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Obama en Asie de l'Est: sur la corde raide

Barack Obama le 22 avril 2014, à son arrivée à Oso, dans l'Etat de Washington (ouest des Etats-Unis), d'où il part ensuite pour une tournée au Japon, Corée du sud, Philippines et Malaisie [Jim Watson / AFP] Barack Obama le 22 avril 2014, à son arrivée à Oso, dans l'Etat de Washington (ouest des Etats-Unis), d'où il part ensuite pour une tournée au Japon, Corée du sud, Philippines et Malaisie [Jim Watson / AFP]

En arrivant mercredi soir à Tokyo, première étape d'une tournée en Asie, le président Barack Obama sait qu'il va devoir louvoyer entre des écueils historiques et géopolitiques régionaux qui compliquent singulièrement les ambitions américaine dans la région.

Comment par exemple rassurer ses alliés asiatiques sur l'engagement des Etats-Unis sans pour autant froisser la Chine ? Comment renforcer la relation vitale avec le Japon tout en tenant compte de l'irritation de Pékin ou de la Corée du Sud ? Bref, comment prendre parti... sans prendre parti ? Des questions parmi d'autres qui résument la quadrature du cercle asiatique qu'Obama doit tenter de résoudre.

Le président américain débarque au Japon dans un moment lourd d'actions symboliques: près de 150 parlementaires se sont rendus mardi au sulfureux sanctuaire Yasukuni de Tokyo. Et un jour plus tôt, le Premier ministre, Shinzo Abe, avait fait déposer une offrande au sanctuaire où sont honorés 2,5 millions de militaires tombés pour le Japon, mais aussi 14 criminels de guerre condamnés par les Alliés après la défaite nippone lors de la Seconde guerre mondiale.

Le 22 avril, visite de près de 150 parlementaires japonais au sulfureux sanctuaire Yasukuni à Tokyo, une visite symbolique de nature à renforcer les tensions avec les voisins du Japon à la veille de la visite du président américain en Asie de l'est  [Yoshikazu Tsuno / AFP]
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Le 22 avril, visite de près de 150 parlementaires japonais au sulfureux sanctuaire Yasukuni à Tokyo, une visite symbolique de nature à renforcer les tensions avec les voisins du Japon à la veille de la visite du président américain en Asie de l'est

De plus, la Chine a saisi samedi dernier un navire de commerce nippon à cause d'un différend d'avant-guerre, poussant Tokyo à prévenir que cela pourrait remettre en cause la "normalisation" bilatérale conclue en 1972.

Les relations entre la Chine, important partenaire politique, commercial et financier des Etats-Unis, et le Japon, "protégé" de Washington qui y dispose de 50.000 soldats, sont exécrables depuis un an et demi en raison d'un conflit territorial en mer de Chine orientale. Un différend que certains, notamment à Washington, redoutent de plus en plus de voir dégénérer en affrontement, tant il y a de navires de guerre qui patrouillent autour des îles Senkaku, le nom japonais de cet archipel inhabité et revendiqué par Pékin sous le nom de Diaoyu.

Et tandis que les dirigeants sud-coréens et japonais continuent de s'observer avec méfiance, l'épouvantail nucléaire nord-coréen ressurgit: selon des informations sud-coréennes, Pyongyang préparerait un quatrième essai nucléaire.

- Billard à sept bandes -

Après son étape japonaise, le président américain arrivera justement en Corée du Sud, son autre allié régional qui, lui, est en première ligne face à l'imprévisible régime nord-coréen, mais est brouillé avec le Japon sur fond de haines historiques recuites et là aussi de conflit maritime.

"Si Séoul et Tokyo cessent toute coopération sécuritaire tant qu'ils n'auront pas aplani leurs différends historiques, l'Asie du Nord-Est sera plus dangereuse pour l'un comme pour l'autre", prévient Taylor Washburn, expert en relations internationales à Washington.

Fin mars, Barack Obama avait bien réussi à faire asseoir à la même table Shinzo Abe et la présidente sud-coréenne Park Geun-Hye, avec lui entre les deux, mais visiblement le coeur n'y était pas.

Pour Christian Wirth, chercheur à l'Université australienne Griffith, les Etats-Unis n'ont au bout du compte pas vraiment réussi à combler les multiples lignes de fracture qui déchirent l'Asie de l'Est.

Les Etats-Unis, rappelle-t-il, ont pourtant été profondément engagés dans cette région depuis 1945 - par exemple durant la guerre de Corée -, "mais la préférence de Washington pour le bilatéralisme a eu comme conséquence une absence de coopération inter-asiatique et de réconciliation historique".

De plus, entre les tentatives désespérées de sauver le processus de paix israélo-palestinien, et l'engagement dans la crise avec la Russie à propos de l'Ukraine, cette partie instable de l'Asie se sent un peu reléguée dans les priorités américaines, malgré des assurances réitérées de Washington.

L'annulation l'an dernier d'une tournée régionale, pour cause de paralysie budgétaire aux Etats-Unis, n'avait pas arrangé les choses.

Du coup, pour cette tournée asiatique qui le mènera aussi aux Philippines et en Malaisie, Barack Obama est sur la corde raide: il doit rassurer Pékin en disant que la politique régionale américaine ne vise pas à endiguer la Chine et il doit parallèlement réconforter Tokyo sur la solidité de l'engagement américain.

Dans cette partie de billard à sept bandes, M. Abe n'a certes pas facilité la tâche à l'administration américaine, en allant lui-même fin décembre dernier au sanctuaire Yasukuni.

"Obama va probablement insister auprès de Shinzo Abe sur la nécessité de mettre en sourdine une tendance au sein de son équipe à promouvoir une sorte de révisionnisme qui tend à minimiser les souffrances imposées par le Japon impérial" à cette région, estime James Schoff, de l'Institut Carnegie pour la paix.

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