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Octobre 1962, la crise de Cuba

Le président américain John Fitzgerald Kennedy signe l'ordre du blocus naval de Cuba, le 24 octobre 1962 à la Maison Blanche, à Washington [ / AFP] Le président américain John Fitzgerald Kennedy signe l'ordre du blocus naval de Cuba, le 24 octobre 1962 à la Maison Blanche, à Washington [ / AFP]

L'installation de missiles nucléaires soviétiques à Cuba a donné lieu il y a 50 ans à la crise la plus aiguë de toute la guerre froide, au cours de laquelle le monde n'a échappé à l'apocalypse atomique que "par chance", concèdent les protagonistes de la confrontation.

Pendant des décennies, la "crise des missiles" a été présentée comme un épisode géré de main de maître par le président américain John F. Kennedy, un cas d'école.

La secrétaire d'Etat Hillary Clinton n'a ainsi pas manqué de comparer la gestion de la crise par Kennedy à l'attitude de l'administration de Barack Obama vis-à-vis du dossier du nucléaire iranien.

L'ouverture des archives soviétiques et américaines fait émerger une réalité plus prosaïque: ces 13 jours d'octobre ont révélé la difficulté pour Kennedy et son homologue Nikita Khrouchtchev à maîtriser l'enchaînement des événements.

Inquiet du retard soviétique en matière d'armements stratégiques et des menaces que font peser les Etats-Unis sur la révolution cubaine, le numéro un soviétique décide en mai 1962 l'envoi de plus de 40.000 hommes et de dizaines de missiles nucléaires sur l'île. Tout en continuant d'assurer aux Américains qu'il n'est pas question de poster des armes offensives à Cuba.

Ce n'est qu'à la faveur des photographies prises par un avion-espion U-2 que les dirigeants américains apprennent le 16 octobre la présence des missiles. "Le sentiment dominant était le choc et l'incrédulité", confiera Robert Kennedy, le frère du président.

La surprise stratégique est totale. Elle a pourtant été précédée de nombreux rapports à la CIA d'agents cubains --882 pour le seul mois de septembre selon Michael Dobbs, auteur de "One minute to midnight" (non-traduit)-- faisant état de mouvements d'étranges convois la nuit sur les routes de l'île.

Missiles en Turquie

A la Maison Blanche, les généraux préconisent des frappes aériennes, voire une invasion de Cuba, tandis que le secrétaire à la Défense Robert McNamara et les diplomates préfèrent le blocus de l'île pour empêcher les navires soviétiques de continuer à y livrer les armements.

Le 22 octobre, JFK annonce la situation aux Américains et place les forces américaines en état d'alerte maximale. Le monde pousse un soupir de soulagement quand il apprend que la majorité des navires fait demi-tour.

En coulisses le drame se poursuit. Kennedy et Khrouchtchev tentent de trouver une issue, mais leurs efforts sont pollués par l'impossibilité de communiquer directement et par les messages et événements contradictoires.

Le 26 octobre au soir, les Soviétiques proposent de retirer leurs missiles contre la garantie de ne pas envahir Cuba mais le lendemain matin exigent en plus publiquement le retrait des fusées américaines de Turquie.

Le samedi 27, c'est l'escalade: un U-2 est abattu au-dessus de Cuba, les choses semblent échapper à tout contrôle. Les plans du Pentagone sont prêts pour des frappes massives le mardi d'après, suivi d'un débarquement de 120.000 hommes à Cuba.

Ce n'est que 30 ans après que les Américains apprendront que "les Soviétiques disposaient de dizaines de missiles tactiques sur l'île, équipés de têtes nucléaires capables d'anéantir toute une force d'invasion", selon Michael Dobbs.

La peur finit par l'emporter le samedi soir: Washington promet de ne pas envahir Cuba, et secrètement de retirer ses fusées de Turquie, Moscou de rapatrier ses missiles de Cuba.

"Pendant des années, j'ai considéré la crise des missiles de Cuba comme la crise de politique étrangère la mieux gérée des 50 dernières années (...)", a confessé Robert McNamara lors d'une conférence à La Havane en 2002. "Maintenant, j'en conclus que, quelle que soit l'habileté déployée, à la fin de ces 13 jours extraordinaires, la chance a bien aidé à éviter la guerre nucléaire d'un cheveu".

Pour l'ancien chef du département cubain du KGB, Nikolaï Leonov, "c'est presque comme si une intervention divine nous avait aidé à nous sauver".

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