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Brétigny : "Je pensais que c'était ma fin", un passager se souvient

Wagons enchevétrés après de déraillage du Paris-Limoges le 14 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives] Wagons enchevétrés après de déraillage du Paris-Limoges le 14 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]

Un an après, Manou N'Diaye fait encore des cauchemars. Il se souvient de la "peur intense" qui l'a envahi lorsque le train Paris-Limoges n°3657 dans lequel il voyageait a déraillé en gare de Brétigny-sur-Orge: "dans ma tête, je pensais que c'était ma fin", dit-il.

"Aujourd'hui, c'est quelque chose qui fait partie de ma vie, de mon quotidien", explique-t-il à l'AFP.

Ce 12 juillet 2013, cet auditeur juridique de 26 ans devait se rendre à Châteauroux pour passer le week-end chez ses parents. Samedi, il reviendra sur les lieux de la catastrophe participer à l'hommage rendu aux sept personnes décédées dans l'accident, l'un des pires survenus en France depuis une vingtaine d'années.

Des passagers du train Paris-Limoges blessés dans l'accident en attente de secours le 12 juillet 2014 à la gare de Brétigny-sur-Orge  [Kenzo Tribouillard / Pool/AFP/Archives]
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Des passagers du train Paris-Limoges blessés dans l'accident en attente de secours le 12 juillet 2014 à la gare de Brétigny-sur-Orge

En ce vendredi de départs en vacances, 385 personnes étaient à bord du Paris-Limoges. Elles quittaient la gare d'Austerlitz à 16h53 pour une arrivée prévue à destination à 20h05.

Mais à 17h11, alors qu'il aborde la gare de Brétigny, dans l'Essonne, le train déraille à 137 km/h. Deux voitures se retrouvent couchées sur les rails, une troisième balaie le quai sur lequel attendent de nombreux voyageurs. Six personnes meurent sur le coup, une septième victime décèdera seize jours plus tard.

"J'étais en train de travailler sur mon ordinateur et j'ai entendu un +boum+ inquiétant. J'ai ressenti un saut puis le train s'est mis à tanguer, gauche-droite-gauche, avant de se coucher complètement sur le flanc", raconte Manou N'Diaye.

Les vitres se brisent, les bagages valsent, les passagers sont éjectés de leur siège. A la force des bras, il parvient à s'accrocher à un accoudoir alors que ses jambes flottent dans le vide. "J'ai vu une personne tomber et se faire happer sous le train. A ma droite, il y avait un enfant qu'on ne retrouvait plus. Une image me reste gravée, celle d'une femme âgée dont le bras avait été complètement déchiqueté par les éclats de verre".

Il se rappelle aussi la fumée, l'odeur du ballast et un bruit "à glacer la sang".

 

- 'Terreur totale' -

 

Jean-Robert Baroux était également dans le train ce jour-là, à l'avant du dernier wagon. Il n'a pas été blessé mais reste traumatisé par ce qu'il a vécu. Aujourd'hui, il ne prend plus le train et a encore beaucoup de mal à prendre le métro.

Wagons enchevétrés après le déraillage du Paris-Limoges le 12 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge [- / AFP/Archives]
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Wagons enchevétrés après le déraillage du Paris-Limoges le 12 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge

"Hormis les 22 secondes de terreur totale qu'on a pu avoir pendant le déraillement, après je suis sorti par l'avant du wagon et je me suis retrouvé sur le quai qui était complètement submergé de gravas et de ferraille, et j'ai vu deux personnes", raconte-t-il. "En m'approchant d'elles, j'ai vu qu'elles étaient décédées et enchevêtrées dans la ferraille… C'est une image qui me restera à vie".

Le capitaine des pompiers Clémentine Seira était de garde en cette journée "très tranquille". C'est elle qui a géré les premiers appels reçus au 18 et au 112. "Vers 17h15, tous les téléphones ont sonné en même temps. En quelques secondes, ça nous est tombé d'un coup", dit-elle.

Lorsqu'il arrive à la gare, Christian Sureau, le premier commandant des opérations de secours présent sur les lieux, est étonné par le "calme extrême" qui y règne. "Des gens ensanglantés se rassemblent sur le parvis. Il n'y a pas de cris, les gens patientent en attendant les secours", se souvient ce pompier de 55 ans.

"On se prépare toujours à ces événements-là, on sait que ça arrivera un jour ou l'autre dans notre carrière. Mais c'est parfois des situations insoutenables, il faut se transcender, aller chercher dans les tripes".

Déraillage du Paris-Limoges le 12 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge [Kenzo Tribouillard / AFP/Archives]
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Déraillage du Paris-Limoges le 12 juillet 2014 en gare de Brétigny-sur-Orge

mmédiatement après le drame, les témoins évoquent des "scènes apocalyptiques", des "images de guerre". Mais au milieu de ce chaos, le commandant Sureau se souvient surtout de la "grande solidarité" qui s'installe entre voyageurs. "Les plus valides aidaient les plus blessés", dit-il. "Et ce qui m'a frappé, c'est que les gens voulaient absolument récupérer leurs bagages".

Un an après, le conducteur du train, dont les "réflexes extraordinaires" avaient été loués par les autorités, reste "très affecté", selon une source proche du dossier. Il est suivi psychologiquement et n'a toujours pas repris le travail. Contacté par l'AFP, il n'a pas souhaité s'exprimer.

 

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