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Quels sont les vrais risques d'inondations en France ?

Depuis 60 ans la France n'a pas connue d'inondations digne de ce nom selon les spécialistes.[RAYMOND ROIG / AFP]

Les inondations meurtrières continuaient mardi de menacer l'Europe centrale et l'Allemagne en particulier. Si la France devrait être épargnée par la catastrophe, le pays n'est pas à l'abri d'inondations destructrices dans les prochaines années, même si les pouvoirs publics y travaillent.

Qui se souvient des dramatiques crues de la Loire en 1856 ? Qui imagine deux petites secondes les effets d'une crue centennale de la Seine à Paris comme en 1910 ? Pas grand monde. Et pourtant, nous avons tous en mémoire les inondations du Var en 2010 ou bien du Rhône en 2003 qui se sont révélées dramatiques à la fois sur le plan humain et matériel.

Les crues torrentielles du Var avaient pour mémoire causé la mort de 25 personnes, tandis que celles du Rhône et de ses affluents 10. Quant aux coûts de ces catastrophes, ils ont été respectivement estimés à 1 et 1,5 milliards d'euros.

Oui mais voilà, météorologues et prévisionnistes assurent que ces deux dernières crues sont de petits phénomènes.

 

Des crues ridicules depuis 60 ans ?

Difficile alors d'imaginer les conséquences d'une crue centennale en France. D'autant plus que le pays n'aurait selon les spécialistes pas connu "de crues exceptionnelles généralisées" depuis 60 ans. Les derniers événements majeurs datent d'avant la seconde guerre mondiale selon eux et les plus marquants du XIXe siècle. En somme nous n'avons rien vu.

Et pourtant, en 2012, selon le ministère de l'Environnement, 18,5 millions d’habitants étaient exposés au risque d’inondations en France. Soit tout de même près de 30% de la population. Dans le même ordre d'idée, 9 millions d’emplois seraient exposés aux débordements de cours d’eau. De tels cataclysmes auraient indéniablement de lourdes répercussions économiques.

 

30 milliards : la facture d'une crue comme celle de 1910

Prenons un exemple. Tous les Parisiens ont en tête la crue centennale de la Seine en 1910. Avec ses 8,62 mètres enregistrés à son pic contre 2,50 mètres en temps normal, elle avait paralysé la capitale pendant près de trois mois. Si la même crue survenait aujourd'hui, la facture serait particulièrement salée : entre 30 à 40 milliards d’euros. Des réseaux de transport en piteux état, l’électricité coupée et des télécommunications à l'arrêt, à l'heure de la décrue, les dégâts seraient considérables. C'est bien simple la France perdrait plus d' un point de PIB.

C'est que depuis les crues du XIXe et du XXe passées à la postérité grâce à des traits gravés sur les maisons pour indiquer l'incroyable record, la France a bien changé. Pendant ces décennies de "repos hydrologique", le développement urbain s'est intensifié. Ainsi, dans la région Centre, ce sont désormais 12% de la population qui serait exposée à une crue de la Loire, soit plus de 300.000 habitants au bas mot. En Ile-de-France, il s'agirait de 4 à 5 millions de personnes.

 

Paris presque protégé

Mais les pouvoirs publics ne sont pas non plus restés les bras croisés pendant toutes ces décennies. Paris serait aujourd'hui en mesure d'absorber une crue comme celle de 1910 assure la Marie de Paris.

Oui, mais les instances européennes qui ont analysé toutes les crues majeures récentes des pays européens ont constaté qu'à chaque fois elles dépassaient le record précédent. Aussi une directive européenne préconise d'établir les risques d'une crue en majorant de 15% les effets de la pire des inondations connues.

Et là, la Mairie de Paris précise laconiquement que c'est sur cette hypothèse que travaillent tous les acteurs pour protéger la population. Il y a plus rassurant.

Selon Magali Reghezza, spécialiste de l'aménagement urbain risque, il existe 1 chance sur 100 dans la prochaine décennie pour qu'une crue centennale menace Paris. De quoi relativiser.

Mais ce risque tient à peu de chose, ou plutôt à trois conditions qui doivent être réunies. Que les nappes phréatiques soient pleines, que les quatre barrages réservoirs construits dans les années 50 et 60 le long de la Seine et de ses affluents soient remplis et qu'ils pleuvent pendant 10 jours de suite. Au printemps dernier, les deux premières conditions étaient réunies. Du jamais vu depuis bien longtemps. 

 

La Loire fatalement indomptable ?

Sur la Loire, les risques sont aussi toujours présents. La configuration du lit du fleuve a rendu difficile  la construction d'ouvrages pour contenir son débit. Et malgré les crues dramatiques de 1856, 1866 et 1907, des travaux ont été entrepris très tardivement avec la construction deux barrages de régulation sur l’Allier en 1983 et près de Roanne sur la Loire en 1984.

Parallèlement, un long et couteux travail de rehaussement des "levées de la Loire" est en cours depuis les années 70. Il s'agit de conforter et d'entretenir des digues vieilles de plusieurs siècles qui cernent la Loire. Mais le passé a démontré qu'elles avaient souvent cédé sous la puissance des flots.

 

Le Rhône, le plus contrôlé

Malgré les inondations dramatiques de 2003, le Rhône souvent sujet aux débordements, ne fait pas l'objet d'un dispositif particulier pour contenir les crues. Les barrages existants n'influent qu'à la marge sur le cours du fleuve. Les riverains ne peuvent donc compter que sur les digues et les remparts le long du fleuve. Depuis 2003, un vaste programme de suivi, de restauration et de construction a été entrepris pour ce fleuve qui est très contrôlé.

 

Des digues pour la Garonne

La dernière crue "digne de ce nom" de la Garonne remonte à 1875. Depuis, toutes les humeurs du fleuve ont été deux fois moins importantes que cette date référence. De quoi mettre en émoi les 467 des 589 communes de Haute-Garonne potentiellement concernées par un risque d'inondation.

Des digues existent notamment à Toulouse pour se protéger des risques. Mais comme l'Etat et les collectivités locales se sont longtemps chamaillés sur le responsable de l'entretien de ces digues, les travaux ont tardé. Pour ne vraiment démarrer qu'en 2012.

En somme, la menace des crues centennales est prise au sérieux à travers la France entière. Et à défaut de travaux, l'Etat s'est doté d'un outil de contrôle en temps réel du niveau des cours d'eau à destination des particuliers. Cela donne Vigicrues, un site bien utile.

 

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