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Corruption: 20 ans après Mani Pulite, l'Italie encore en proie à ses démons

Le maire de Venise Giorgio Orsoni, le 15 février 2014, à Tocane-Saint-Apre, en France [Mehdi Fedouach / AFP/Archives] Le maire de Venise Giorgio Orsoni, le 15 février 2014, à Tocane-Saint-Apre, en France [Mehdi Fedouach / AFP/Archives]

Du gigantesque chantier "Moïse" de Venise à l'exposition universelle de Milan en 2015 et l'arrestation d'un colonel de la police financière, les révélations sur des affaires de corruption se multiplient et secouent l'Italie depuis un mois.

La constitution d'une caisse noire autour des travaux de construction du "Moïse", un système de digues mobiles devant protéger Venise des inondations, a entraîné vendredi la démission du maire de gauche de la cité des Doges, Giorgio Orsoni.

Un colonel corrompu de la police financière a été écroué mercredi par ses collègues tandis qu'un mois plus tôt, c'étaient plusieurs personnalités politiques, aussi bien de gauche que de droite, dont un ex-sénateur de l'ancien parti de Silvio Berlusconi (le Peuple de la liberté), qui étaient arrêtées pour corruption dans le cadre du chantier de l'Expo-2015.

La multiplication de ces interpellations n'est pas sans rappeler le début des années 1990 marqué par l'opération "Mani Pulite"(Mains Propres).

Un système de corruption et de financement illicite des partis politiques, surnommé "Tangentopoli", avait alors été découvert et démantelé entre 1992 et 1994 par la justice italienne, révolutionnant le paysage politique du pays.

Pourtant au fil des ans, corruption, trafic d'influence et blanchiment d'argent n'ont pas cessé de faire la une de l'actualité dans la Botte.

De nombreuses malversations autour des appels d'offres liés à de grands événements, comme le sommet du G8 organisé en 2009, les Championnats du monde de natation organisés à Rome la même année ou les célébrations du 150e anniversaire de l'unité italienne en 2011, ont ainsi été révélées.

Le Premier ministre italien Matteo Renzi à Hanoi le 9 juin 2014 [Hoang Dinh Nam / AFP/Archives]
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Le Premier ministre italien Matteo Renzi à Hanoi le 9 juin 2014

Dans son rapport annuel, véritable baromètre de la corruption dans le monde, l'ONG Transparency International a classé en 2013 l'Italie en 26e position, à égalité avec la Roumanie, sur les 28 Etats membres qui composent l'Union Européenne, laissant derrière elle les seules Bulgarie et Grèce.

"Bien que le classement ne soit pas flatteur, il faut y voir plus une tendance", explique à l'AFP Michelangelo Anderlini, 47 ans, vice-président de Transparency Italia et entrepreneur dans le nord de l'Italie, avant de poursuivre: "selon moi, ces récentes révélations de scandales sont positives car elles traduisent une volonté réelle de changement".

- "Retour vers des valeurs morales" -

Malgré ce statut de mauvais élève, l'Italie a connu une légère progression, entre 2012 et 2013, passant à l'échelle planétaire de la 72e à la 69e place.

"La crise économique permet un retour vers des valeurs morales jusqu'ici délaissées, rendant encore plus insupportables les affaires de corruption aux yeux des citoyens", estime M. Anderlini.

Selon lui, l'impact de la corruption est "important" mais l'économie italienne "souffre davantage d'un manque à gagner potentiel du fait de l'image déplorable de l'Italie à l'étranger qui freine les investisseurs.

En marge de son déplacement à New York mercredi, le ministre italien de l'Economie, Pier Carlo Padoan, se voulait déjà rassurant: "Le gouvernement de Matteo Renzi travaille sur plusieurs fronts, dont celui de la corruption qu'il affronte avec efficacité et détermination".

Le ministre italien de l'Economie, Pier Carlo Padoan, à Rome le 3 juin 2014 [Alberto Pizzoli / AFP/Archives]
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Le ministre italien de l'Economie, Pier Carlo Padoan, à Rome le 3 juin 2014

M. Renzi a d'ailleurs annoncé vendredi soir la création d'une sorte de "super-autorité" pour la lutte contre la corruption, disposant de pouvoirs renforcés et placée sous l'autorité d'un magistrat connu, Raffaele Cantone.

Une décision saluée samedi avec prudence par les journaux italiens pour qui "la lutte contre la corruption n'est pas tout", selon Il Sole 24 Ore.

"L'objectif vraiment ambitieux serait plutôt de redonner de l'efficacité à tout le système des travaux publics qui est malade", analyse le quotidien économique, pour qui "ce secteur économique a besoin de régulation et non seulement de contrôle".

Critique, le Messaggero estime qu'une "vraie réforme ne peut être liée à la nécessité de répondre à une urgence", mais a besoin d'une "stratégie propre".

Or, conclut le quotidien romain, "si nous ne donnons pas le signal d'avoir opté pour un changement clair, la crédibilité d'un gouvernement italien qui demande à l'Europe de pouvoir investir davantage se mesurera à l'aune de celui qui prétend mettre plus d'eau dans un seau au fond troué".

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