En direct
A suivre

Chine : le scandale Bo Xilai fascine la population

Yan Weilan écume tous les jours l'internet à la recherche de nouvelles ou de rumeurs fraîches sur la saga Bo Xilai, un immense scandale politique en Chine vécu par la population avec un mélange de fascination et d'écoeurement.[AFP/Archives]

Yan Weilan écume tous les jours l'internet à la recherche de nouvelles ou de rumeurs fraîches sur la saga Bo Xilai, un immense scandale politique en Chine vécu par la population avec un mélange de fascination et d'écoeurement.

Beaucoup de Chinois assistent pour la première fois de leur vie à une affaire aussi retentissante: la disgrâce de l'ancien chef du Parti communiste de la ville de Chongqing (sud-ouest) récemment suspendu du Bureau politique alors qu'il était promis à un bel avenir et dont la femme est désormais suspectée du meurtre d'un Britannique.

Si le scandale est le plus gros tabou ces jours-ci sur l'internet, c'est aussi le sujet qui semble alimenter la plupart des conversations des Chinois.

"On n'a jamais rien vu de tel. Tous les jours je lis les articles de la presse étrangère", dit à l'AFP Yan Weilan, 29 ans, une employée dans l'assurance dont la soeur exilée aux Etats-Unis lui envoie par email des informations non censurées.

La disgrâce de Bo Xilai, le plus gros scandale politique depuis des décennies en Chine, sur fond d'allégations de corruption, met en relief la vie dorée des très privilégiés en Chine et leur sentiment d'impunité.

Elle a un parfum de saga hollywoodienne avec le meurtre du Britannique Neil Heywood, un associé d'affaires de Bo et de son épouse Gu Kailai, qui a peut-être été empoisonné parce qu'il en savait trop.

Toutes sortes de rumeurs ont fusé sur la Toile, comme celle d'enfants illégitimes de Bo Xilai, d'une conspiration pour stopper net sa marche vers le pouvoir (il espérait entrer au Comité permamnent du Politburo au congrès d'octobre du PCC) et même de son usage d'aphrodisiaques avec de jeunes femmes.

Mais, pour beaucoup, ce scandale ne fait que souligner l'immensité du fossé qui sépare les Chinois ordinaires de leurs dirigeants, perçus comme corrompus et hautains, un fossé qui inquiète au plus haut point le Parti communiste.

"Il y a toutes ces choses qui arrivent là-haut" dit Wang Bao, étudiant, en mettant sa main largement au-dessus de sa tête, "et nous on est en bas", dit-il en l'abaissant au niveau de ses genoux.

"Ils sont là-haut et nous nous sommes les serfs. Quel pouvoir avons-nous?"

Mais comme de nombreux Chinois, Wang Bao est sceptique sur la féroce campagne anti-Bo, à six mois d'un congrès où la lutte en coulisse est âpre pour les postes à la tête du Parti qui vont être redistribués dans le cadre de la première transition politique en dix ans en Chine.

"Je ne crois à rien de ce que j'entends", dit-il. "Il y a énormément d'accusations proférées contre Bo et son épouse, mais comment peut-on savoir si tout cela est vrai?", demande-t-il.

Le gouvernement a fait fermer des dizaines de sites internet, effacé des centaines de milliers de messages sur les microblogs et arrêté des internautes pour propagation de rumeurs. Sans pouvoir mettre fin aux spéculations sur la Toile.

Pour les analystes, le scandale autour de Bo Xilai a mis à mal l'image que le Parti veut donner de lui-même: uni comme un seul homme derrière ses dirigeants.

Il marque aussi la défaite de la faction néoconservatrice incarnée par le flamboyant néomaoïste Bo, et une victoire de ceux qui souhaitent la poursuite des réformes en matière d'économie et de société.

"Je crois qu'il pourrait y avoir plus de batailles à venir. L'arbre voudrait se tenir droit mais le vent ne veut pas s'arrêter de souffler", dit Li De, une femme d'affaires de 44 ans, citant un proverbe chinois.

"C'est bien possible. Mais que pouvons-nous faire? On ne peut que regarder" ce qui se passe, dit-elle, au sujet de la population.

Comme de nombreux Chinois, Yan Weilan s'attend à voir encore des rebondissements sensationnels alors que l'enquête sur le clan des Bo est toujours en cours.

"Ces choses-là arrivent rarement en Chine. D'habitude c'est plutôt en Occident", dit-elle.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités