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Le Portugal fête la fin de la dictature

La foule manifestant sur la place Rossio à Lisbonne pendant la "Révolution des Oeillets" le 2 mai 1974 [ / AFP/Archives] La foule manifestant sur la place Rossio à Lisbonne pendant la "Révolution des Oeillets" le 2 mai 1974 [ / AFP/Archives]

Le Portugal célébrait vendredi le 40e anniversaire de sa libération du joug de la dictature salazariste, trois semaines avant de s'affranchir de la tutelle de ses créanciers, jugée tout aussi oppressante par la population.

Seule fausse note, comme en 2012 et 2013, les capitaines de la Révolution d'avril ont boycotté les célébrations officielles. Pour eux, la politique d'austérité menée par le gouvernement en échange de l'aide octroyée par la troïka (UE-FMI-BCE) trahit les idéaux de la Révolution.

Le matin du 25 avril 1974, les chars du Mouvement des forces armées (MFA) entrent dans Lisbonne. C'est la fin de 48 ans de dictature dirigée d'une main de fer par Antonio Oliveira Salazar jusqu'en 1968, puis par Marcelo Caetano jusqu'à la chute du régime.

Liberté d'expression, suffrage universel, égalité des chances entre les hommes et les femmes, droit de grève, Sécurité sociale pour tous... les Portugais découvrent la démocratie, tournant la page d'une dictature qui a fait 30.000 prisonniers politiques et une cinquantaine de morts parmi les dissidents.

"Heureuse coïncidence, nous commémorons cette date symbolique pratiquement en même temps que nous concluons notre programme d'aide économique", a relevé le Premier ministre Pedro Passos Coelho.

Le président portugais Antonio de Oliveira Salazar en 1968 [ / AFP/Archives]
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Le président portugais Antonio de Oliveira Salazar en 1968

Arrivés mardi à Lisbonne pour leur ultime visite, les chefs de mission de la troïka devaient plancher sur leurs dossiers au moment des festivités, marquées par une cérémonie solennelle à l'Assemblée de la République, des manifestations et des concerts de rue.

Si la prochaine sortie du pays de son plan de rigueur, synonyme de lourds sacrifices pour les Portugais, provoque un soulagement général, les célébrations de la Révolution des Oeillets ont fait ressortir de profondes divergences politiques.

Soucieux de calmer le jeu, le président Anibal Cavaco Silva a appelé les partis politiques à un consensus sur la période post-troïka: "A chaque fois que nous étions réunis, nous étions proches des idéaux d'avril".

Il s'exprimait au Parlement devant de nombreux invités d'honneur, dont le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso.

 

- Des capitaines en colère -

 

"Si ce gouvernement ne change pas rapidement sa politique de soumission, austérité et appauvrissement du pays, il doit être destitué", a lancé à la même heure le colonel Vasco Lourenço, porte-parole des capitaines d'avril, devant des milliers de Lisboètes rassemblés au Largo do Carmo, l'un des symboles de la Révolution.

L'emblématique place lisboète est située en face de la caserne de gendarmerie où le dictateur Marcelo Caetano a fini par se rendre aux putschistes.

Invités au Parlement, les capitaines d'avril avaient exigé de prendre la parole dans l'hémicycle, mais se sont heurtés au refus des partis de la majorité de centre droit. Du coup, ils avaient décidé d'organiser leur propre rassemblement.

Solidaire avec les militaires, l'ancien président socialiste Mario Soares, 89 ans, considéré comme l'un des pères fondateurs de la démocratie, y était également présent: "ce gouvernement est contre le 25 avril!", a-t-il assuré.

"Les valeurs du 25 avril sont de moins en moins respectées, il y a plus d'inégalités sociales et plus de pauvreté au Portugal depuis l'arrivée de la troïka", a témoigné Pedro Betamio, 40 ans, tenant un oeillet rouge à la main. "En trois ans, mon salaire a diminué d'un tiers", a ajouté ce juriste.

"On paie toujours plus d'impôts et gagne toujours moins. La troïka s'en va, mais il faut que le gouvernement s'en aille aussi!", a renchéri Amelia Castela, 50 ans, venue écouter les capitaines d'avril avec ses filles.

"Grândola Vila Morena", l'hymne de la Révolution, a retenti à nouveau au Largo do Carmo, comme souvent dans des manifestations anti-austérité au Portugal. "Un nouveau 25 avril", réclamé par de nombreuses banderoles, serait-il possible?

"La Révolution du 25 avril est dans les gènes des Portugais", a déclaré à l'AFP l'historienne Irene Pimentel. Pour elle, "un nouveau coup militaire est exclu, mais une révolte populaire est possible".

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