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République Tchèque : l'alcool frelaté exaspère les distilleurs

Un employé de supermarché retire des bouteilles d'alcool de la vente, le 14 septembre 2012 à Brno [Radek Mica / AFP/Archives] Un employé de supermarché retire des bouteilles d'alcool de la vente, le 14 septembre 2012 à Brno [Radek Mica / AFP/Archives]

Les distilleurs tchèques se voient confrontés à une crise sans précédent due à l'interdiction par le gouvernement de la distribution et des exportations des spiritueux locaux, à la suite d'une vague d'intoxications à l'alcool frelaté qui a fait jusqu'ici 23 morts.

Sous la pression de Bruxelles, le gouvernement a interdit jeudi d'exporter les boissons de plus de 20 degrés d'alcool. La distribution de ces alcools sur le marché intérieur avait été interdite le 14 septembre.

"L'interdiction d'exporter est une chose terrible pour ma marque", a déclaré aux journalistes le président de la société Jan Becher (groupe Pernod Ricard), fabriquant de la traditionnelle liqueur aux herbes Karlovarska Becherovka.

Selon lui, "cette prohibition ne fait que pénaliser les producteurs et les importateurs jouissant d'une bonne réputation"

Chaque jour, ces "producteurs réputés" vendent pour 15 millions de couronnes (604.000 euros), soit un chiffre d'affaires annuel de 5,5 milliards de couronnes, selon l'Association de producteurs et d'importateurs de spiritueux.

Les exportations tchèques ont atteint 1,09 milliard de couronnes entre août 2011 et juillet 2012, selon le Bureau national des statistiques.

Le marché majeur pour les exportations de spiritueux tchèques, la Slovaquie, qui en a acheté pour plus de 600 millions de couronnes sur 12 mois, a arrêté d'en importer mardi. Quatre personnes ont été hospitalisées dans ce pays après avoir bu de la prune tchèque frappée au méthanol.

Les producteurs tchèques de spiritueux pressent le gouvernement de lever l'interdiction d'exporter et de punir seulement les fabricants d'alcools contenant du méthanol. Ils menacent de licencier du personnel si l'interdiction devait perdurer.

"A cette étape, les dommages subis par les marques et les exportateurs tchèques restent incommensurables", a indiqué M. Schofield.

La vague d'intoxications sans précédent, qui sévit en République tchèque depuis le début de septembre, a déjà fait 23 morts. Une trentaine de personnes restent hospitalisées dans l'ensemble du pays après avoir consommé de l'alcool frelaté, certaines dans un état grave, placées en coma artificiel.

La police n'a toujours pas identifié la principale source de l'alcool frelaté mais l'affaire à mis au grand jour l'existence d'un énorme marché noir estimé à 25% de l'ensemble des ventes des alcools en République tchèque.

Outre les pertes fiscales provoquées par ce marché noir, estimées à 1,6 milliard de couronnes par an, le budget tchèque perd 130 millions de couronnes supplémentaires chaque jour en raison de la prohibition dans ce pays classé deuxième au monde pour la consommation d'alcool par les adultes, derrière la Moldavie.

"Une fois cette crise terminée, nous allons demander au gouvernement comment rattraper nos pertes", a insisté M. Schofield.

Le gouvernement a promis de lever les restrictions dès que possible, précisant qu'un nouveau système d'estampillage à l'aide de timbres d'accise sera introduit dès la semaine prochaine pour distinguer les alcools sûrs de ceux de qualité incertaine.

Mais selon M. Schofield, les timbres peuvent être utilisés pour "légaliser la production au noir parce que les gens les décollent et les remettent sur leurs bouteilles à eux, faisant croire aux gens qu'elles sont légales".

Vladimir Darebnik, le vice-président de l'association, a appelé le gouvernement à lever l'interdiction "sur la vente de produits traçables" et à autoriser la vente de plus de 20 millions de litres de boissons retirées du marché depuis huit jours.

La fin de la prohibition réjouirait certainement les restaurateurs qui perdent chaque jour 200 millions de couronnes, selon MAG Consulting agency.

Robert Hurda, manager d'un bar-restaurant dans un club de musique très populaire de Prague, assure que son chiffre d'affaires a chuté de 40% à 50% depuis le début de la prohibition.

"Les gens restent moins longtemps parce qu'ils ne s'amusent plus autant qu'avant", explique-t-il.

"Nous essayons de réagir. (A la place des alcools habituels), nous avons acheté des liqueurs douces. Mais quand tu en bois de trop ça te donne un sacré mal de tête", constate-t-il.

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