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Venezuela : sur les barricades, on s'inspire de Kiev et du Caire

Des opposants au président Nicolas Maduro manifestent à Caracas le 3 mars 2014 [Leo Ramirez / AFP] Des opposants au président Nicolas Maduro manifestent à Caracas le 3 mars 2014 [Leo Ramirez / AFP]

Des manifestants arrachent un arbre mort sur un terrain vague et le traînent jusqu'en pleine rue pour édifier une nouvelle barricade dans l'est de Caracas, théâtre des heurts entre jeunes et forces de l'ordre vénézuéliennes depuis trois semaines.

Non loin de là, d'autres jeunes s'emparent de plaques de tôle ou d'antennes paraboliques qui leur serviront de bouclier pour une nouvelle nuit d'affrontements avec les forces antiémeutes. Ce soir, aux pierres et cocktails Molotov répondront une fois de plus gaz lacrymogènes et tirs de chevrotine.

Ignorant les appels de l'opposition à manifester pacifiquement contre le gouvernement de Nicolas Maduro, ils sont quelques dizaines à défier chaque soir les forces de l'ordre à Caracas, imitant leurs camarades de l'université de San Cristobal (nord-ouest) qui ont initié le mouvement voici un mois.

Désormais rodés à l'insurrection urbaine après trois semaines de lutte, les manifestants anti-gouvernement de la capitale expliquent avoir tiré de nombreux enseignements des actions de leurs homologues d'Ukraine ou d'Egypte.

"Nous avons appris à fabriquer des boucliers en regardant les autres manifestations" sur internet, témoigne cigarette au bec Adam, un étudiant de 24 ans.

Des opposants au président Nicolas Maduro manifestent à Caracas le 3 mars 2014 [Leo Ramirez / AFP]
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Des opposants au président Nicolas Maduro manifestent à Caracas le 3 mars 2014
 

Parmi leur arsenal, figurent des lance-pierres géants ou encore les "miguelitos", tuyaux parsemés de clous qu'ils jettent sous les roues des véhicules policiers pour en faire éclater les pneus.

Lorsque les camions équipés de canon à eau apparaissent, les jeunes projettent de la peinture sur les vitres. Dans leurs masques, bricolés à l'aide de bouteilles d'eau, ils placent des chiffons imbibés de vinaigre pour contrer les effets des gaz lacrymogènes.

 

- Lance-pierre géants et "miguelitos" -

 

"Nous avons tout sauf des armes", explique à l'AFP Adam, muni d'un épais rondin de bois sur lequel a été fixée une poignée de métal. "Lorsque la police s'approche, tu l'attrapes comme ça et tu le fais balancer", explique-t-il.

Lundi soir, Adam et ses camarades ont de nouveau affronté les forces de l'ordre - mais cette fois pas de blessé- alors que les violences ont déjà fait 18 morts et plus de 260 blessés dans le pays depuis début février.

Comme une partie de l'opposition, ils sont déterminés à pousser Nicolas Maduro vers la sortie, jugeant ce dernier responsables de l'insécurité, de l'inflation (plus de 56% en 2013) et des fréquentes pénuries de biens de première nécessité.

Leur camp retranché a été établi Place Altamira, lieu traditionnel des revendications de l'opposition, sis dans le cossu quartier de Chacao. C'est de ce QG qu'ils organisent leurs combats, refusant de profiter des congés du Carnaval, qui s'achèvent mardi.

L’atmosphère de l'est de Caracas contraste d'ailleurs - particulièrement la nuit - avec le calme observé depuis le début du mouvement dans les quartiers plus modestes, bastions traditionnels des "chavistes".

A Altamira, le plan de bataille est désormais bien en place. En première ligne, une dizaine de jeunes parmi les plus téméraires progressent en ligne avec leurs boucliers. Derrière, on se charge de les alimenter en pierres et cocktails molotov.

Constitués de petits groupes de trente ou quarante éléments, les jeunes affrontent violemment les forces de l'ordre avant de se replier rapidement, et d'être remplacés par d'autres groupes.

La base arrière, où on peut se reposer et recevoir les premiers soins, se trouve à Altamira.

"Avec l'expérience, on a moins peur", assure Valentina Huamani, étudiante intrépide de 18 ans, habituée des avant-postes. "Quand les autres me voient, moi une fille, ils nous rejoignent", affirme la protestataire vêtue d'une veste kaki.

Jonathan Hinds, 32 ans, souhaiterait lui que la population les suive davantage. "Nous ne sommes pas des bourgeois, nous ne sommes pas des oligarques, nous ne sommes pas des fascistes", clame-t-il en réponse aux habituelles invectives de M. Maduro contre l'opposition.

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