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Le Venezuela, plaque-tournante du trafic de drogue vers l'Europe

Des soldats vénézuéliens participent à une opération visant à détruire une piste d'atterrissage utilisée par des trafiquants de drogue, près de la frontière avec la Colombie, le 31 mai 2012 [Juan Barreto / AFP/Archives] Des soldats vénézuéliens participent à une opération visant à détruire une piste d'atterrissage utilisée par des trafiquants de drogue, près de la frontière avec la Colombie, le 31 mai 2012 [Juan Barreto / AFP/Archives]

S'il ne compte pas parmi les principaux pays producteurs de drogue, le Venezuela, par sa proximité avec la Colombie et son degré élevé de corruption, s'est converti en pôle de transit du trafic de cocaïne vers l'Europe et les Etats-Unis.

La France a annoncé samedi la saisie record dans un aéroport parisien de plus d'1,3 tonne de cocaïne dans une trentaine de valises en provenance de Caracas. Cet évènement constitue pour les experts l'illustration de la mutation du Venezuela en porte de sortie des drogues produites en Colombie -avec laquelle il partage 2.200 km de frontières-, mais aussi au Pérou et en Bolivie.

Ces trois pays sont les principaux producteurs de la feuille de coca, matière première de la cocaïne.

Selon Hernan Matute, expert dans ce domaine, le Venezuela est devenu un important point de départ des routes maritimes et aériennes vers les Etats-Unis et l'Europe -principalement l'Espagne- du fait de "sa situation géographique" ouverte sur l'Atlantique, de la porosité de ses frontières, ainsi que du "degré élevé de corruption" dans ce pays.

Il existe deux principaux itinéraires empruntés à partir du Venezuela. L'un part de la côte ou des îles caraïbes et rejoint l'Afrique de l'ouest puis les Canaries (Espagne), et l'autre aboutit au Mexique, d'où la drogue est acheminée vers les marchés américain et canadien par les cartels, selon M. Matute.

Les autorités vénézuéliennes assurent que depuis la fermeture du Bureau local de l'agence antidrogue américaine (DEA) en 2005, leur stratégie de lutte contre le trafic de stupéfiants a été efficace.

Quelque 38 tonnes de drogues ont déjà été saisies en 2013 (45 tonnes en 2012), et les récentes arrestations de plusieurs barons colombiens de la drogue tels que Daniel Barrera Barrera, interpellé en septembre 2012 dans l'ouest du Venezuela, aux confins de la Colombie, plaident en leur faveur.

Selon le Bureau national antidrogue, les autorités vénézuélienne ont arrêté 109 importants acteurs du trafic de drogue entre 2006 et 2013, mais le gouvernement américain juge ces efforts insuffisants.

Un des pays les plus corrompus au monde

L'arrestation ces derniers jours de huit membres de la Garde nationale bolivarienne (GNB, une composante de l'armée vénézuélienne chargée de la sécurité intérieure) après la saisie effectuée en France vient aussi démontrer la fragilité de forces de sécurité connues pour le niveau élevé de corruption dans leurs rangs.

M. Matute estime même qu'il "est impossible que seuls des militaires aient pu participer à une opération d'une telle envergure" : "des fonctionnaires de haut rang sont certainement impliqués".

"Ces militaires ne peuvent mobiliser seuls un chargement d'1,3 tonne, qui vaut des millions de dollars (...) Cela a été organisé avec un haut commandement", acquiesce Bayardo Ramirez, ex-président de l'ancienne Commission nationale contre l'utilisation illicite de drogues.

"Nous sommes un des pays les plus corrompus au monde", ajoute M. Ramirez, fustigeant l'impunité qui règne dans le domaine.

Le problème de la corruption est criant au Venezuela : dans son dernier rapport, l'ONG Transparency International a classé ce pays à la 165e place sur 176 pour son combat contre ce fléau.

Conscient à la fois de cette réalité et de la réputation du Venezuela en la matière, le président Nicolas Maduro a récemment annoncé une croisade anticorruption. Il a même indiqué qu'il demanderait au parlement des pouvoir spéciaux pour s'engager dans ce combat, mais aucune mesure d'envergure n'est pour l'instant venue accompagner ces déclarations.

De son côté, l'opposition accuse le gouvernement d'épargner les "gros poissons" qui gangrènent le système.

"Nous ignorons si le gros poisson qui est derrière ces valises est un ministre. Ceux qui tombent sont ceux qui n'ont rien à voir (avec des délits), mais les gros poissons ne sont jamais inquiétés", a déploré mardi le chef de l'opposition de droite Henrique Capriles.

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