En direct
A suivre

Hollande fait du chômage longue durée une "cause nationale"

François Hollande sur le perron de l'Elysée, le 8 juillet 2014 [Thomas Samson / AFP] François Hollande sur le perron de l'Elysée, le 8 juillet 2014 [Thomas Samson / AFP]

Ils sont plus de 2 millions, un chiffre inédit: François Hollande a érigé lundi en "cause nationale" les chômeurs de longue durée, sans toutefois annoncer de mesures pour désamorcer cette bombe sociale à retardement.

 

Symptôme de la violence et de la longueur de la crise, 2,13 millions de demandeurs d'emploi, en incluant ceux ayant une petite activité, pointent à Pôle emploi depuis plus d'un an (+10,3% sur un an, une véritable explosion). Parmi eux, plus de 636.000 sont inscrits depuis plus de trois ans (+17,7% sur un an).

Lundi, au premier jour de la 3e conférence sociale, à laquelle le boycott de plusieurs syndicats a donné un goût d'échec, le chef de l'Etat a fait de ce fléau une "cause nationale", renvoyant la balle au patronat et aux syndicats qui devront ouvrir une négociation sur ce sujet.

Une feuille de route "sera préparée par le ministre du Travail", dans l'objectif de "favoriser l'embauche des chômeurs de longue durée". "Cela pourrait être une contrepartie au pacte de responsabilité", a ajouté François Hollande.

"C'est à voir, l'emploi sera une conséquence de la compétitivité et de la confiance", lui a répondu Pierre Gattaz, le président du Medef, qui refuse de prendre des engagements en échange des 40 milliards d'euros d'aides du pacte.

Jacques Freyssinet, président du conseil scientifique du Centre d'études de l'emploi, "ne voit pas très bien ce qui peut sortir d'une négociation". "On restera dans le déclaratif: le patronat n'acceptera aucun engagement quantitatif et se cantonnera à des engagements moraux", dit-il.

"Plus le marché de l'emploi est déséquilibré, plus les employeurs sont sélectifs: il n'ont aucun intérêt à employer des publics qui ont perdu toute discipline de travail", explique-t-il. "Sauf si on leur accorde des avantages substantiels, type contrats aidés."

Le Conseil d'orientation pour l'emploi estimait en 2011 qu'un chômeur de longue durée a "environ deux fois moins de chances de reprendre un emploi qu'un autre demandeur d'emploi".

 

'Réapprendre à se lever' 

"Les partenaires sociaux vont dire que +c'est à l'Etat de s'en occuper+", pronostique Jean-Pierre Revoil, ex-directeur général de l'Unédic (assurance chômage).

La crise date de 2007-2008, rappelle-t-il. "Au fil des années, on voit se superposer des couches de chômeurs de plus en plus en difficulté", s'alarme M. Revoil, également bénévole pour l'association Solidarités nouvelles contre le chômage (SNC).

Manifestants contre le chômage et l'austérité à Marseille, le 12 avril 2014 [Bertrand Langlois / AFP/Archives]
Photo
ci-dessus
Manifestants contre le chômage et l'austérité à Marseille, le 12 avril 2014

 

Le phénomène est "très grave pour la société", poursuit-il. "Une fois que l'indemnisation chômage est terminée (2 ans maximum, 3 pour les seniors), se pose la question de la survie de ces populations qui passent à la charge de l'Etat ou des régions. Derrière, il y a aussi les problèmes de dégradation de santé, mentale et physique." Il évoque également le "développement du travail non-déclaré".

"Passé un an de chômage, on perd pied, il faut même réapprendre à se lever", témoigne Corinne Conquet, 46 ans, qui "retrouve confiance" grâce à une formation d'assistante.

La relance de l'alternance, sur laquelle François Hollande a insisté lundi, devrait figurer au coeur de la feuille de route que le gouvernement va confier aux partenaires sociaux.

Le ministre du Travail François Rebsamen a évoqué le projet d'adapter le contrat de professionnalisation, très peu utilisé par les seniors (2,6% des entrées concernaient des plus de 45 ans en 2012). Reste que, là encore, se posera le problème des employeurs, qui affichent une désaffection pour l'alternance (-8% d'entrées en apprentissage en 2013).

François Rebsamen entend aussi faire bénéficier 80.000 chômeurs de longue durée supplémentaires d'un accompagnement renforcé par Pôle emploi d'ici à la fin de l'année. Sans octroyer de moyens supplémentaires à l'opérateur public.

Depuis l'élection de François Hollande en mai 2012, la France compte près d'un demi-million de nouveaux demandeurs d'emploi sans activité. Lui-même a estimé début mai que, sans baisse du chômage, il n'aurait pas la crédibilité nécessaire pour briguer un second mandat en 2017.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités