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Euthanasie : Nicolas Bonnemaison devant les assises à Pau

Le docteur Nicolas Bonnemaison, le 13 septembre 2011, à la sortie du palais de justice de Pau [Pierre Andrieu / AFP/Archives] Le docteur Nicolas Bonnemaison, le 13 septembre 2011, à la sortie du palais de justice de Pau [Pierre Andrieu / AFP/Archives]

L'urgentiste de Bayonne Nicolas Bonnemaison, comparaît mercredi devant les assises des Pyrénées-Atlantiques à Pau, accusé d'avoir abrégé la vie de sept patients âgés, des actes assumés, qui entraineront certainement devant la cour un débat plus vaste sur la fin de vie.

Le médecin de 53 ans, qui comparaît libre sous contrôle judiciaire, est poursuivi pour "empoisonnement sur personnes particulièrement vulnérables", cinq femmes et deux hommes en fin de vie, hospitalisés dans une unité du service des urgences de l'hôpital de Bayonne et décédés peu après leur admission, entre mars 2010 et juillet 2011. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité.

L'affaire avait éclaté le 10 août 2011, lorsque l'urgentiste avait été placé en garde à vue, dénoncé par des infirmières et une aide-soignante. D'abord mis en examen pour les cas de quatre patients le 12 août 2011, il a été mis en cause en janvier 2012 pour trois autres décès.

Nicolas Bonnemaison, décrit comme un professionnel "compétent", "à l'écoute", est accusé d'avoir administré à ces patients en fin de vie des médicaments hors du protocole de soins et sans recourir à l'avis d'autres médecins. Il aurait utilisé de l'Hypnovel, un puissant psychotrope, et au moins une fois du Norcuron, à base de curare, substance entraînant la paralysie des muscles respiratoires utilisée en anesthésie-réanimation.

"Certes j'ai utilisé des médicaments, pas dans l'intention de donner la mort, mais pour abréger les souffrances des patients en fin de vie. Il n'a jamais été dans mon propos de les utiliser dans une intention létale", avait déclaré l'urgentiste en septembre 2011 lorsque la justice avait été appelée à trancher sur son maintien en liberté.

L'urgentiste, radié depuis par le Conseil national de l'Ordre des médecins, avait alors indiqué s'être "toujours attaché à communiquer avec les familles". "Souvent, cela se fait dans un regard, dans une poignée de main", avait-il dit, tout en se défendant d'être un "militant de l'euthanasie".

- "Incompréhensible" -

A ce jour, aucune famille de victime n'a porté plainte. Seul le fils et la belle-fille de l'une d'entre elles se sont constitués partie civile, se disant choqués par le comportement du Dr Bonnemaison. Ils auraient appris, après l'ouverture de l'enquête, qu'il aurait "parié" au sein de son service sur l'espérance de vie de leur parente, âgée de 86 ans et plongée dans le coma.

Patricia Dhooge, l'épouse de Fernand Dhooge, 67 ans, atteint d'un cancer depuis des années et lui aussi dans le coma, témoignera pour sa part en faveur de Nicolas Bonnemaison, dont elle juge la mise en cause "incompréhensible". "Il n'y a pas eu ces mots, mais les choses étaient pourtant claires", déclarait-elle en mai au quotidien Sud Ouest.

Parallèlement, un rapport de l'Inspection générale des Affaires sociales (Igas) avait établi que l'unité d'hospitalisation de courte durée (UHCD) où travaillait le praticien connaissait des "dysfonctionnements ponctuels" avec des "problèmes de flux de patients", qui y séjournaient trop longtemps.

Le Dr Bonnemaison avait évoqué en septembre 2011 une "dérive" dans l'organisation de ce service, ouvert 24/24H à partir de février 2011, "avec l'arrivée de patients qui n'avaient rien à (y) faire".

Ce procès intervient en plein débat sur l'opportunité d'une réforme de la loi Leonetti du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie. François Hollande promet depuis la campagne présidentielle de 2012 une nouvelle loi pour "compléter, améliorer" le texte. L'affaire divise aussi le corps médical et une pétition en faveur de Nicolas Bonnemaison a recueilli 60.000 signatures.

Selon une étude récente de l'Institut national d'études démographiques (INED), il y aurait chaque année en France quelque 3.000 cas d'euthanasie. En Belgique, où l'euthanasie est autorisée depuis 2002, 1.800 personnes ont opté pour cette fin de vie en 2013. Elles ont été 4.000 en 2012 au Pays-Bas, où la loi a été votée en 2001.

En 2003, Christine Malèvre, infirmière à l'hopital de Mantes-la-Jolie (Yvelines) avait été condamnée à douze ans de réclusion criminelle pour l'assassinat de six de ses patients. Elle avait invoqué des "gestes euthanasiques" envers des malades incurables. Le procès est prévu jusqu'au 27 juin.

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