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Procès Xynthia : retour douloureux sur les lieux du drame

Les dégâts engendrés par la tempête Xynthia, en février 2010. Les dégâts engendrés par la tempête Xynthia, en février 2010.[AFP/Archives]

Devant la pancarte blanche portant les noms de son mari de 60 ans et de son petit-fils de deux ans morts d'épuisement dans l'eau glacée lors de la tempête Xynthia, Elisabeth Tabary s'est réfugiée dans les bras d'un proche pour masquer sa douleur.

 

"C'est dur, mais j'ai appris à maîtriser. Vous savez, on baigne dedans, c'est dans la continuité... Vous voyez le temps qu'il fait aujourd'hui", lâchait-elle pourtant courageusement peu avant, en désignant jeudi après-midi le magnifique ciel bleu, au début de l'audience cruciale du tribunal des Sables-d'Olonne à la Faute-sur-mer (Vendée), où 29 personnes sont mortes le 28 février 2010.

Mais, au pied de la digue qui aurait dû les protéger, dans les anciennes ruelles autrefois bordées de coquets pavillons balnéaires désormais détruits et remplacés par une friche, Mme Tabary a dû faire face, sur un terrain nu, aux bandes de chantier tendues à un mètre du sol par des piquets pour figurer son ancienne maison. 

Et dans la ruelle, une simple petite pancarte blanche porte les noms de son mari et de son petit-fils, la plus jeune victime de la tempête. Des repères en PVC avec deux coudes ont été positionnés: l'un, jaune, indique la hauteur d'eau estimée et l'autre, rose, la hauteur de plafond de la maison. Les deux sont très proches.

Devant une autre maison où sont décédées une mère et sa fille de 81 et 60 ans, les repères jaune et rose sont au même niveau... Une autre femme ne peut contenir ses larmes. Elle est aussitôt réconfortée par un proche.

En guise d'audience, c'est un long cortège avec les magistrats en tête, suivis des parties civiles et des journalistes mélangés, qui s'étire sur plusieurs centaines de mètres. Certains discutent, d'autres observent un silence quasi religieux.

Le cortège arrive rue des Voiliers, un des lotissements qui a payé le plus lourd tribut. Devant la maison de la famille Bounaceur, la plus durement touchée, une plaque indique les âges des victimes: 73 ans, 43 ans, 13 ans, 4 ans... La hauteur d'eau estimée est à 10 cm du plafond.

 

"Ils étaient heureux"

"Je mesure 1m82, mon frère était plus petit que moi. Je ne vois pas comment il pouvait s'en sortir", murmure Jean-Loup Rousseau, frère de Patrice Rousseau décédé là avec son épouse Muriel, en montrant la hauteur d'eau dans la maison, bien au-dessus de sa tête. "Et je me pose la question... Si j'avais été là: est-ce que je m'en serais sorti?"

"Moi, je venais souvent chez ma fille et mon gendre et, là, je vois un tas de gravats... Ils habitaient là, ils étaient heureux", lâche, au bord des larmes, Nicole Rossignol, la mère de Muriel Rousseau. "Je savais que ça allait être assez compliqué, mais je voulais venir."

Peu avant le début de l'audience, des fleurs ont été déposées au pied de la stèle, installée au bout de la digue, sur laquelle ont été inscrits les noms des victimes.

"J'ai mis plus d'un an avant de pouvoir passer le pont" entre le commune voisine de L'Aiguillon-sur-Mer et La Faute-sur-Mer, explique Rémi Plaire, qui a perdu sa compagne et trouve "important" ce déplacement.

"Ça va aider les gens, ça fera sûrement partie des points qui nous aident à faire le deuil", ajoute-t-il. "Moi, il y a 15 jours, je n'aurais pas pu vous parler."

Depuis son témoignage, cet homme "sent qu'il y a une tension qui est tombée". "J'ai dormi presque deux nuits complètes, ça fait presque quatre ans et demi que ça ne m'était pas arrivé. Je pense que ça va beaucoup m'aider", confie-t-il. L'audience a duré une heure.

Cinq prévenus, dont l'ancien maire de la commune, René Marratier, comparaissent, principalement pour homicides involontaires, dans ce procès qui réunit plus de 120 parties civiles. Le procès doit durer jusqu'au 17 octobre, avant le jugement prévu le 12 décembre.

 

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