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Paris veut restaurer sa crédibilité budgétaire

Le ministre des Finances Michel Sapin le 3 avril 2014, à Paris [Eric Piermont / AFP/Archives] Le ministre des Finances Michel Sapin le 3 avril 2014, à Paris [Eric Piermont / AFP/Archives]

Restaurer sa crédibilité budgétaire en Europe, en espérant que la croissance suive et que les marchés jouent le jeu: le pari du gouvernement français est osé, selon les économistes.

Le ministre des Finances Michel Sapin a répété mercredi, en présentant les orientations budgétaires de la France jusqu'en 2017, que la promesse de ramener le déficit public sous le seuil de tolérance européen de 3% du Produit intérieur brut en 2015 n'était ni du "fétichisme" ni de la "soumission".

Pourtant l'effet d'annonce est important. Il n'y a pas si longtemps, il parlait de "discuter" du "rythme" du rétablissement des finances publiques françaises, sachant que Paris a déjà bénéficié de deux délais pour revenir à 3%.

Mercredi, il a fait de cette promesse un "enjeu de crédibilité pour peser en Europe", face notamment à une Allemagne dont les comptes publics sont déjà excédentaires, et l'a jugée, devant la commission des Finances de l'Assemblée "essentielle pour garder un taux d'emprunt bas pour la France".

 

- Ni fétichisme ni soumission -

 

Pour "tenir" l'objectif, Paris mise sur son plan d'économies de 50 milliards d'euros au total d'ici 2017. L'effort en 2014 doit être augmenté de 4 milliards d'euros pour réduire le déficit public à 4,3% dès cette année puis à 3% l'an prochain, soit une décélération spectaculaire.

Le tout sans casser la reprise, puisque Paris voit la croissance à 1% cette année puis 1,7% en 2015, et 2,25% les deux années suivantes.

Une accélération jugée optimiste par le Haut conseil des finances publiques, organe indépendant qui vérifie la crédibilité des projections. Pour lui, la baisse des dépenses pourrait au final "peser davantage que prévu par le gouvernement sur la croissance".

"Un effet immédiat sur la conjoncture est inéluctable", estime Olivier Passet, économiste de la société Xerfi, pour qui "le gouvernement a lui-même mis en place des amortisseurs", en faisant un geste fiscal pour les revenus modestes et en baissant les cotisations pour les entreprises.

Reste que M. Passet "ne voit pas comment tenir en même temps le calendrier de la baisse des dépenses, des impôts et des déficits", "à moins d'un petit miracle sur la croissance" et sur l'épargne, qui pourrait être libérée afin d'adoucir l'effet des économies. Mais, rappelle-t-il, le taux d'épargne en France est "désespérément stable".

 

- Une fenêtre de tir étroite -

 

Pour Frederik Ducrozet, économiste de Crédit agricole CIB, la France bénéficie néanmoins d'une "fenêtre de tir très étroite" grâce à la bienveillance des marchés.

Le programme de stabilité du gouvernement [I. De Véricouurt/A.Bommenel / AFP]
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Le programme de stabilité du gouvernement

En effet, rappelle-t-il, Paris emprunte depuis plusieurs mois à des taux très bas, d'un peu plus de 2% à 10 ans.

Et de manière générale, le contexte financier est favorable en Europe, comme le montrent les tests réussis sur le marché par la Grèce et le Portugal.

"Il faut se préparer à l'idée que ce facteur de taux bas pourrait disparaître", obligeant à encore plus d'efforts, selon M. Ducrozet. "Et pour une fois, le gouvernement le sait".

Michel Sapin a prévenu mercredi que "un demi point de taux d'intérêt en plus sur la dette française cela représenterait 10 milliards d'euros de charges supplémentaires", avec le risque d'"effacer en quelques semaines des années entières d'économies et d'efforts".

Ce volontarisme affiché à Paris séduit jusque dans les colonnes du Financial Times. Mercredi, l'économiste Huw Pill de Goldman Sachs y écrit: "Il y a du changement dans l'air en France, bien plus que beaucoup ne veulent l'admettre. Si vous cherchez une menace de grande ampleur pour la zone euro ces prochaines années, ce n'est pas là qu'elle est".

 

 

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