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Le PS tiraillé sur son bilan de 10 ans d'opposition

Le Premier ministre PS Manuel Valls à Gasny près de Paris, le 27 juin 2014 [Dominique Faget / AFP] Le Premier ministre PS Manuel Valls à Gasny près de Paris, le 27 juin 2014 [Dominique Faget / AFP]

Le Parti socialiste n'a-t-il vraiment pas assez travaillé pendant ses dix dernières années d'opposition (2002-2012), comme le suggère Manuel Valls ces dernières semaines? Vrai et faux, répondent des socialistes et des spécialistes du parti.

"Nous devons nous réinventer. Et nous réinventer dans un contexte particulier: l'exercice du pouvoir, faute de l'avoir fait dans l'opposition", lâchait le Premier ministre Manuel Valls mi-juin devant les socialistes lors de son premier Conseil national (parlement du parti). Quelques jours plus tard, devant les députés, il se livrait à une autocritique du mouvement, affirmant: "l'antisarkozysme entre 2007 et 2012 ne pouvait pas suffire de politique, parce que les Français attendent autre chose que les oppositions stériles qui mènent précisément le pays dans l'impasse".

"Bien entendu, le PS aurait dû ne pas se contenter de s'opposer et mieux se préparer, on le paie aujourd'hui", confie à l'AFP un conseiller à Matignon.

Mais il est "excessif de dire que rien n'a été préparé, même si tout n'est pas faux", tempère Frédéric Sawicki, professeur de science politique à l'Université Paris I, spécialiste du PS.

"De 2002 à 2008-2009, le PS a été traversé par de nombreux conflits avec des enjeux forts liés à la présidentielle ou liés à l'Europe (le traité de 2005, ndlr) et le parti n'a pas vraiment fait un travail d'analyse en profondeur de l'échec de Lionel Jospin", affirme-t-il.

L'ancien Premeir secrétaire du PS Harlem Désir, le 25 août 2013 à La Rochelle [Xavier Leoty / AFP/Archives]
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L'ancien Premeir secrétaire du PS Harlem Désir, le 25 août 2013 à La Rochelle

"A partir de 2008, on a vu le PS mettre en oeuvre un vrai travail d'élaboration programmatique", estime-t-il. "Mais le problème c'est que l'élection ouverte qu'a été la primaire a percuté ce travail programmatique et que le candidat vainqueur s'est cru autorisé à prendre ses distances avec le travail du parti".

Pour Christophe Caresche, député "réformiste" (aile "droite" du PS), le parti n'a pas travaillé à "concilier les orientations contradictoires" qui traversent le parti depuis longtemps, à savoir, à ses yeux une ligne +réformiste+ qui essaie d'inscrire les choses dans la réalité économique et dans la mondialisation et une ligne extrêmement forte - qui s'est radicalisée - de refus d'un certain nombre de compromis et d'une certaine réalité".

"Dans l'opposition, on a masqué nos différences de lignes car chacun avait intérêt à avancer ensemble pour gagner", poursuit-il.

"Maintenant, les ambiguïtés explosent parce qu'au pouvoir, on est obligés de faire des choix", ajoute-t-il, faisant référence aux tensions qui opposent les députés "frondeurs" à l'exécutif sur le Pacte de responsabilité.

"On n'applique pas ce qu'on avait dit qu'on ferait"

Pour le politologue Stéphane Rozès (président de Conseils, analyses, perspectives), "la gauche s'est racontée pendant des années que son échec en 2002 était de la faute des autres, mais elle n'a pas réfléchi à la question de savoir si son modèle social et républicain était adapté au monde en mutation". "Une fois au pouvoir, la gauche est désarçonnée".

Le député Jean-Marc Germain, s'inscrit en faux contre ces arguments: "à partir de 2009, on a travaillé, de manière très approfondie", estime celui qui fut le directeur de cabinet de Martine Aubry lorsque celle-ci était première secrétaire du parti.

Le Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadelis à Paris lors d'une conférence de presse, le 25 mai 2014 [françois Guillot / AFP/Archives]
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Le Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadelis à Paris lors d'une conférence de presse, le 25 mai 2014

"On a fait 13 forums, et trois grandes conventions - l'une sur l'égalité (l'école, les services publics...), l'une sur le modèle de développement, qui avait défini le modèle de productivité, la mutation écologique et une sur l'international", énumère-t-il. "On a profondément refondé nos idées. Le problème, c'est qu'actuellement, on n'applique pas ce qu'on a dit qu'on ferait", dit ce député qui appartient au mouvement des "frondeurs".

"Le travail a été fait, nous avons créé les conditions d'une opposition qui a gagné les élections locales et qui a préparé (et remporté) les élections présidentielles", déclarait récemment sur un plateau télé Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire.

"Valls, il ne faut pas qu'il exagère", cingle Guillaume Balas, l'un des représentants de l'aile gauche du parti ("Un monde d'avance"). "Sur certains sujets comme les aides aux entreprises, on avait fait un vrai travail, mais on ne fait pas ce qu'on avait préconisé". Et de renvoyer la balle dans l'autre camp: "le PS n'a jamais réglé ses contradictions avec l'aile droite".

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