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Plans sociaux : la réforme a fait chuter le nombre des litiges

Un conflit social emblématique à la Samaritaine, le grand magasin parisien, le 11 aout 2005 [Mehdi Fedouach / AFP/Archives] Un conflit social emblématique à la Samaritaine, le grand magasin parisien, le 11 aout 2005 [Mehdi Fedouach / AFP/Archives]

Les plans sociaux sont moins souvent contestés depuis la réforme des procédures de licenciement collectif en 2013. Mais le plan récemment annulé chez Call Expert ou la décision Heinz attendue mardi montrent que des voies de recours demeurent. Tour d'horizon des nouvelles règles et pratiques:

 

1 - Qu'a changé la loi sur la sécurisation de l'emploi de juin 2013?

Elle a créé un "cadre rassurant" pour les entreprises, selon le Medef.

Désormais, pour mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), l'accord de l'administration est nécessaire et "les contestations ne peuvent plus intervenir qu'à la fin de la procédure", explique Etienne Pujol (cabinet Granrut).

Marathons judiciaires (Samaritaine, Lu) et "rafales de référés en cours de procédure" ne sont plus possibles, souligne Jean Martinez, avocat et chargé d'enseignement en droit du travail.

Du côté des salariés, la CGT, qui n'avait pas signé l'accord sur l'emploi de janvier 2013 ayant inspiré la réforme, déplore un "cadenassage" des possibilités d'agir pour bloquer ou amender les PSE.

A l'issue de la phase d'information-consultation, les comités d'entreprise (CE) "ne peuvent plus refuser" de donner leur avis pour bloquer les projets: "cette loi est catastrophique pour les droits des salariés", juge ainsi Claude Levy, responsable CGT des hôtels de prestige.

Seulement 5% des plans sont contestés, affirme le ministère du Travail, soit quatre à six fois moins qu'auparavant.

 

2 - Que contrôle l'administration?

 

La légalité du plan et son contenu. Son contrôle est réputé plus strict lorsque le PSE a été élaboré unilatéralement par l'entreprise.

Lorsqu'un accord majoritaire a été négocié avec les syndicats (un cas sur deux), il est plus léger.

L'administration n'examine pas la raison d'être économique, qui reste contestable individuellement, par chaque salarié, aux Prud'hommes, une fois le licenciement prononcé.

Une nouvelle affaire "Viveo" - cette affaire avait fait trembler les patrons, en 2011, lorsque la cour d'appel de Versailles avait annulé le plan social de l'éditeur de logiciels, faute de justification économique, avant d'être rappelée à l'ordre par la cour de cassation, en 2012 - n'est "en principe" plus possible, selon Me Martinez, avocat de Viveo.

 

3 - Des recours collectifs contre les PSE sont-ils encore possibles?

 

Oui. Mais le juge compétent est désormais le juge administratif.

Ces derniers mois, les recours en référé engagés devant les tribunaux de grande instance (Ricoh, Lutetia, Canon) ont tourné court: le juge judiciaire a renvoyé vers le tribunal administratif (TA).

Reste encore la possibilité de "faire condamner pénalement l'employeur pour délit d'entrave au CE" mais c'est sans conséquence sur le processus, constate M. Levy.

Les délais ont été strictement encadrés: s'il est saisi dans les deux mois, le TA a trois mois pour statuer. Comme la cour administrative d'appel et, en dernier ressort, le Conseil d'Etat.

 

4 - Un tribunal administratif peut-il annuler un PSE?

 

Il peut annuler le feu vert administratif. C'est arrivé à plusieurs reprises: par exemple dans le cas d'une clinique en faillite de Seine-Saint-Denis, en décembre, parce que les personnels n'avaient pu faire intervenir un expert. Ou encore, en février, en Champagne-Ardenne, pour le plan du fabricant de portes de garage ODCF-Wayne Dalton, en raison de mesures d’accompagnement insuffisantes.

Plus récemment, et pour la première fois devant une cour administrative d'appel, c'est l'aval aux licenciement des 100 salariés du centre d'appel Call Expert Languedoc qui a été annulé, au motif que le CE avait été "privé" d'informations sur la situation économique du groupe.

Dans tous ces cas, il s'agissait d'entreprises en liquidation, une réintégration des salariés n'était donc plus possible mais les salariés ont droit à six mois d'indemnités si les jugements deviennent définitifs.

Pour le fabricant de ketchup Heinz, le jugement au fond est attendu mardi. En février, le TA de Cergy-Pontoise avait suspendu en référé la décision de l'administration. Dans ce cas d'une entreprise viable économiquement, la conséquence d'une annulation est la réintégration ou à défaut au moins 12 mois de salaires.

Le nombre de PSE n'a pas augmenté depuis la réforme. Proche du millier en 2013, il y en avait entre 900 et 1.200 par an depuis 20 ans.

 

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