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Vincent Peillon : "Ne pas former aux métiers d'hier"

Vincent Peillon rapproche l'Education nationale et le monde de l'entreprise. Vincent Peillon rapproche l'Education nationale et le monde de l'entreprise.[R. MEIGNEUX / SIPA POUR DIRECT MATIN]

Ils ont répondu à l’appel. Chefs d’entreprises, salariés et enseignants intègrent le Conseil national éducation économie (CNEE), mis en place vendredi matin à Paris par Vincent Peillon, le ministre de l’Education nationale, en présence du Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Une manière de réfléchir à l’avenir professionnel des élèves.

 

Quel est le principe du CNEE ? 

Il s’agit de rapprocher les mondes de l’entreprise et de l’Éducation nationale en mettant autour de la table des chefs d’entreprise, des associations d’employeurs, des syndicats et des représentants de l’éducation. Nous avons beaucoup à gagner à travailler ensemble. C’est le moyen pour l’école d’assurer sa mission d’insertion professionnelle, parfois négligée, et de participer ainsi au redressement de notre économie. Lorsqu’il n’y a pas de coordination, ce sont les jeunes qui pâtissent.

 

Doit-on en conclure que les formations sont inadaptées ?  

Pas toujours, loin de là ! L’éducation nationale délivre déjà 700 diplômes professionnels. Il est faux de croire que l’école serait repliée sur elle-même ou que les entrepreneurs n’auraient pas le souci de la formation. Mais les élèves ne sont pas suffisamment informés des métiers qui s’offrent à eux et des formations qui y conduisent. Et lorsqu’ils sont orientés, parfois contre leur avis, on ne leur laisse pas assez la possibilité de se réorienter. Je veux changer tout cela et faire du lycée professionnel une filière d’excellence.

 

Comment vous y prenez-vous ?

Nous avons inscrit dans la loi un parcours d'information, d'orientation et de découverte du monde professionnel, obligatoire pour tous les élèves à partir de 2015, de la 6e à la terminale. Je souhaite que les professionnels puissent faire partager leur métier, concrètement aux élèves, grâce à des échanges, des formations, des conseils, des visites dans les entreprises sous la responsabilité des professeurs et de l’équipe pédagogique.

 

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"Les élèves ne sont pas suffisamment informés des métiers qui s’offrent à eux."
 

 

Et en quoi sera utile ce nouveau Conseil ?

Les collégiens d’aujourd’hui entreront sur le marché du travail dans la prochaine décennie.  Nous ne devons pas les former aux métiers d’hier, mais à ceux de demain. Nous devons être capables d’anticiper les évolutions, sur le numérique, le développement durable... Ce rôle, nouveau, de prospection, c’est celui du CNEE.

 

Pour, au final, gagner du temps ?

Il s’agit d’avoir des formations professionnelles adaptées aux besoins de chaque territoire.  Cela nous permettra de ne pas prendre de retard face aux mutations économiques et d’avoir suffisamment de jeunes formés pour les nouveaux métiers. Ils trouveront ainsi un travail sans difficulté à l’issue de leur formation.

 

Un travail va-t-il être fait sur la langue anglaise, quasi-indispensable aujourd’hui dans le monde du travail, mais pourtant mal maîtrisée ?

Nous avons de gros efforts à faire, car les élèves français sont mal classés dans les statistiques européennes malgré un nombre d’heures d’anglais comparable aux autres. C’est un sujet majeur pour nous, pour notre jeunesse, pour son insertion professionnelle, sa mobilité. C’est essentiel, notamment dans les filières professionnelles comme celles du tourisme. Nous allons y travailler.

 

Concernant la jeune Leonarda, comprenez-vous la mobilisation des lycéens depuis ce matin ?

On peut toujours comprendre que les jeunes se mobilisent pour défendre des valeurs. Ils ont, et c’est tout à fait naturel, une forte sensibilité sur ces sujets. Mais je leur demande de trouver d’autres moyens pour s’exprimer que de bloquer leur lycée et de faire entrave à la scolarité de leurs camarades, alors que c’est justement au nom du droit à la scolarité qu’ils réagissent. Je les appelle donc bien entendu à retourner en cours.

 

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"J'appelle les lycéens à retourner en cours"
 

 

La réforme des rythmes scolaires a commencé en septembre. Vous attendiez-vous à autant de difficultés ?

Une transformation de cette ampleur demande beaucoup d’efforts. On ne change pas autant d’habitudes, d’organisation, de vie quotidienne sans provoquer, inévitablement, des interrogations et des critiques. Il faut donner du temps à cette réforme qui est faite dans l’intérêt scolaire et éducatif des enfants.

 

Des villes demandent à revenir à la semaine de quatre jours...

Sur 4000 communes concernées cette année, il y en peut-être deux qui devaient passer à 4,5 jours et qui ont finalement reporté à 2014. Cela s’est fait à la demande de l’éducation nationale car elles n’étaient pas suffisamment prêtes. Cela ne sert à rien, dans ce cas, de passer en force.

 

Que répondre à ceux qui évoquent la fatigue des enfants ?

La fatigue est toujours très présente à la rentrée. La réforme vise justement à alléger les journées pour laisser respirer les enfants et leur permettre un meilleur temps d’apprentissage le mercredi matin. Il faut trouver l’équilibre entre le trop plein d’activités et le préau après la classe. Nous pourrons faire un vrai premier bilan sérieux en décembre pour apporter des ajustements si nécessaire.

 

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"Je ne veux pas me dérober devant une confrontation avec Jean-Marie Le Pen"
 

 

Vous avez aussi lancé la réforme des programmes....

Refonder l’école, c’est un projet global : former les enseignants, donner la priorité au primaire, reformer les programmes, améliorer le temps scolaire... Il faut cheminer sur tous ces sujets en parallèle et dans une cohérence d’ensemble.  

 

Vous serez candidat aux élections Européennes.En tant que membre du gouvernement, nest-ce pas risqué ?  

Je ne veux pas me dérober devant une confrontation avec Jean-Marie Le Pen et ce qu’il représente, le message qu’il incarne et qui porte en lui les germes du déclin français. Ce serait donner l’impression que nous n’assumons pas notre engagement européen et républicain en se mettant à l’abri dans les palais ministériels. Je veux être avec mes camarades face au repli nationaliste, la haine de l’autre...  Sans l’Europe, que serions-nous ?

 

Comment jugez-vous votre action depuis votre arrivée au ministère ? 

J’ai la conviction que nous avons commencé à remettre l’école en marche. C’est un long chemin, que je souhaite poursuivre. Nous devons convaincre, et ce n’est pas toujours simple dans une société trop souvent dominée par les faits divers, les conflits, les petites phrases. Je suis tout entier consacré à cette tâche.

 

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