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Kiev veut reprendre pied après des revers militaires dans l'Est

Des Ukrainiens sur des véhicules de l'armée sont bloqués par des pro-Russes à Kramatorsk le 16 avril 2014 [Anatolii Stepanov / AFP] Des Ukrainiens sur des véhicules de l'armée sont bloqués par des pro-Russes à Kramatorsk le 16 avril 2014 [Anatolii Stepanov / AFP]

L’Ukraine cherche à reprendre pied après des échecs cinglants de l'armée dans l'Est où des militaires ont déposé des armes devant les insurgé pro-russes un mois après le rattachement à la Russie de la Crimée.

Le président par intérim Olexandre Tourtchinov a annoncé jeudi la dissolution de la 25e brigade parachutiste, dont une unité a laissé les insurgés pro-russes s'emparer de six blindés avant de déposer les armes dans la ville de Kramatorsk. Et les forces du ministère de l'Intérieur ont repoussé dans la nuit une attaque de 300 assaillants à Marioupol, une attaque qui a fait trois morts parmi les insurgés.

Mais selon les analystes, l'humiliation subie mercredi met à mal le gouvernement, illustrant une opération mal préparée dans une région très hostile envers les autorités issues de la contestation pro-européenne à Kiev et dont les élites et la police sont réticentes à confronter les séparatistes, voire complices.

"C'était une erreur de lancer une +opération antiterroriste+ dans le Donbass où la majorité absolue est hostile au gouvernement. Des opérations ciblées contre les groupes armés c'est une chose, mais quand il y a des chars dans la rue, les gens les bloquent", souligne le politologue Volodymyr Fessenko.

Des activistes pro-Russes armés bloquent une colonne d'Ukrainiens à Kramatorsk, dans l'Est de l'Ukraine, le 16 avril 2014 [Anatolii Stepanov / AFP]
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Des activistes pro-Russes armés bloquent une colonne d'Ukrainiens à Kramatorsk, dans l'Est de l'Ukraine, le 16 avril 2014

L'expert militaire Oleksiï Melnik du centre de recherche Razoumkov critique en revanche l'hésitation du gouvernement dont l'engagement sur le terrain n'a rien à voir avec l'"opération de grande envergure" annoncée dimanche.

"Les arguments selon lesquels +il ne faut pas provoquer la Russie+ sont absurdes dans la situation actuelle, parce que la Russie n'a pas besoin de prétexte pour mettre à exécution son scénario. La raison de ce qui se passe est l'inaction du pouvoir", souligne-t-il.

- Armée démoralisée -

Les blindés ont été bloqués par des civils sur lesquels ils n'ont pas le droit de tirer, ce qui témoigne de la mauvaise organisation de l'opération, explique M. Melnik.

"De telles défaites démoralisent l'armée dont la combativité a déjà été sapée par les événements en Crimée" où les militaires ukrainiens ont fini par abandonner leurs unités sans avoir résisté aux forces russes, conclut l'expert.

Insuffisamment financée et dotée d'un matériel obsolète, l'armée ukrainienne, qui compte 130.000 hommes, fait pâle figure face à la Russie qui compte six fois plus de soldats, dont 40.000 massés à la frontière est de l'Ukraine, selon l'Otan.

"La situation actuelle nous a pris au dépourvu", a reconnu jeudi le chef-adjoint du département de l’intendance du ministère de la Défense, Arkadi Stoujik en soulignant que les besoins en uniformes et équipements de protection n'étaient, par exemple, couverts qu'à 30 à 40%.

Selon Kiev, les groupes armés pro-russes dans l'Est sont dirigés par le renseignement militaire russe et plusieurs centaines de soldats d'élite portant des uniformes sans insigne sont déjà présents dans la région, ce que Moscou dément.

Selon Mykola Soungourovski, un expert militaire, l'Ukraine a mobilisé ses meilleurs hommes et équipements pour protéger la frontière est.

"Mais ils sont seulement capables de repousser le premier assaut. Ensuite il faudrait que la guérilla s'organise parce que le rapport des forces n'est pas en notre faveur", ajoute-t-il.

- Policiers subordonnés aux séparatistes -

Un chasseur ukrainien survole la ville de Kramatorsk, dans l'Est du pays, le 16 avril 2014 [Anatolii Stepanov / AFP]
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Un chasseur ukrainien survole la ville de Kramatorsk, dans l'Est du pays, le 16 avril 2014

L'armée est la principale force loyale à Kiev dans la région, alors que les policiers n'ont rien fait pour empêcher les assauts contre les administrations et les postes de police dans plusieurs villes de l'Est.

"La situation est très compliquée (...) Certains policiers sont subordonnés aux séparatistes", a reconnu mercredi le premier vice-Premier ministre ukrainien Vitali Iarema.

"On ne peut pas accuser les policiers. Les postes de police ont été attaqués par des hommes ayant l'expérience du combat et eux en manquaient. S'ils avaient eu recours aux armes, les conséquences auraient pu être catastrophiques", nuance Mykhaïlo Kornienko, ancien vice-ministre de l'Intérieur.

Selon Olexandra Roudneva, experte de l'Institut de recherches stratégiques, les policiers éprouvent en outre de la rancœur envers les autorités, qui n'ont pas puni les responsables des tueries qui ont fait plus de 100 morts lors des manifestations du Maïdan à Kiev en février dernier et ont fait d'eux "des boucs émissaires".

"Dans cette situation qui que ce soit au pouvoir à Kiev aura du mal à exercer de l'influence sur la police, surtout à Donetsk", conclut Mme Roudneva.

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