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Dieudonné rejoue le même spectacle, un peu modifié

Le public le 13 janvier 2014 à l'entrée de la "Main d'Or" à Paris  [Patrick Kovarik / AFP] Le public le 13 janvier 2014 à l'entrée de la "Main d'Or" à Paris [Patrick Kovarik / AFP]

Dieudonné a donné lundi soir à Paris un spectacle présenté comme nouveau, après avoir été interdit de scène pour ses sorties antisémites, mais qui reprend entièrement la trame du précédent en l'expurgeant des attaques les plus frontales contre les Juifs, a constaté l'AFP.

 

Sous haute surveillance, le polémiste a présenté devant des fans "Asu Zoa", aux sketches quasi identiques à ceux de "Le Mur" interdit dans plusieurs villes, a constaté un journaliste de l'AFP qui a pu voir les deux versions du spectacle à une dizaine de jours d'intervalle.

Dans "Asu zoa", le maréchal Pétain n'est plus le président préféré de Dieudonné. Le personnage du tirailleur sénégalais ne demande plus "pardon" à Hitler. Le journaliste de France Inter Patrick Cohen est évoqué, mais sans les références aux chambres à gaz qui avaient choqué et mobilisé notamment le ministère de l'Intérieur.

De la même façon, Dieudonné ne dit plus "Je n'ai pas à choisir entre juifs et nazis, je suis neutre dans cette affaire", un des passages choc du spectacle Le Mur. "Je n'étais pas né, qu'est-ce qu'il s'est passé? Qui a volé qui? J'ai ma petite idée...", a aussi disparu de la nouvelle version. "L'holocauste nous a coûté un bras" n'apparaît plus.

La façade du théatre "La Main d'Or" à Paris, photographiée le 11 janvier 2014, avec une affiche du spectacle interdit pour antisémitisme "Le Mur" [Alain Jocard / AFP]
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La façade du théatre "La Main d'Or" à Paris, photographiée le 11 janvier 2014, avec une affiche du spectacle interdit pour antisémitisme "Le Mur"
 

Le décor est le même, avec un mur en parpaings qui coupe la scène en deux, mais si Dieudonné fait toujours mine d'uriner, ce n'est plus sur le Mur des lamentations comme il le disait avant. Les rires d'une grande partie du public au moment de cette disparition soudaine montre d'ailleurs que beaucoup de ses fans avaient déjà vu son spectacle précédent.

La salle, pleine à craquer, a montré son soutien au polémiste, l'acclamant debout à la fin de la représentation. Au lieu de "Shoananas", une chanson d'Annie Cordy détournée pour ridiculiser la Shoah, "Asu Zoa" se termine sur une chanson dans laquelle Dieudonné et le public "glissent" une "quenelle" à "François" Hollande, sur l'air du chant des partisans.

Le "nouveau" spectacle dure 1h10, quelques minutes de moins que "Le Mur".

 

"Pas le temps, d'autres choses à faire"

 

Si les charges antisémites les plus dures ont disparu, les Juifs restent présents. "Je ne suis pas antisémite, personne dans cette salle n'est antisémite. Parce qu'on n'a pas envie, on n'a pas le temps, on a d'autres choses à faire", dit Dieudonné dans Asu Zoa. Le sketch mettant en scène Manuel Valls à genou dans le bureau d'Alain Jakubowicz, le président de la Licra, est toujours là.

Dieudonné M'bala M'bala au théâtre de sa Main d'or à Paris lors de la conférence du 11 janvier 2014 [Alain Jocard / AFP/Archives]
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Dieudonné M'bala M'bala au théâtre de sa Main d'or à Paris lors de la conférence du 11 janvier 2014
 

Après avoir interdit les représentations du Mur à Paris samedi, dimanche et lundi, la préfecture de police de Paris avait autorisé la représentation lundi soir d'Asu Zoa, estimant qu'il s'était écoulé un "délai raisonnable" depuis que Dieudonné avait annoncé travailler sur un nouveau spectacle. Elle avait aussi pris acte de son engagement public de "ne pas réitérer des propos contraires à la dignité de la personne humaine".

La préfecture avait toutefois prévenu que si des propos "tombant sous le coup de la loi venaient à être tenus" lors de ce nouveau spectacle, "toutes les conséquences en seraient tirées tant au plan judiciaire qu'administratif".

Après les interdictions, validées par le Conseil d’État, d'une série de représentations du "Mur" en France, Dieudonné avait annoncé samedi qu'il renonçait à ce spectacle pour se consacrer à "Asu Zoa", un titre qui signifie "la face de l'éléphant" en langue Ewondo du Cameroun. L'artiste controversé avait déclaré que le show évoquerait "la position de l'Afrique dans le monde, son histoire" et les "ancêtres" de Dieudonné, né il y a 47 ans d'un père camerounais et d'une mère bretonne.

Lundi, Manuel Valls s'était dit "sceptique" sur les "remords soudains" de Dieudonné, condamné à plusieurs reprises pour antisémitisme. Mais le ministre de l'Intérieur, en pointe dans l'offensive gouvernementale contre le polémiste, avait souligné que "s'il s'agit d'un spectacle complètement nouveau dans lequel il n'y a pas de propos racistes ou antisémites, oui, il peut avoir lieu".

L'Union des étudiants juifs de France (UEJF) est pour sa part "dubitative sur cette volte-face et remarque que Dieudonné continue de diffuser sur Internet des messages vidéos racistes et antisémites via sa chaîne Youtube", écrit-elle dans un communiqué diffusé dans la nuit de lundi à mardi.

 
 

D'autres ennuis attendent Dieudonné, qui est sous la menace d'une éventuelle expulsion de ce théâtre parisien qu'il loue depuis 1999. Judiciairement il fait également l'objet d'enquêtes sur des soupçons d'organisation frauduleuse de son insolvabilité et de blanchiment d'argent.

 

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