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Sur la plage de Pampelonne, les plagistes sur le pied de guerre

La plage de Pampelonne [Gérard Julien / AFP/Archives] La plage de Pampelonne [Gérard Julien / AFP/Archives]

La plage de Pampelonne, devenue à partir des années 50 une adresse touristique internationale avec le village voisin de Saint-Tropez, accueille chaque jour en haute saison 30.000 amoureux, loin d'imaginer qu'elle est l'objet d'une âpre bataille.

"C'est un massacre", décrit Ramon Lopez, président de l'Union départementale du Var pour la sauvegarde de la vie et de la nature qui regroupe des associations environnementales. "A chaque coup de mer, la dune s'érode. Bientôt il n'y aura plus de plage", dit-il.

A Pampelonne, plage du débarquement provençal voici 70 ans, se pressent une "jet-set" internationale arrivant en yacht ou Ferrari, mais aussi des familles anonymes. Ils choisissent entre sections publiques et 27 concessions privées aux ambiances variées.

"Les plagistes ont fait illégalement des constructions en dur, proposent plus que de la restauration légère et dépassent les surfaces octroyées", dénonce M. Lopez, critiquant "un Etat laxiste depuis des décennies".

Il y a près de vingt ans, l'anse de 4,5 km, bordée de caps naturels, d'une dune, de pinèdes et de vignes, fut classée "espace naturel remarquable", dans le cadre de la "loi littoral" de 1986. Un classement rare obtenu en justice par les associations environnementales, qui aurait dû rimer avec la disparition de tous les services de plage...

Un amendement d'un député varois a toutefois permis de maintenir une économie balnéaire, à certaines conditions inscrites dans un "schéma d'aménagement" de la commune de Ramatuelle, 2.200 habitants, où se trouve Pampelonne.

Ce schéma, qui a mis des années pour sortir du sable, prévoit de raser tous les bâtiments du domaine public maritime et de les reculer derrière la dune qui doit être reconstituée pour éviter l'érosion.

Une fois approuvé par l'Etat, il pourrait entrer en vigueur l'année prochaine, indique la mairie.

- 'Pôle mondial du tourisme' -

Jean-Claude Moreu, président des exploitants de la plage de Pampelonne, veut croire à un sursis de plusieurs années. Début juillet, les plagistes ont déposé un recours auprès du tribunal administratif.

"On ne va pas raser 27 établissements qui sont un pôle mondial du tourisme pour reconstruire une dune! L'érosion est due à des ruisseaux non canalisés", s'insurge-t-il.

En outre, les 27 lots deviendront 23, aux surfaces réduites, conformes au "décret plage" de 2006 régissant tout le littoral français. Il prévoit que 80% de la surface des plages naturelles soient libres en été et généralise le démontage des installations en hiver.

Actuellement 30% du linéaire et 21% de la surface du domaine maritime public sont occupés, deux chiffres qui doivent être ramenés à 20%.

Les prospères plagistes de Pampelonne génèrent un chiffre d'affaires de 40 millions d'euros, avec 900 emplois directs dont 200 emplois CDI, selon M. Moreu. "On n'est pas à Dunkerque!", résume-t-il, en jugeant absurde de démonter quand la saison dure d'avril à octobre.

Il est 16h00 dans le très prisé Club 55 et le propriétaire Patrice de Colmont place encore les convives qui attendent de déjeuner. Le restaurant, 1.000 couverts par jour, installé sur un terrain privé en arrière de la dune, n'est pas menacé. Le snack de la plage et ses transats pourraient l'être.

Le cabanon des parents de M. de Colmont avait servi en 1955 de cantine à l'équipe du tournage de "Et dieu créa la femme" avec Brigitte Bardot, qui fit exploser la fréquentation touristique.

"L'élite du monde entier vient ici. Ce décret plage, c'est comme la lame d'un bulldozer, il enlève l'humain, la vie. Pampelonne a réussi à préserver la nature et à être un outil économique colossal", lance Patrice de Colmont, dans le brouhaha.

En attendant le grand chambardement, les plagistes obtiennent des sous-concessions d'une année. Ils participeront ensuite à des appels d'offre de douze ans mais craignent d'être alors évincés par des groupes internationaux mieux disants.

"Les plagistes dramatisent. Ils disent que Pampelonne c'est eux mais certains vendent déjà des parts à des Russes", remarque le maire de Ramatuelle, Roland Bruno.

L'édile, obligé de se conformer à la loi, appelle dans le même temps à son assouplissement, au nom de l'activité économique, à l'instar de nombreux maires.

Du vieux village perché, on domine la presqu'île verdoyante de Saint-Tropez, préservée notamment par l'absence d'un boulevard de front de mer. Seules des petites routes en peigne permettent d'accéder à Pampelonne. "On ne veut pas faire de Ramatuelle un Ibiza", assure le maire.

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