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La Tunisie sous tension après l'assassinat de Chokri Belaïd

La foule entoure l'ambulance transportant le corps de Chokri Belaïd le 6 février 2013 à Tunis [Fethi Belaid / AFP] La foule entoure l'ambulance transportant le corps de Chokri Belaïd le 6 février 2013 à Tunis [Fethi Belaid / AFP]

Un chef de l'opposition tunisienne Chokri Belaïd a été tué par balles mercredi à Tunis, le premier assassinat du genre depuis la révolution qui a provoqué des protestations dans plusieurs villes du pays et des attaques contre des locaux du parti islamiste au pouvoir Ennahda.

Le président Moncef Marzouki, qui était en visite en France, a annulé sa participation au sommet islamique du Caire pour rentrer d'urgence à Tunis, a annoncé la présidence en dénonçant un crime "odieux" visant "à mener le peuple tunisien à la violence", et en appelant "à la retenue".

Les proches de la victime ont accusé Ennahda d'être responsables du meurtre, alors que les violences politiques et sociales secouent le pays depuis la révolution de 2011 qui a chassé le président Zine El Abidine Ben Ali du pouvoir.

A Paris, le président François Hollande a condamné "avec la plus grande fermeté" ce meurtre qui "prive la Tunisie d'une de ses voix les plus courageuses et les plus libres" et fait part de la "préoccupation" de Paris face à "la montée des violences politiques" dans ce pays.

Chokri Belaïd le 29 décembre 2010 à Tunis [Fethi Belaid / AFP/Archives]
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Chokri Belaïd le 29 décembre 2010 à Tunis
 

Chokri Belaïd, 48 ans, critique acerbe du gouvernement, a été tué en sortant de chez lui le matin de trois balles tirées à bout portant par un homme portant un vêtement de type burnous, sorte de long manteau traditionnel en laine avec une capuche pointue, selon le Premier ministre Hamadi Jebali.

Le ministre de l'Intérieur Ali Larayedh a indiqué, en citant le chauffeur de la victime, qu'un complice l'attendait pour prendre la fuite à moto.

Secrétaire général du parti des Patriotes démocrates, l'opposant avait rejoint avec sa formation une coalition de gauche, le Front populaire, qui se pose en alternative au pouvoir en place.

Très présent dans les médias, le poids politique de Chokri Belaïd et de ses alliés demeure une inconnue, le Front populaire n'ayant été créé qu'après les élections d'octobre 2011.

"C'est un acte criminel, un acte de terrorisme pas seulement contre Belaïd mais contre toute la Tunisie", a dit M. Jebali, promettant de tout faire pour retrouver les responsables.

Le défenseur des Droits de l'Homme Mokhtar Trifi et Basma, la femme de Chrokri Belaïd, le 6 février 2013 à Tunis [Fethi Belaid / AFP]
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Le défenseur des Droits de l'Homme Mokhtar Trifi et Basma, la femme de Chrokri Belaïd, le 6 février 2013 à Tunis
 

"C'est un tournant grave", a-t-il ajouté, en appelant "à ne pas tomber dans le piège du criminel qui vise à plonger le pays dans le désordre".

Ennahda a dénoncé "un crime odieux visant à déstabiliser le pays" et son chef Rached Ghannouchi a estimé que ses auteurs "veulent un bain de sang" dans le pays, rejetant toute implication de son parti.

Le frère de la victime, Abdelmajid Belaïd, a en revanche accusé "Rached Ghannouchi d'avoir fait assassiner (son) frère", sans étayer cette accusation.

Devant l'hôpital du quartier Ennasr de Tunis où la dépouille de Belaïd se trouvait, des centaines de personnes ont manifesté dans la matinée en criant "le peuple veut une nouvelle révolution". "Ghannouchi sale chien", criait le père de la victime, en larmes.

Une foule sans cesse grandissante se réunissait devant le ministère de l'Intérieur sur l'avenue Habib Bourguiba, dans la capitale. A la mi-journée ils étaient environ 4.000.

Ailleurs dans le pays, à Mezzouna, près de Sidi Bouzid, et à Gafsa, (centre), des manifestants ont incendié et saccagé les locaux d'Ennahda, selon un correspondant de l'AFP sur place et des témoins. A Sidi Bouzid, Kasserine, Béja et Bizerte des foules manifestaient leur colère après le meurtre.

Le président tunisien Moncef Marzouki et François Hollande le 5 février 2013 à Strasbourg [Frederick Florin / AFP]
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Le président tunisien Moncef Marzouki et François Hollande le 5 février 2013 à Strasbourg
 

Hamma Hammami, chef du Front populaire, a accusé "des partis politiques qui veulent enfoncer le pays dans l'anarchie. Le gouvernement et le pouvoir assument la responsabilité de ce crime odieux car les menaces contre Chokri et d'autres ne datent pas d'aujourd'hui".

La Tunisie est plongée dans une crise politique, faute d'un compromis sur la future Constitution qui bloque l'organisation de nouvelles élections, alors que des membres de la coalition gouvernementale réclament un remaniement du gouvernement pour retirer aux islamistes des ministères régaliens.

Face à l'impasse, les violences se sont multipliés et plusieurs opposants ont accusé des milices pro-pouvoir, la Ligue de protection de la révolution, d'orchestrer des heurts ou des attaques contre l'opposition. Ce mouvement est accusé d'avoir tué en octobre l'opposant Nidaa Tounès.

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