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La semaine de Philippe Labro : le quotidien de Donald, l'année de Trump

Sur la une de Time, Trump prend son visage le plus forcené, sombre, déterminé. [Mary Altaffer/AP/SIPA]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

MARDI 20 DÉCEMBRE

Lorsque le célèbre magazine américain, Time, choisit son «man of the year» – homme de l’année –, il ne titre plus «homme» mais «personne de l’année», car la parité doit exister, surtout en Amérique. La «personne» en 2016 pour Time, cela ne vous surprendra pas, c’est Donald Trump.

Mais, sur la couverture, avec une photo où le terrible monsieur Trump prend son visage le plus forcené, sombre, déterminé, et convaincu qu’avec ses militaires et ses milliardaires, il triomphera de tous les obstacles qui se présentent devant tout nouveau président – sur la «une» donc, sous le nom de Trump, on peut lire cette définition : «Président des Etats-Désunis d’Amérique.» Les échos que je reçois de mes amis ou correspondants aux «Etats-Désunis» témoignent d’une sorte de tristesse fatale, récemment exprimée par Michelle Obama. Elle a dit : «L’Amérique est en train de plonger dans un manque total d’espoir.»

Il a répondu par un tweet, puisque voici un «président élu» qui néglige la presse traditionnelle et préfère communiquer en 140 signes. Dans les draps de satin doré du lit de son domaine doré du dernier étage doré de la «Trump Tower» dorée de New York, chaque nuit, Trump saisit son portable et émet sa pensée en 140 signes. Continuera-t-il ainsi lorsqu’il dormira à la Maison Blanche ? Il est probable que 2017 sera aussi surprenant que l’aura été 2016.

Les surprises, l’imprévisible, ont envahi nos vies plusieurs fois en 2016. Du Brexit à Trump, de Trump à Fillon, de Hollande à… quoi ? Nous nous som­mes tous trompés. Nous n’avions pas assez oublié le rationnel et pas assez pris en compte l’émotionnel, l’insatisfaction, la sourde colère de celles et ceux qui, dans toutes les démocraties, attendaient la possibilité d’exprimer leur frustration. Il faut dire ceci : si ces électeurs ont surpris, c’est grâce à leur vote, car telle est la vertu des démocraties, la liberté du choix. Quand Obama, la CIA et le FBI nous informent qu’il est probable que la victoire de Trump a été influencée par le travail souterrain des «hackers» d’origine russe, on frémit. Nous avons la chance de vivre dans des pays où nous pouvons changer notre destin avec l’usage de notre voix. Si la technologie la plus sophistiquée est capable de modifier l’usage même de cette voix, et donc de modifier nos destins, à quoi ressemblera le monde ? A quoi ressemblerons-nous ?

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MERCREDI 21 DÉCEMBRE

Les interrogations sur Trump ne pèsent d’aucun poids par rapport à la tragédie d’Alep, et je serais tenté, pour ma part, de nommer «personne de l’année» le réfugié syrien anonyme qui, son enfant dans les bras, court vers un autobus dont il espère qu’il le sortira de l’enfer des bombes et du sang. Sa femme le suit, un autre enfant dans les bras, un énorme sac de provisions et de vêtements sur le dos. Elle a le même visage perdu et effrayé que son mari. Des visages qui devraient nous faire honte.

VENDREDI 23 DÉCEMBRE

Pour changer complètement de registre, je finirai sur une recommandation. Je la dois à un article signé par Marie-Laure Delorme dans Le JDD du 18 décembre dernier. La journaliste consacre une page à la revue trimestrielle XXI. Cette fois-ci, cette dernière a demandé à vingt et un chercheurs, scientifiques et philosophes de livrer leur vision du monde. Le sens qu’on doit donner à sa vie. Notre consœur cite cette phrase qui résume ce que j’ai tenté de vous dire en cette ultime chronique de 2016 : «Le propre de l’humain est sa capacité à faire un choix, y compris au prix de sa vie.» Je vous souhaite un joyeux Noël et une bonne année.

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