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Dictature argentine: les meurtriers d'un évêque condamnés, des archives du Vatican versées au dossier

Des panneaux portant les noms de victimes de la dictature 1976-1983 en Argentine, le 20 mai 2013 à l'entrée du cimetière de Mercedes, dans la province de Buenos Aires, où le dictateur  General Jorge Rafael Videla (1976-81) était né  [Daniel Garcia / AFP/Archives] Des panneaux portant les noms de victimes de la dictature 1976-1983 en Argentine, le 20 mai 2013 à l'entrée du cimetière de Mercedes, dans la province de Buenos Aires, où le dictateur General Jorge Rafael Videla (1976-81) était né [Daniel Garcia / AFP/Archives]

Des militaires ont été condamnés vendredi pour l'assassinat d'un évêque en 1976 pendant la dictature en Argentine, un procès au cours duquel le pape François a fourni des archives venant du Vatican, une première.

Mgr Enrique Angelelli avait dénoncé avant sa mort les assassinats et la répression d'opposants au régime militaire dans des lettres adressées au Saint-Siège.

Jugé coupable d'avoir ordonné la mort de l'évêque, le général Luciano Menendez a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité par le tribunal de La Rioja.

"C'est un jour historique", a salué l'avocat de la partie civile Guillermo Diaz Martinez.

L'évêque de La Rioja, province du nord-est de l'Argentine, a été tué le 4 août 1976. Il venait d'assister à un hommage à deux prêtres assassinés, le Français Gabriel Longueville et Carlos Murias qui travaillaient dans des quartiers pauvres du diocèse. A l'époque, les autorités avaient annoncé que l'évêque était mort dans un accident de la route mais la population de La Rioja était persuadée qu'il s'agissait d'un attentat.

Dans une des lettres, Angelelli dénonce "les obstacles permanents pour empêcher (les religieux) de remplir la mission de l'Eglise (...). Les religieuses, les prêtres, moi-même sommes humiliés, interpellés, perquisitionnés par la police sur ordre de l'armée".

L'évêque rebelle n'hésitait pas à s'opposer à la junte au pouvoir alors que la répression était féroce.

Environ 30.000 opposants sont morts ou ont disparu pendant la dictature en Argentine. Des centaines de militaires ont été jugés et emprisonnés. Le plus célèbre d'entre eux, l'ex-président de l'Argentine Jorge Videla est mort dans sa cellule.

Outre le général Menendez, un autre haut gradé de l'armée, Luis Estrella a été condamné à la perpétuité.

"Certains mots du pape font étonnamment écho aux lettres d'Angelelli. C’est par exemple le cas lorsque le pape écrit qu'il nous faut avoir une oreille collée à l’Évangile, et une autre à la vie du peuple", remarque dans un entretien à La Croix Mgr François d’Alteroche, qui a passé 50 ans en Amérique latine et a bien connu l'évêque de La Rioja.

"Une anecdote me paraît caractéristique de ce qu’il était, ajoute-t-il. C’était quelque temps avant sa mort. À l’époque, il y avait beaucoup d’arrestations de prêtres de La Rioja, car c’était pour le pouvoir une manière de faire taire leur évêque. (...) Un jour, alors qu’il devait célébrer la messe à la cathédrale avec d’autres prêtres, nous avons déposé nos aubes et sommes allés au tribunal pour proposer de partager la vie des chrétiens emprisonnés. C’était un signal fort envoyé au pouvoir".

Une centaine de religieux ont disparu ou ont été assassinés durant la dictature, dont deux Françaises et l'évêque Carlos Ponce de Leon.

En revanche, la hiérarchie catholique est accusée d'avoir maintenu un silence complice et les organisations de défense des droits de l'Homme réclament l'ouverture des archives du Vatican.

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