondément l'état d'esprit du Brésilien. Le football est très important au Brésil et une défaite de cette envergure, la plus grande d'un pays qui a été cinq fois champion du monde, ne peut qu'affecter profondément l'esprit de la nation", déclare à l'AFP le sociologue Luiz Antonio Machado de l’Université de l’Etat de Rio (UERJ).

Mais si le football est presque une religion au Brésil, pour la population, le portefeuille compte plus que le foot au moment d'aller voter.

"Le plus grand risque pour Rousseff continue d'être l'économie et non la Coupe", souligne M. Castro Neves.

- Insatisfaction -

Passée l'euphorie des années Lula, l'économie du géant émergent d'Amérique latine tourne au ralenti pour la quatrième année consécutive. Cette année la croissance sera d'à peine 1%, selon la Banque centrale.

L'inflation a dépassé en juin le plafond de tolérance fixé par le gouvernement (6,50%) à 6,52% sur les 12 derniers mois. Et ce en partie à cause du Mondial qui a tiré à la hausse les prix dans l'hôtellerie, la restauration et l'aviation commerciale.

"Il existe un certain degré d'insatisfaction sur la situation actuelle du pays qui joue contre le gouvernement: taux de croissance faible, criminalité en col blanc de personnes importantes", analyse M. Machado.

De nombreux supporteurs ont insulté la présidente mardi au stade Mineirao de Belo Horizonte, comme lors du match inaugural du 12 juin à Sao Paulo. Et on peut s'attendre à de nouvelles insultes et huées dimanche au Maracana lorsqu'elle remettra le trophée au vainqueur.

Mais une étude a montré que les spectateurs brésiliens dans les stades étaient majoritairement des blancs aisés, de toute façon hostiles au gouvernement.

Sur le front social, "cette défaite marquante peut relancer les critiques, changer l'humeur. Les gens recommenceront à se demander si cela a valu la peine d'investir tant d'argent dans une Coupe alors que le pays n'avait pas une bonne équipe, une équipe qui a été humiliée", déclare Humberto Dantas, professeur de l'Institut de recherche et éducation (Insper).

Mais il estime toutefois peu probable une reprise des manifestations massives de juin 2013. "Beaucoup de manifestants étaient étudiants et nous sommes en vacances scolaires. La violence de la police et de certains manifestants a fait fuir la plupart", explique-t-il.

"Les manifestations se sont radicalisées depuis juin 2013 et ont perdu en intensité mais le malaise continue. Elles peuvent reprendre mais ce ne sera pas à cause de la défaite du Brésil", ajoute-t-il.

Avant l'élimination du Brésil, les manifestations anti-Mondial de l'ultra-gauche et des anarchistes brésiliens ont rassemblé en moyenne à peine 200 personnes depuis le début du Mondial.

Une manifestation est convoquée sur les réseaux sociaux pour dimanche près du Maracana, sous le slogan: "Il n'y aura pas de finale". Un premier test après le désastre.

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