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La Chine et Taïwan nouent un dialogue officiel historique

Wang Yu-chi (g), officiel taïwanais chargé des relations avec la Chine continentale et son homologue chinois Zhang Zhijun, le 11 février 2014 à Nankin [Mark Ralston / AFP] Wang Yu-chi (g), officiel taïwanais chargé des relations avec la Chine continentale et son homologue chinois Zhang Zhijun, le 11 février 2014 à Nankin [Mark Ralston / AFP]

La Chine et Taïwan ont noué mardi un dialogue historique entre leurs gouvernements, pour la première fois depuis la fin de la guerre civile en 1949, dans un contexte de dégel des tensions et d'échanges accrus au-dessus du détroit de Formose.

Ces entretiens d'un niveau inédit ont eu pour cadre hautement symbolique Nankin, la ville de l'est que le camp nationaliste de Chiang Kai-shek avait choisie comme capitale.

Wang Yu-chi, officiel taïwanais chargé des relations avec la Chine continentale, y a rencontré son homologue Zhang Zhijun, chef du Bureau chinois des Affaires taïwanaises.

La pièce dans laquelle s'est déroulée leur entrevue avait été décorée de façon neutre, sans drapeau visible ni titre officiel affiché sur la table des discussions, afin de ménager les sensibilités. Les deux hommes ont échangé une longue et chaleureuse poignée de main.

"Tant que nous cheminerons sur la voie du développement pacifique, nous devrons et nous pourrons assurément nous rapprocher dans l'avenir", a déclaré M. Zhang, cité par l'agence de presse Chine nouvelle.

Il a appelé les deux parties à oeuvrer afin que plus jamais ne se troublent les relations sino-taïwanaises.

Wang Yu-chi a de son côté insisté sur le "nouveau chapitre" ouvert par sa visite officielle en Chine communiste, qui était selon lui encore inimaginable il y a quelques années.

Rencontre entre officiels taïwanais et chinois, le 11 février 2014 à Nankin [Mark Ralston / AFP]
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Rencontre entre officiels taïwanais et chinois, le 11 février 2014 à Nankin

Une portée toutefois à relativiser, les experts n'imaginant pas que les dirigeants des deux territoires se rencontrent dans un avenir proche.

M. Wang a invité son homologue à Taïwan afin qu'il dispose d'"une meilleure compréhension de la société à Taïwan et des conditions de vie de sa population".

Cette entrevue illustre les efforts menés depuis quelques années de part et d'autre du détroit de Formose pour panser les plaies de la guerre civile ayant débouché en 1949 sur une partition entre "République de Chine" et "République populaire de Chine".

Cette année-là, deux millions de Chinois fidèles au chef nationaliste Chiang Kai-shek, défait par les hommes de Mao, se réfugient sur l'île de Taïwan.

Depuis, Pékin et Taipei revendiquent séparément leur pleine autorité sur la Chine.

Pékin considère Taïwan comme lui appartenant et n'a pas renoncé à la réunification, par la force si nécessaire. Mais les relations entre les deux entités se sont apaisées depuis l'élection en 2008 du président Ma Ying-jeou.

Cet artisan de la renaissance du parti Kuomintang (KMT) -- l'ancien ennemi nationaliste -- a été réélu en 2012 et est favorable à des liens avec la Chine continentale.

Après de timides contacts dans les années 1990, Taïwan et la Chine communiste ont franchi en 2010 une étape décisive sur la voie du dégel en signant un accord-cadre de coopération économique sous l'impulsion de Ma Ying-jeou.

Cet accord, et d'autres gestes d'ouverture comme la reprise des vols aériens directs, n'ont toutefois été négociés que par des organismes semi-officiels, Pékin et Taipei n'ayant toujours aucune relation diplomatique.

Durant sa visite de quatre jours, M. Wang doit notamment évoquer la création de bureaux de liaison, l'intégration économique régionale et l'accès aux soins médicaux des étudiants taïwanais en Chine. La question de la liberté de la presse doit aussi être abordée.

Faire avancer des dossiers pratiques

Un porte-parole du président Ma Ying-jeou a déclaré que celui-ci avait estimé que la rencontre "(était) de grande importance pour le développement pacifique des relations bilatérales, et (comprenait) des éléments cruciaux pour la normalisation des relations de part et d'autre du détroit".

En fonction de ce qu'il produira, le séjour de M. Wang en Chine pourrait poser le premier jalon d'une rencontre entre Ma Ying-jeou et le président chinois Xi Jinping, estime George Tsai, politologue à Taipei.

Wang Yu-chi, officiel taïwanais chargé des relations avec la Chine, le 11 février 2014 à Nankin [Mark Ralston / AFP]
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Wang Yu-chi, officiel taïwanais chargé des relations avec la Chine, le 11 février 2014 à Nankin

Néanmoins "les deux parties cherchent les pierres sous leurs pieds en traversant la rivière", dit-il, citant un proverbe chinois sur la prudence.

Le sommet des dirigeants de l'Apec (Coopération économique des pays d'Asie-Pacifique) à Pékin en octobre serait à cet égard une occasion idéale, selon Wang Yu-chi.

Le président chinois Xi avait rencontré l'ancien vice-président taïwanais Vincent Siew en marge du dernier sommet de l'Apec en Indonésie en octobre 2013. La Chine s'oppose toujours à la présence officielle de dirigeants taïwanais au sein de l'organisation Asie-Pacifique.

Taïwan aura à coeur durant ces entretiens de faire avancer des dossiers pratiques sur l'économie ou la sécurité. La Chine, elle, vise le retour de Taïwan dans son giron, observe Jia Qingguo, professeur à l'université de Pékin.

La Chine "attache probablement plus d'importance à l'accélération de l'intégration économique, en pensant à l'unification politique à plus long terme", estime-t-il.

Le chemin reste long et semé d'embûches jusqu'à une normalisation des relations entre Pékin et Taipei mais le rendez-vous de Nankin a une forte "portée symbolique", selon lui.

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